Jour 1 - Trois Américains sur la Lune?

Pendant longtemps ou un temps très court, il n’y eut rien. Hier à Graymalkin, dans la salle de Cerebra avec leurs camarades et de brutaux envahisseurs, aujourd’hui … le vide épais comme une chape de plomb. Une nuit indiscernable. Peut-être un flash, peut-être un cri ? Ou bien, même ceci n’était que souvenir de la bataille de Graymalkin ? Un froid mordant s’imposa. Confus d’abord, puis de plus en plus vif. Corps fourbus, ankylosés, esprits perdus.

Le froid… et la suffocation.

Trois Américains, l’un plutôt de Chicago, l’autre plutôt de Denvers et la dernière plutôt de Los Angeles, eurent soudain l’impression aveugle mais nette de l’attaque mortelle du froid et de l’asphyxie. Quelques flashs de leurs vies passées furent peut-être projetés à leurs yeux par leur propre esprit engourdi. Ultime occupation avant la mort, aussi inexpliquée soit-elle.

Si tout cela ne dura qu’un instant, l’instant suivant fut une révolution : très faiblement, la respiration put reprendre. L’espoir se leva comme un astre sur une sombre plaine. Plus vite, une chaleur rassurante chassa la glaciation des corps des trois X-Men.

Dakota Evans, Damian Allaway et Eden Marshall reprirent conscience. Leurs yeux s’ouvrirent sur un ciel de nuit étoilée. Des étoiles plus nombreuses et lumineuses que le ciel des États-Unis. Une vaste étendue de neige, ou ce qui semblait en être, couvrait le sol à perte de vue. Une faible vapeur se détachait mollement, par volutes paresseux et discrets, de toute cette surface.

Ils étaient tous trois lovés les uns contre les autres, Hawkeye entourant Wraith contre lui, et Wraith ayant Eko blotti contre elle. Leurs habits n’étaient pas les leurs. Les deux garçons ne portaient qu’un pantalon gris, en espèce de tissu synthétique. La jeune fille avait un pantalon bleu du même type et une bande de tissu lui entourait la poitrine. Ils étaient nu pieds.

L’oxygène était rare, ils le surent immédiatement à la difficulté et l’angoisse diffuse qu’ils éprouvaient à respirer. Un étau semblait leur comprimer la poitrine. Toutefois, bizarrement, l’air était bien chaud autour d’eux, contraste saisissant avec le paysage polaire. Ils se sentaient tous les trois pâteux, ankylosés, épuisés. Mais au chaud.

En tâtonnant autour d’eux, ils sentirent quelque obstacle indéterminé. Ils étaient en quelque sorte sur un matelas de vide, légèrement au dessus du sol, et entouré d’un vide compact qu’ils ne pouvaient nullement franchir avec leur corps. Il semblait toutefois possible de « grimper » sur ce vide compact qui supportait leur poids.

A cinq ou six mètres de là, les trois X-Men aperçurent un feu de camp, aux flammes bleutés, sur lequel chauffait une casserole de simple facture. Quelques affaires pouvaient joncher le sol, ou bien autre chose de sombre qui se détachait sur le sol blanc. Personne aux alentours. A bien y regarder, le manche d'un fin ustensile, peut-être une cuillère, tournait lentement dans le récipient.


[HRP. Bienvenue sur Meredith, jeunes X-Men ! Vous pouvez utiliser les actions si vous le souhaitez mais on démarre a priori en phase libre. Bon jeu ^^]

Tout ça n'était qu'un horrible cauchemar. Très très lointain cauchemar. Jamais il n'y avait eu d'attaque. Qui s'en prendrait à des enfants? Si encore il avait s'agit des pères fondateurs, elle aurait pu envisager la possibilité. Des mutants inconnus se prenant pour leurs aînés avec une force de frappe comme elle n'en avait jamais vu, c'était impossible. Mais il n'empêche que le cauchemar paraissait bien réaliste. Surtout avec cette impression pesante de ne pas réussir à respirer correctement. Et puis il y avait eu un trou noir, puis le froid, puis un trou noir, puis les mutants dans le froid entourés d'un trou noir... Heu... Oui, les rêves étaient décidément bien zarbi à la longue. N'était-il pas temps de se réveiller?

L'impression de manquer d'air semblait persistante pourtant, et Eden bougea à peine dans un soupir contrit. Il faisait bon, c'était confortable, et... Elle sentit sous sa main une tête taille enfant. Adrian s'était encore glissé dans son lit cette nuit? Il allait vraiment falloir qu'elle lui parle de cette sale manie. Ouais, sauf qu'il y avait un souci... Depuis quand Adrian était à Graymalkin? Brusquement, elle ouvrit les yeux, clignant quelques instants des paupières. Dans son champ de vision, Dakota, endormi contre elle. C'était nouveau ça? Et c'était sans compter sur le bras qui était carrément posé sur elle. Son plumard était devenu un lieu de rencontre en vogue sans qu'elle ne s'en soit rendue compte? Elle l'aurait volontiers repoussé brusquement si elle ne s'était pas sentie aussi lourde et ankylosée. Difficilement, elle se redressa, relevant le bras de l'intrus numéro deux pour voir de qui il s'agissait et... Eut cette fois-ci réellement un sursaut.

Subitement assise, Eden était totalement réveillée. Malgré le confort et la chaleur, elle n'était définitivement pas dans un environnement connu. Le souffle court, elle porta une main contre sa poitrine pour réaliser que non seulement elle n'était pas particulièrement couverte, mais qu'en plus ce style ne correspondait en rien à celui qu'elle revêtait en temps normal. Et pour les garçons c'était pas mieux. Heureusement, ils semblaient vivants, à en croire leur respiration. Confuse, elle tâcha de rabattre ses cheveux en avant, esquissant une grimace de frustration en constatant que ceux-ci n'étaient juste pas assez longs pour dissimuler ses seins. Par dépit, elle croisa les bras sur ceux-ci et tâcha d'essayer de comprendre où elle se trouvait.

Le décor avait quelque chose de stupéfiant. De la neige... Partout de la neige, et une sorte de brume qui s'accrochait désespérément au sol. Pourtant elle ne ressentait aucun froid et, phénomène particulièrement étrange, aucun d'eux n'était en contact direct avec le sol. En douceur et péniblement, elle s'extirpa du duo torse poil et s'avança à quatre pattes sur l'étrange matelas de vide. Agenouillés, elle tâcha de restructurer les derniers événements. Comment passer du soleil de San Francisco à une pleine neigeuse au milieu de nulle part? Perplexe, elle leva les yeux vers le ciel étrangement chargé d'étoiles. Jamais encore elle n'en avait vu autant. Mais en même temps, qu'y connaissait-elle en astronomie? Sam lui avait appris à reconnaître la casserole de la Grande Ourse, mais là... Pas de casserole. Bah, elle ne la retrouvait pas, voilà tout. Il fallait maintenant se pencher plus sérieusement sur ses souvenirs. Ce qui n'était pas simple quand en prime on avait un peu mal partout, et de la peine à respirer correctement.

Il y avait eu la chute, puis le coup dans les côtes... Elle devait être trempée, ce qui n'était pas le cas et, à la lueur des étoiles, elle ne voyait rien qui puisse s'apparenter à un début d'ecchymose sur son flanc. Par contre, elle avait quelque chose dans le nombril qui attira son attention quelques instants. Un autre détail anormal à ajouter à la liste. Précédemment, Damian se trouvait près d'Alex blessé... Eden essaya de détailler les environs... Pas d'Alex, ni de Mbarou. Par contre, Dakota qui l'avait rejoint sous la forme d'Eko était bien là, idem pour Hawkeye. Les autres ne devaient donc pas être bien loin. Elle nota le feu bleu, sur lequel chauffait une casserole d'où un manche émergeait. Manche qui tournait tout seul. Elle plissa les yeux, incertaine, et douta d'avoir réellement vu ça. D'autres affaires jonchaient le sol, mais impossible de distinguer exactement ce dont il s'agissait. En essayant de s'en approcher, Eden rencontra une résistance. Incrédule, elle commença à tâter le vide, essayant de déterminer la forme de ce qui les retenaient. Au moins ça expliquait la différence visible de température entre eux et l'extérieur. Néanmoins, la situation faisait naître en elle comme une peur qui datait de Chicago. Bulle de vide, objet qui bouge tout seul... Champ de force ou télékinésie? La seconde possibilité lui faisait détestablement penser à Hélion.

Etrange sensation de vide, une intemporalité certaine régnait en lui. Hier Il se trouvait à Graymalkin, dans la salle de Cerebra avec ses camarades contre des mutants belliqueux et pouf! Néant!

Il avait eu l'impression d'avoir froid et de suffoquer.

Avant de revivre, de pouvoir respirer à nouveau et de ressentir une certaine chaleur. Ses yeux s’ouvrirent sur un ciel de nuit étoilée. C'était manifestement pas les Etats Unis, il avait assez dormi à la belle étoile avec le cirque pour savoir cela. De la neige, en tout cas ça y ressemblait grandement, couvrait le sol à perte de vue.

Damian put constater qu'Eden était réveillé, il avait par réflexe passé un bras autour d'elle sans doute au moment du froid... Il était un peu gêné et confus, il fit donc semblant de ne pas se réveiller tout de suite... Il y avait un troisième avec eux, le jeune Dakota, lui aussi lové contre Eden.

Ils avaient des habits qui n’étaient pas les leurs, ils portaient qu’un espèce de pantalon gris en espèce de tissu synthétique et Eden avait le même en bleu et un soutien-gorge improvisé ressemblant à une bande de tissu. Pas de chaussures, pas de vestes... Rien d'autres... Damian n'avait plus non plus ses couteaux, une sensation de vide l'envahit quand il pensa à Mia... Elle n'était pas là? Etait elle dans un autre endroit? Putain il y comprenait rien... Il commença à s'agiter et se rendit compte qu'il pouvait à peine respirer... Comme s'ils étaient en altitude...

Bref c'était pas la joie, quelque chose clochait...

Sans parler de la où ils se trouvaient... Une sorte de matelas de rien. Il remarqua la tête d'Eden et s'approcha d'elle doucement, quelque chose clochait... Les pères fondateurs les avaient ils retrouvé?

"Tu vas bien?... Je veux dire ça va?... J'ai un mauvais pressentiment..."

Eprouvant lui aussi la résistance.

"Tu crois qu'on a été capturés par les PF?"

5 - 6 mètres plus loin un feu de camp, aux flammes bleutés, sur lequel chauffait une casserole de simple facture avec quelques pouvaient jonchant le sol.

"C'est bizarre j'ai du mal à respirer comme si on était en altitude..."

Il se tournait vers Ecko... Et doucement le réveilla.

"Ecko... réveille toi!"

Puis il revint à Eden...

" On devrait p'tre appeler voir s'il y a quelqu'un? non?"

Eko ne se souvenait de rien. Il y avait eu ce flash et après c'était le trou. Le petit mutant bleu avait laissé la place au garçon blond à un moment ou à un autre. Il avait eu conscience de la fatigue engendrée par sa longue transformation et s'était probablement endormi. C'est comme ça que Dakota imaginait les choses durant son sommeil lourd.

Le gamin sentait à la fois du froid et un contact humain agréable. Il avait l'impression d'être dans un petit cocon de tendresse, chose qu'il n'avait plus connu depuis plus d'un an probablement. Il rêvait d'avoir la tête enfoncée contre le bras de son père, ou de sa mère, il ne savait pas vraiment. Il respirait mal dans cette position mais le contact était trop agréable pour bouger.

Mais on décida pour lui et il sentit le mouvement près de lui, détachant le peu de chaleur qu'il ressentait. Poussant un gémissement plaintif, le garçon chercha rapidement une couverture à remonter. Faute de draps, il fit une roulade pour aller se coller à l'autre source de confort et se blottit contre Damian sans le savoir.

C'était une mauvaise blague ! Lui aussi bougea ! Il commençait à avoir froid là ! C'était un mauvais rêve finalement. Dakota grogna en se retournant. Il avait faim. Il avait froid. Son souffle était lent comme tout endormi qui se respectait. C'était l'heure du p'tit dej ! " J'veux un hamburger…" marmonna-t-il devant Damian qui essayait de le réveiller. Eko ? Hein ? " Moi c'est Dakota. Comme l'état." affirma le garçon en ouvrant les yeux fatigués.

Damian était là. Il repartait vers Eden. Le petit blond se retourna sur le dos et observa le ciel. Plein de jolies étoiles. Ils avaient dormi dehors ? En tout cas il se sentait bizarre… Il devait avoir super mal dormi pour avoir autant la flemme de bouger.

Le gamin bailla bruyamment et ressentit soudainement l'étau sur sa poitrine. Il n'arrivait pas à bien respirer. Pris de panique, l'enfant lança à ses amis " Je suis bloqué, j'arrive… pas… resp… irer. ". Dakota s'assit et essaya de se calmer. Il remarqua à ce moment là qu'il était torse nu et fit le rapprochement avec Damian et… Eden. Reprenant une respiration lente et maîtrisée, il tourna la tête partout autour de lui. C'était quoi cet endroit ?

Le garçon baissa la tête et sursauta. " Putain je vole ! ". Se mettant à quatre pattes pour éviter de se manger le sol sans protection, Dakota gambada tel un nourrisson à une vitesse digne d'un escargot, agrémenté de "WoOow… " incertains lorsqu'il devait s'appuyer sur le… vide ? " C'est de la neige ? " demanda-t-il sans trop comprendre pourquoi il faisait si chaud.

Pas très rassuré, le blond resta au raz du "sol" pour se rapprocher d'Eden en charmante tenue légère. Sans pour autant la reluquer plus que nécessaire, parce qu'il y avait d'autres priorités, Dakota observa la marmite au loin. " J'ai faim. On y va ? ". Le môme commença à escalader le vide sans trop savoir comment il faisait. C'était bien connu : la faim justifie les moyens. Soudainement, le gamin regarda autour de lui. Ils étaient où les autres ? S'ils devaient réfléchir à toutes ces questions, autant le faire d'un beau bol de nourriture ! Et puis à coup sûr, ce n'était qu'un rêve.

Wraith trouva en effet, au creux de son nombril, une petite bille argentée qui se détacha facilement de la peau. Les deux garçons purent faire la même découverte de leur côté.

La télékinésiste tenta d'escalader ce vide compact que même son sens du toucher ne parvenait pas à saisir. Les garçons la virent ainsi progresser dans l'air comme sur une large bosse.

Dakota alla, de sa démarche de nourrisson, dans la même direction, rencontrant lui aussi le dos d'âne et grimpant à mesure que ses pas l'obligeaient à monter dans le vide. Il n'y avait pas moyen de faire autrement.

Sortis de leur "nid", Eden et lui ressentirent alors plus vivement le froid sur leur nuque et leur dos. Il faisait vraiment froid, hors du "creux" où ils s'étaient réveillés blottis ensemble. Un froid très vif leur glaça les sangs. La température était difficile à estimer, mais sans doute assez éloignée du zéro pour susciter des claquements de dents et des frissons incontrôlés.

Damian tâtait la "résistance" qui les empêchaient d'occuper certaines parties de l'espace autour d'eux. Il s'aperçut que le vide compact les entourait. S'il allait vers la casserole, à la suite d'Eden et Dakota, le vide était "praticable". Dans les autres directions, et en particulier derrière lui, le vide compact s'élevait davantage, rendant plus difficile l'escalade. Mais pas impossible néanmoins. En tendant les bras il pouvait percevoir que le vide s'incurvait légèrement. Stationné au point de départ, Hawkeye ne sentait pas la morsure du froid.

Les trois X-Men peinaient toujours à respirer, situation oppressante, qui obligeait à des mouvements lents et lourds. Leurs corps étaient las et cotonneux.

Regardant autour de lui, Eko vit soudain, loin à l'horizon, de frêles touches de lumière briller et dessiner le sommet de collines lointaines.

La cuillère cessa de tourner dans la casserole.

Alors, les trois jeunes gens entendirent, directement dans leur tête, une voix. Une voix plutôt féminine hésitante. Les premiers mots furent absolument incompréhensibles ni imitables. Ils sonnèrent complètement étrangement au cerveau des jeunes gens. C'était comme une série de souffles articulés et gutturaux.

Puis des syllabes et des mots en anglais s'imprimèrent à l'esprit des X-Men, mais aussitôt effacés, mis de côté. Comme un enfant qui fouille dans un coffre à jouet et lance derrière lui les trouvailles jusqu'à tomber sur la bonne. Et cela se passait dans leur propre cerveau :

*§*¤¤§µ¤... ¤¤§*¤*§µ¤... Anfnexh...ataxhf...?...question...Je veux dire ça va?...départ...arrivée...positif... formule bon accueil... Bonjour.*

Tout restait silencieux. Eko et Wraith étaient arrivés au bord du "matelas de vide" car il purent toucher le sol. La texture était poussiéreuse, froide, à mi chemin entre neige farineuse et cendres blanches. Tous deux se sentaient néanmoins glacés jusqu'aux os, les mains et pieds terriblement engourdis, la peau de la figure pétrifiée.

Avançant prudemment, Eden constata non sans un certain soulagement qu'ils n'étaient à priori pas enfermés. La perspective de se retrouvé en cage lui avait pendan un moment effleuré l'esprit. Ceci dit, elle était loin de se sentir en sécurité pour autant. Le regard fixe, elle était revenue fixer le manche qui bougeait tout seul. Peut-être qu'elle était juste en train de cauchemarder en fait. Le rêve n'était pas terminé. Partiellement plongée dans ses pensées un peu floues, elle entendit bouger derrière elle. Les garçons se réveillaient. Elle ne leur jeta pas un regard tout de suite, se contentant de resserrer ses bras autour d'elle, autant par le froid qui devenait cinglant à distance du lieu de réveil que par une gêne sous-jacente. Sans compter la respiration, décidément bien difficile. Ils étaient vraiment dans les montagnes? Damian se rapprochait derrière elle, et elle essayait de replacer les derniers événements.

C'était un beau grand bordel. L'attaque avait vraiment eu lieu? Elle commença à en douter. Pourtant, elle se rappelait les missiles braqués sur leur jet. Ce jet qui n'avait rien eu à faire dehors. Elle fronça les sourcils un instant. Tout ça c'était vraiment passé? Les paroles de la femme bleue lui semblaient toujours dénuées de sens. De même que celles de la blonde qui les avait téléporté dans Cérébra. Peut-être que la machine avait réellement exécuté son auto-destruction, mais elle voyait mal comment l'au-delà, le purgatoire, ou n'importe quoi qui puisse s'assimiler au monde des morts pouvait s'apparenter à ça. Et puis il y avait eu un inconnu, d'autres mutants bizarres, des blessés partout, une lumière vive... Non, décidément elle n'y comprenait rien. Il n'y avait aucune logique qu'elle puisse saisir dans les événements passés et présents.

Quand il s'enquit de sa santé, ou de son état mental, elle ne savait pas trop, elle marqua une longue hésitation. Comment devrait-elle aller, hein? Dakota était là. Si Damian et les autres avaient laissés ce foutu jet à leur place, certains de ceux qui étaient au sous-sols auraient peut-être eu une possibilité de fuir Graymalkin, d'être dans un lieu sûr, et probablement de les rechercher. Au lieu de ça, ils étaient paumés dans un endroit glacial, à l'air limité, avec des phénomènes incompréhensibles, et séparés les uns des autres. Comment devrait-elle se sentir, hein? Son souffle s'agita un instant, et elle se força à calmer sa respiration pour la laisser prendre un rythme plus lent et surtout moins pénible puis, tournant un regard tout à fait neutre vers Damian, elle répondit par un très aimable et naturel...

"Ça va."

Franchement, ce n'était pas le moment pour elle de laisser ses propres ressentiments s'en mêler. Mieux valait plutôt concentrer son énergie sur la tentative de compréhension de la situation, ne serait-ce que pour retrouver les autres. Elle en revint aux pères fondateurs.

"J'ai cru... Mais si c'était eux, ils nous auraient enfermés mieux que ça. Ou mieux, ils nous auraient tués."

Déjà avec Damian qui avait abattu Ribs, elle qui avait porté le chapeau et certainement confortés cette hypothèse en participant plus qu'activement au meurtre de Frimas - à en croire les médias - les PF's ne les auraient certainement pas laissés en vie. Ou alors pour les torturer allègrement. Elle nota la remarque de Damian sur l'altitude, certainement la raison la plus normale du manque d'air, et hocha la tête avant de se tourner vers Dakota qu'il invitait à se réveiller. Le pauvre eut un instant de paniuque à cause du manque d'air.

"Tout va bien aller si on ne s'agite pas trop. On peut respirer."

De toute manière, le garçon se calmait de lui-même pour s'émerveiller de leur situation. L'un s'interrogeait sur la neige, l'autre sur la présence d'individus. Ils n'avaient qu'eu le temps de s'avancer un peu plus que la seconde question eut sa réponse. Et d'une façon qui dérangeait passablement la californienne. S'il y avait bien une chose qu'elle n'appréciait pas, c'était qu'on fouine dans sa tête. Même pour y chercher du vocabulaire. Mais au moins, la voix qui devenait plus ou moins explicitement féminine n'était pas celle d'Hélion. La seconde interrogation resta vague quand elle effleura la neige. La texture était étrange, et le froid particulièrement insupportable, couplé à la lourdeur de leurs corps. Elle eut néanmoins le réflexe d'en prendre une poignée, juste pour voir si celle-ci fondait au contact de sa peau. Elle reculerait ensuite. Fermement, elle lança à haute voix.

"Qui êtes-vous? Montrez-vous!"

Au loin, l'aube semblait poindre. Ils y verraient probablement plus clair dans cette histoire à la lumière du soleil.

La poudre que Wraith prit dans sa main, après quelques instants, humidifia sa peau légèrement. Une partie infime de la poudre avait fondu mais le reste possédait une structure inconnue, à la fois soyeuse et granuleuse.

Le silence répondit à Eden. Puis les mêmes échos de voix tintèrent dans leurs têtes.

*§$*¤§µ¤... ¤¤§*¤"Fantôme. Spectre. OVNI. Extraterrestre. Lutin. Elfe. Esprit. Je suis une race différente. Vous n'avez pas de mot ni d'idée. Pour vous remplacer.secourir.assister aider je vous dis que je suis au front.en devanture. en face. Proche de la flamme. Voulez-vous des impressions.photographies.montages.projections. images de moi et de mon cheval.destrier.monture.peluche.mammouth.à poils longs.fourrure. dragon laineux ?*

Les jeunes gens sentaient toute cette confusion dans leur cerveau et percevaient bientôt autant de fatigue que s'ils s'étaient penchés eux-mêmes sur un problème de maths épineux depuis de longues minutes. La voix extirpa encore une question.

**Je souhaite vous ristourner.rembourser.réexpédier. renvoyer la question s'il vous plait, selon laquelle, qui êtes-vous ?*

La lumière du jour progressait sur les sommets des collines lointaines. Une lueur rose oranger naquit à l'horizon, repoussant la noirceur du ciel.

Eden ne semblait pas penser qu'il s'agissait d'un coup des pères fondateurs. Pourtant elle et lui avaient partagé des choses assez intimes là-dessus. Triste épisode où elle avait désiré se mettre en avant pour être prise en otage comme la tueuse de Rib. Lui n'avait pas dégainé assez rapidement et une mini-déprime s'en était suivie.

Ses arguments étaient bons, et les soucis pour respirer qu'ils avaient... C'était bizarre... Cela confirmait son impression d'altitude.

Dakota paniqua. Reveil difficile, surtout quand la respiration est ardue. Eden le rassura et lui indiqua la bonne démarche.

Damian partit finalement à la suite de ses camarades de jeu. Se forçant à prendre appui sur rien, sur le vide. Lui aussi confronté à la relative chute de température du lieu. Il avait aussi ressentit l'étrange communication qui lui arrivait directement dans la tête.

Mais où pouvez bien être Mia???

Etait elle dans les parages? dans une autre de ces cellules étranges? Est ce qu'il la reverrait?

Eden tenta de communiquer avec l'esprit.

Damian communiqua à son tour.

"heu oui donnez nous une image de vous?... Nous nous sommes de simples humains... Qu'est ce que vous nous avez fait?" demanda t il à la voix...

En pensée, Hawkeye répondit à la voix qui puisait dans leur tête. En réponse, les trois X-Men virent se former une image derrière la casserole et le petit feu bleu. C'était étrange et progressif comme un dessin qui se forme, utilisant la palette de sens et d'impressions contenue dans leur cerveau.

Une créature humanoïde, assise en tailleur, se trouvait derrière le foyer de fortune à manier la louche. C'était une femme à la peau, aux cheveux et aux yeux entièrement blancs, laiteux même. Ses oreilles étaient en pointe. Elle portait des demi-manches blanches, le reste de sa tenue était noire, ajustée à ses formes plutôt généreuses. Un bandeau rouge lui ceignit la tête. Ses lèvres rougirent aussi.

Les jeunes gens virent aussi se peindre, autour d'eux, une image plaquée sur le "vide compact". L'espèce de creux dans lequel ils s'étaient réveillés, blottis, était le giron d'un énorme animal couvert à la fois de longs poils laineux et d'écailles. La "bosse" qu'Eden et Dakota avaient franchi étaient en fait une énorme "patte" semblable à celle d'un ours mais beaucoup plus massive. S'ils se tournaient, ils voyaient donc le ventre, le long cou, et l'aile paresseusement relevée d'une créature couchée, hybride entre dragon et yéti. Sa face était longue, chevaline. Ses yeux d'un noir de jais étaient à peine visible sous les longs poils de sa frange. Un immense cheval-dragon-ours poilu, ailé, voilà ce qui avait apparemment "couvé" les Terriens.

Du moins telle était l'image qui leur apparaissait à l'esprit. Au toucher, le "vide compact" était toujours aussi insaisissable. On ressentait seulement la chaleur émanant de cette créature, et qui avait sans doute protégé les exilés du froid.

La lumière de l'aube montait, et avec elle, légèrement, la température. Le froid devenait moins insoutenable, même si toujours vif.

La poussière neigeuse se mit à produire davantage de brume, sur toute la surface du sol. Les X-Men eurent l'agréable impression d'une respiration un peu plus facile, en tout cas moins oppressante.

Aussitôt sorti du creux dans lequel il était, Dakota se releva, tâtant le terrain d'un pied incertain pour éviter de se retrouver la tronche à bouffer de cette poussière blanche. Le gamin sentit le froid partout sur son corps et il s'entoura le torse en pensant naïvement qu'il conserverait mieux sa chaleur. "Putain ça caille trop !! ". Le petit blond suivit Eden, moyennement rassuré par cet environnement déstabilisant. S'il avait trouvé marrant tout cet univers au début, une pointe d'inquiétude commençait à poindre maintenant.

D'habitude, les grands n'avaient jamais trop peur et savaient toujours quoi faire. Mais là ils semblaient aussi paumés que lui. Entendant la voix comme les autres, Dakota regarda partout autour de lui pour chercher ce qu'il croyait être un fantôme. Eden demanda tout de suite à qui ils avaient affaire. Ils étaient avec un extraterrestre invisible ! Un truc qu'ils avaient jamais vu. Et invisible. L'enfant ressentait la recherche de vocabulaire sans son crâne sans trop comprendre comment c'était possible. Restant près d'Eden, il observa Damian demander à voir la créature.

Dakota écarquilla les yeux en voyant une femme apparaitre, assise en tailleur, près du feu. Derrière eux, leur nid se révélait être un superbe dragon poilu ! "Trop coooooool ! " s'émerveilla l'enfant devant la créature. Ils étaient bien contre elle finalement. Toujours un peu glacé jusqu'aux os, d'autant que le sol ressemblant à de la neige, le gamin y serait bien retourné. Mais d'abord, il fallait penser aux priorités. " On peut manger quelque chose ? " s'hasarda-t-il à demander à la femme fantôme avant de rajouter après quelques cours secondes un "S'il vous plait." qui montrait que la formule de politesse n'était pas naturelle chez le blond.

Devant l'enthousiasme de Dakota, et son rattrapage de politesse, un sourire se peignit sur la face blanchâtre de la créature féminine. Elle eut une sorte de hoquet qui fit penser à un rire, mais silencieux.

Son phrasé télépathique se faisait plus fluide, même si persistaient les échos de mots avortés dans la tête des jeunes gens.

*Oui, infanton, plus jeune, petit garçon, dénommé Eko, il y a à manger dans la maison, exploitation, ferme dans cette direction.*

Son bras se déplia et son index désigna l'horizon encore noir à gauche des X-Men. Son regard blanc se posa vers Damian.

*Vous êtes des humains, mais non pas simples. Quelle est votre provenance ? Comment par quel moyen pourquoi êtes-vous venus sur Meredith ? Est-ce que vous n'avez pas une dénomination, identité, un nom ? Qu'est-ce que c'est : jveu inhambeurgeur ?*

A cette salve de questions, la créature s'interrompit. Des mouvements venteux se faisaient entendre.

La lumière qui avait peu à peu couvert les sommets arrondis de collines se réfléchit sur la vaste plaine où le groupe se trouvait. La plaine était onduleuse, glaciale et grise. Elle était parsemée de vagues de cette substance neigeuse. La lumière de l'astre solaire s'avançait très rapidement. Au contact de cette aube, la brume émanant du sol s'épaissit. Les volutes jusque là paresseuses prirent de la vigueur. Un nuage compact de brume grise s'éleva en nappes de la plaine, formant bientôt des tourbillons, des bouffées de vapeur de plus en plus volumineuses. L'approche de la lumière semblait faire évaporer le sol.

La créature se leva de devant son petit feu bleu où reposait toujours la petite casserole. Sa bouche s'affaissa et ses sourcils dessinèrent une expression affligée sur son visage.

*L'aube est mon signal de départ du train. Veuillez vous assurer de répondre vite pour rendre grâce à, honorer, remblayer, combler, satisfaire mon vilain défaut ma curiosité...*

Le monstre hybride commença à se lever. Le "vide compact" poussa Hawekeye. Comme si on lui retirait le tapis épais qu'il avait sous les pieds, le X-Man dut faire quelques pas forcés pour en descendre et prit pied sur le sol froid, nuageux et poussiéreux.

La respiration continuait à se faire plus facile, et le climat était moins froid de seconde en seconde.

Petit garçon ? Dakota se tût parce qu'il avait faim et que si ça se trouvait, c'était un monstre mangeur de chair humaine, mais il n'en pensait pas moins ! Petit garçon ! Et puis quoi ! Il devait bien faire dans les… un mètre et demi ! Facile ! Et puis il commençait à accuser le coup de l'âge du haut de ses presque 12 ans ! Un vieux loubard ! C'était tout lui. Et on la lui faisait pas ! D'ailleurs, le fantôme s'était planté sur son nom. Eko, c'était l'autre. La saloperie bleue !

Le gamin observa la direction pointée vers une hypothétique ferme. "Vous faites pousser quoi ? " se demanda-t-il. Le climat avait l'air un peu pourri et le sol moisi pour que le moindre truc survive. Le fantôme parla de "Meredith". Le lieu où ils étaient. " C'est qui Meredith ? On est sur quelqu'un ? Là ? On est tout petits ? Si ça se trouve, les machins blancs, ce sont ses péloches ! " lança-t-il en se marrant.

Mais y'avait pas que lui qui était curieux. L'esprit aussi l'était ! "Moi c'est Dakota ! Et un hamburger, c'est un genre de sandwich avec du pain un peu brioché et un steak au milieu, avec du fromage et de la salade et des sauces trop trop trop bonnes, et un gros morceau de cornichon géant au milieu, mais moi je l'enlève, j'aime pas ça ! C'est gros comme ça ! " indiqua-t-il en faisant un rond avec ses pouces et ses index. " Si vous en avez pas ici, vous savez pas ce que vous ratez ! " La bouffe, une seconde passion. Et la première ? Aucune idée. Mais ça faisait un peu trop "gros tas" de dire qu'il était passionné principalement par la bouffe, même pour un enfant en pleine croissance…

Mais le soleil se levait encore plus qu'avant et ses rayons faisaient lever de la brume partout. " Putain mais le soleil il fait cramer la neige super vite ici ! Il doit être méga putain de trop chaud ! " Surtout que comme ils étaient bien à poil, ils allaient prendre de beaux coups de soleil ! Eden aurait une jolie bande blanche à la poitrine. Ca serait comme le poulet. Le blanc : c'est le meilleur. Faudrait qu'elle fasse du topless pour équilibrer tout ça. Le petit blond lubrique observa un instant Eden avec un sourire aussi innocent que son regard en tentant d'imaginer la scène.

Puis comme le dragon poilu semblait bouger et que le fantôme voulait se lever, Dakota réalisa soudainement qu'il avait encore plein de questions ! " Mais c'est quoi par terre ? De la neige ? Et c'est quoi Meredith ? Tu vas où ? On peut venir avec toi sur ton dragon ? J'ai toujours rêvé de voler sur un dragon ! " En fait pas vraiment. Il avait jamais songé à chevaucher ce genre de bestiole. Mais maintenant que l'occasion se présentait...

il avait rejoint les autres de l'autre côté de la queue de la créature appelée dragon laineux. Il faisait froid, même si son corps semblait s'adapter et se familiariser à son environnement. A moins que ce ne soit l'être qui faisait cela.

Il avait faim, tout comme Dakota. Il se demandait si la "bouffe" allait être bonne pour eux... Damian était un peu paumé... Il était en train de réaliser qu'ils étaient ailleurs, pas en amérique, mais ailleurs... Un monde imaginaire, ou parallèle ou un truc du genre.... Cette constatation le rendait anxieux. Dakota aussi semblait paumé...

Meredith.

Qu'est ce que c'est que Meredith?...

"ouais c'est quoi Meredith?"

Il répondit dans le même temps que le jeune Dakota qui bombardait de question l'être aux oreilles pointues. Damian jeta un coup d'oeil perplexe à Eden... Pourquoi eux... Pourquoi étaient ils là et surtout où étaient les autres???

"Tu vas te coucher?"

Il n'y avait rien de plus désagréable que de ressentir quelqu'un communiquer directement dans son crâne en fouillant dans ses connaissances sans le voir. Eden grinça sensiblement des dents malgré elle. Pourtant, elle devait bien reconnaître que la chose inconnue n'avait jusque-là rien fait qui puisse leur nuire. Elle tâcha de tirer les informations les plus pertinentes. Autre race, féminine, sous leur nez mais invisible, aimable, prête à se montrer sur demande, curieuse également. La réflexion devenait fatigante sans pour autant cesser d'induire de nouvelles questions que la californienne n'eut pas la nécessité de poser. La vision surprenante d'une femme aux oreilles pointues, aussi spectrale que voluptueuse. Les surprises ne s'arrêtèrent pas là. Baissant les yeux sur son appui, Eden pu constater que leur "matelas" en plus de ne pas être si vide que ça, était surtout vivant. Elle releva brusquement les mains, serrant toujours dans son poing le "sable" qu'elle avait ramassé. Son regard coula, incrédule, sur l'imposante patte, le corps, l'aile, la tête chevaline de l'énorme créature. L'espace d'un instant, elle se demanda très stupidement quel genre de permis il fallait passer pour monter une créature pareille. Intriguée, Wraith plissa les yeux et inclina la tête sur le côté, à la recherche d'un meilleur angle de vue pour saisir le regard sombre de la créature. Fallait-il fuir? Elle porta un regard dubitatif sur Dakota qui, sans doute grâce à son jeune âge, paraissait plus qu'emballer par ces nouvelles visions.

L'inquiétude commençait sérieusement à la gagner. Relevant un court intant les yeux vers ce ciel qui s'éclaircissait, Eden ressenti comme une de ces vieilles peur dont on ignore l'origine exacte. La peur de l'inconnu. Ils étaient loins, très très très très loins de chez eux. Le ciel ne ressemblait en rien à ce qu'elle connaissait, l'aube faisait naître des vapeur du sol, produisant ce qu'elle pensait être l'oxygène qui leur manquait jusque-là, réchauffant l'ambiance avec une rapidité qui n'augurait pas grand chose de bon si rien ne ralentissait cette montée du mercure. Elle espéra futilement pendant un instant se trouver simplement dans l'un de ces déserts dont on trouvait les images dans un livre de géographie. Ces lieux où les températures connaissent des écarts extrêmes entre la nuit et le jour. Sauf qu'à sa souvenance, Victoria ou Sahara ne comptaient pas de créatures elfiques vaporeuses ni de dragon laineux.

La question de Dakota ramenait à des considérations plus terre à terre. Manger, oui. Mais même avec la faim, Eden aurait largement préféré qu'on lui montre une carte et lui dise "en faite, tu es là. En marchant un certains temps, tu trouveras une gare, un aéroport, n'importe quoi qui puisse te ramener à la maison". Seulement fallait pas trop y compter, hein? Machinalement, elle suivit des yeux la direction indiquée par la cavalière du dragon. Une ferme, hein? Quel genre exactement? Pourvu que "Meredith" ne soit que le nom d'un état méconnu, d'une région, d'un bled paumé au fin fond du Nevada, ou quelque chose dans le même genre. L'inconnue annonçait déjà son départ. Devait-elle demander de se faire emmener? C'était trop tôt pour les laisser là avec autant de questions! Un Dakota plus que motivé répondait, et elle ne fit que baisser les yeux sur ce qu'elle avait ramasser. La texture était étrange, elle n'en avait jamais connu de semblable. Ça lui rappelait vaguement le sable, mais il était différent de celui des plages de Los Angeles ou de San Francisco. Il était humide, cette humidité qui se faisait emporté par la chaleur naissante en leur apportant de quoi respirer. Jusqu'où la brume allait-elle s'élever? Encore des questions. Dakota le faisait même remarquer, et elle croisa son sourire sans trop en comprendre la signification. Il devait juste être émerveillé par ce qui les entourait. Ouais, c'était ça... Hem. Elle haussa un sourcil et croisa le regard perplexe de Damian qui s'impatientait. Finalement, elle se décida à demander à son tour, sur un ton redevenu plus calme à mesure qu'elle respirait mieux.

"Je m'appelle Eden, et toi, quel est ton nom? Comment nous as-tu trouvé?"

Comment étaient-ils arrivés là surtout. Avait-elle remarqué d'autres humains? Leurs camarades? Ils étaient vraiment livrés à eux-mêmes? Ça faisait beaucoup d'informations incomplètes à digéré. Eden repensa à cette soi-disante ferme. S'il s'agissait d'un endroit où pouvoir se terrer pour essayer de comprendre ou au moins s'organiser, ce ne serait pas si mal. Parce que s'il ne s'agissait pas de leur monde, ni d'un délire collectif, il allait forcément falloir songer à trouver de quoi subvenir à leurs besoins de base, avant d'espérer partir à la recherche de la moindre solution pour rentrer chez eux.

La poudre froide dans la main d'Eden s'évaporait elle aussi à vue d’œil, tout comme l'ensemble du sol sableux sur lequel les jeunes gens se trouvaient. Dans le ciel, les étoiles semblaient plus larges, les plus petites et toutes les vagues nébulosités aperçues au réveil suffocant avaient disparu. Les collines grises alentours se changeaient en une blanche intensité vaporeuse.

L'Elfe blanchâtre écouta les gazouillements animés de Dakota avec le plus vif intérêt, si l'on en jugeait par ses yeux blancs fixés sur lui et son sourire quasi enfantin.

*Sandwich..."*¤¤__¤¤£??? et un hamburger__*#"$ ¤¤))°!?ç ce ne sont que des entités choses qu'on ne voit pas sur Meredith, ma planète.*

Puis, suite à la remarque climatique du plus jeune.

*Neige... poussière... évaporation... air refroidi... congelé... dunes grises... nuit longue. La nuit pour votre genre est mortelle. Oui je vous emmènerai où vous voulez sur mon dragon chers amis !*

Les X-Men perdirent le contact visuel avec l'étrange femme et son dragon laineux, comme si les grains de vision s'étaient évaporés aussi dans la brume tourmentée. Tout le paysage s'évaporait de plus en plus fortement.

*Me coucher non, plutôt le verbe partir.*

Entendirent les jeunes gens dans leur tête à la question de Damian. La femme semblait audiblement pressée, voire stressée. La voix pulsa plus fort dans leur tête comme une sono mal ajustée.

*EDEN. Mon nom est $°§_¤§*°] soit l'équivalent de... la traduction de... le vocabulaire le plus proche dans votre langue... Ornithologiste... Association de Protection des Oiseaux Rares... Pigeon voyageur yeux ouverts... Collectionneuse... École d'étude géographique... Petite curieuse sans autorisation parentale... Suiveuse de fourmis de loin... Mais vite je vous quitte. Je vous ai trouvé séparés éparpillés dans la région sur le bas sol dans la #=¤$¤ des points chauds est apparu j'ai décidé de vous aider sauver d'une mort certaine car la surface est mortelle et pendant durant que mon dragon vous réchauffait en bloc je suis allée chercher dans une grotte cave des herbes de tisane QUE VOUS DEVEZ BOIREAUREVOIR*

La voix s'évapora, tout comme les zones de "vide compact" encore présentes autour des jeunes gens. Ils sentirent leur crane plus léger, un vrai soulagement s'empara d'eux.

Le petit feu bleuâtre qui réchauffait la casserole grandit et enveloppa le récipient comme une enveloppe protectrice.

De proche en proche, d'est en ouest gagnait l'envahissement vaporeux. Autour des jeunes s’éleva une mince buée. La lueur orangée sur l'horizon devint une ligne brillante, une mince bordure d'un éclat intolérable à l’œil. Elle prit bientôt une forme circulaire, devint un arc, un spectre flamboyant qui lança vers les jeunes gens une ardente chaleur. Cette lumière très vive parut leur crever les yeux.

Un nouveau son se fit entendre, une sorte de bruissement tempétueux, de froissement de vent qui secouait un grand manteau aérien. Les jeunes gens sentaient ces mouvements violents les pousser et les fouetter. En ouvrant prudemment leurs yeux éblouis, ils purent voir l'air qui semblait se précipiter, bouillonner comme lorsqu'on met un fer chauffé à blanc dans la neige. Ce qui avait été le sol, cette poudre indistincte et glacée, devenait au contact du soleil une boue, une pâte flasque et molle qui sifflait et bouillonnait avant de se changer en gaz. Les mutants durent se cramponner entre eux ou bien être balayés, malmenés par cette aube violente.

Les bouffées de vapeur, la boue semi-liquide, tout cela montait, glissait, tombait de bas en haut ou de haut en bas dans une tempête affolante. La lumière très vive d'un soleil plus orangé que celui connu des Terriens perçait la confusion par ses traits flamboyants et aveuglants.

Le trio d'humains à demi-nus virent s'abattre un immense éboulement de ces matières confuse, boue tiède et liquide en décomposition. Une lourde chape de poussières à bulles, dont le contact avec la peau fut comme une bouillasse pétillante, fondit sur eux telle une avalanche...

Fronçant les sourcils, Eden baissa à nouveau les yeux sur la poudre qu'elle avait au creux de la paume. C'était quoi au juste comme matière? Quel genre de sable pouvait s'évaporer aussi vite? Elle n'était même pas certaine de pouvoir prétendre que c'était des cristaux de neige ou quelque chose dans le genre. Le seul détail dont elle pouvait plus ou moins être sûre était que ce truc était figé grâce au froid, et se vaporisait à une vitesse affolante avec la montée de la température. Elle ne s'y attarda pas vraiment, prise d'un nouveau commencement de crainte à l'évocation de Mérédith. "Sur", "planète", le délire devait être sacrément gratiné. Comment diable avaient-ils pu se retrouver carrément sur une autre planète? Elle ne saisissait pas. L'image de la téléporteuse, bras en l'air, exultant sa lumière aveuglante lui revint en tête. Se pouvait-il qu'un mutant, tout extra-terrestre qu'il soit, puisse développer la puissance nécessaire à une utilisation cosmique de son pouvoir? Si la réponse était oui, alors ils avaient tous de gros soucis à se faire.

Elle en revint à l'inconnue qui évoquait leur environnement, cherchant encore quelque chose dans leurs connaissances qui puisse décrire ce qui les entouraient, en vain lui semblait-il. Elle était volontiers prête à croire à l'aspect létale de la nuit. Il n'y avait eu qu'à voir avec quelle violence le froid l'avait transpercée hors du giron de la monture. L'aube les sauvait, du moins pendant quelques instants. La température montait vraiment trop vite à son goût.

La recherche d'une équivalence nominative pour l'elfe lui parut atrocement épuisante, bien que partiellement révélatrice. C'était une éclaireuse? Aventurière? Voyageuse? Assez curieuse pour sauver des extra-mérédithiens avant d'avoir pu se demander si ils étaient potentiellement dangereux ou juste trop barbares. Face aux compétences de la non nommée, de son dragon, et de leur aspect potentiellement invisible, Eden se sentait désagréablement vulnérable. Au moins, l'elfe se montrait aimable et leur répondait. A peine trouvés éparpillés dans ce désert mortel laissait entendre que d'autres de leurs camarades s'étaient peut-être trouvés dans la même situation. Seulement... Sans la chaleur d'un dragon laineux, combien d'entre eux pourraient avoir survécu? La brusque pensée que certains des leurs étaient morts lui fila une bouffée d'angoisse qui précipita son souffle, l'espace de ces quelques petites secondes nécessaire pour se reprendre.

Ils allaient se retrouver livrés à eux-mêmes. Déjà l'inconnue disparaissait avec sa monture, leur imposant le sol, et ne laissant derrière eux qu'une recommandation avec une casserole dans un cocon de flammes bleues. Elle voulu crier à la créature de les emmener, ou de ne pas les laisser comme ça, mais la lumière brutale venue de l'horizon l'obligea plutôt à se couvrir les yeux en détournant la tête. Le soleil éclatant et orangé semblait consumer le sol à mesure de son avancée. Et ils étaient immanquablement sur le passage. A ce rythme, il leur faudrait un abri, et vite. Seulement le temps de trouver la dite ferme, à supposer que celle-ci ne s'évapore pas comme le reste, ils auraient bien l'opportunité de finir en bacon sur le barbecue géant nommé Mérédith. Le souffle provoqué par la chaleur l'obligea par réflexe à agripper d'une main le bras de Dakota, et de l'autre le poignet de Damian. Et bien que l'idée lui paraissait encore dénuée de sens, son seul repère restait cette casserole au contenu douteux, et la dernière recommandation de celle qui leur avait sauvé la vie. Elle se concentra du mieux possible sur cette casserole, espérant qu'en plus de sa santé, elle avait aussi récupéré la force nécessaire à l'utilisation de son pouvoir, et tâcha de leur apporter à tous le récipient pour qu'ils puissent suivre le dernier conseil et boire ce... Truc.

Wraith attira vers elle la casserole, au moment où les tourbillons la dérobaient à sa vue aveuglée. Elle sentit l'objet et la douce chaleur contre elle, mais l'avalanche s’abattit sur les mutants.

Ce torrent de boue liquide et pétillante, tiédasse au toucher, les ensevelit en s'insinuant partout, en particulier dans leurs bouche, nez, yeux et oreilles.

Ils furent balayés pelle-mêle, et envoyés à quelques pas les uns des autres, mais pas pour très longtemps. La bourrasque folle allait et venait comme dans un shaker, s'arrachant d'eux aussi vite qu'elle les avait recouverts, les fouettant sauvagement puis refluant comme des vagues désorientées.

Dans cette tempête d'un genre inédit, Eden parvint à boire une gorgée de liquide : une eau à peine chaude teintée d'un goût de réglisse.

Ils allaient se retrouver livrés à eux-mêmes avec le départ annoncé de l'être qui les avaient accueilli et sauvés de multiples dangers.

Leur seul espoir résidait dans cette espèce de casserole qui mijotait tranquillement comme si de rien n'était. Une lumière brutale venue de quelque part près de l'horizon l'obligea à détourner la tête... Pourvu que Mia arrive à se protéger de cette lumière là où elle se trouvait.

Le soleil et ses rayons fondait tout sur son passage. Sa puissance devastatrice rendait le sol à l'état de bouillie informe, une sorte de plasma infâme. Il fallait qu'ils trouvent un abri. Il sentit Eden qui posait une main son poignet comme s'il était une bouée, lui même lui répondit en se rapprochant d'elle. Une proximité salvatrice de trois êtres humains dans un monde qui n'était pas le leur.

Il vit Wraith qui attirait vers elle la casserole, au moment même où ils furent submergés... Par un torrent de boue liquide, tiédasse au toucher, qui les submergeaient... Partout... Ils furent dispersés comme de vulgaires morceaux de bois pris dans le courant d'une mer agitée.

C'était l'horreur il avait perdu le contact avec les autres, il était désorienté paniqué, il avait eu à peine le temps de prendre son souffle... Il tenta tant bien que mal de s'agripper à quelque chose...

Ils n'avaient pas d'hamburger sur cette planète ? Malheur ! Dakota espérait qu'ils ne se nourrissaient pas que d'haricots verts et d'endives, ou l'enfant préfèrerait tomber d'inanition que d'en avaler ! Les révélations qui suivirent crispèrent le petit blond. Les nuits étaient mortelles ici ? Mortelles… Genre géniales ou le sens un peu moins sympa ? L'apparition leur annonça qu'elle les emmènerait partout où ils le voulaient à dos de dragon ! Trop cool ! Dakota venait de passer à la crainte à la joie en une seconde. Puis ce fut la déception qui suivit.

Le fantôme venait de disparaitre tout de suite après sa promesse. L'enfant fit une moue désolée lorsqu'il entendit parler dans sa tête encore. La Collectionneuse leur raconta comment elle les avait trouvé. Mais à peine avait-elle commencé qu'elle annonça rapidement qu'ils devaient boire la tisane et disparut aussitôt. " J'aime pas la tisane…" marmonna le petit mutant. C'était que de l'eau chaude avec des plantes trempées. C'était pas bon !

La lumière vive fit plisser les yeux du gamin qui plaça rapidement son bras pour se protéger autant que possible de l'intensité, histoire que ses yeux s'habituent un peu. Dakota sentit le souffle surprenant et remarqua les volutes de fumées qui approchaient. Eden venait de l'agripper au bras. " Aïe, tu sers fort !" commença-t-il à protester avant de soudainement sentir la boue lui arriver dessus.

C'était comme plonger dans l'eau sans s'y attendre. On se crispait, on fermait les yeux autant que possible, on bloquait la respiration et on attendait que ça se termine. Ca piquait les yeux ! Le môme avait été trop lent pour les fermer à temps. Expulsé à quelques pas d'Eden, Dakota se mit à couiner doucement en s'essuyant les yeux. Il venait d'avoir une belle frayeur ! L'enfant se releva et se rapprocha rapidement de la jeune femme qui venait de boire de la tisane. La Collectionneuse leur avait dit qu'ils devaient en boire. Ca semblait important. Alors contre sa propre envie, le corps encore salie de boue, Dakota tenta à son tour de boire du liquide.

Dans la tourmente, Hawkeye ne trouva rien à agriper. Dakota parvint à s'approcher de Wraith et par un mouvement favorable des étranges vagues, se coller près du récipient auquel il put boire une demi-gorgée de liquide au risque de se cogner les dents.

Les mouvements désordonnés se firent petit à petit plus calmes, ne menaçant plus leur équilibre. Le plus cruel assaillant était désormais la lumière plus qu'éblouissante du soleil. Cloués à leurs places, les X-Men durent se protéger de leurs bras pour échapper à des brûlures rétiniennes. Les viscosités semi-liquides s'estompèrent, cessant des les malmener. Wraith tenait toujours vaillamment sa casserole, protégée par les flammèches bleues. Mais il ne restait au fond qu'un tapis de feuilles humides.

Au bout d'un temps qui leur parut infini, l'impitoyable blanc du paysage s'atténua. L'éclat du soleil prit une légère teinte ambrée.

Vers l'est rampait encore une couche de brouillard noir, mais vers l'ouest le ciel était désormais bleu et clair. Partout autour, le sol était roux, nu et inégal. Ici et là persistaient des amas de neige mais se formaient aussi des flaques d'eau et même de petits ruisseaux.

L'horizon restait morne, et après le tumulte, comment savoir la direction qu'avait pointée leur interlocutrice cérébrale ?

La température avait rapidement grimpé. Elle devait avoisiner, à la louche, les 15 degrés. Les X-Men n'avaient plus de boue sur eux mais étaient mouillés comme après une averse.

Eden tenait la casserole. Il devait s'agripper pour trouver quelque chose de stable histoire de se remettre. Puis le chaos se calma pour laisser place au soleil ardent et brulant. Damian eut à peine le temps de se protéger correctement les yeux avec ses bras.

Eden avait reussi à préserver la casserole. C'était tout ce qu'il put voir avant que le soleil lui même ne se calme et prenne une teinte plus appréciable.

Un paysage surprenant s'offrait maintenant à eux trois. Une couche de brouillard noir d'un côté, un ciel bleu et clair de l'autre, un sol déser et des flaques d'eau prevenant sans doute de la neige fondue... Bordel qu'est ce que c'était que cette merde?

Et il faisait un froid de chien.... Pour combler le tout.

"Je propose que l'on se rapproche... Le contact physique est je pense la seule solution à notre problème de froid..."

Il réfléchit et tenta de vaguement se souvenir de la direction à prendre. Tout en s'approchant d'Eden et faisant signe à Dakota de venir plus près. La chaleur humaine il n'y avait rien de tel pour se réchauffer. Etre en contact avec la peau nue d'Eden l'aurait gêné d'ordinaire mais là...

"Je pense que l'on peut faire confiance à ma chance pour nous donner la bonne direction, non?... Ensuite la marche nous réchauffera..."

Damian observa le paysage et finit par pointer une direction se reposant sur son pouvoir...

"Et si on allait par là?..."

La protestation de Dakota lui passa malheureusement au-dessus de la tête. La violence avec laquelle ils s'étaient fait ballotés ne lui avait même pas permis de retenir convenablement ses camarades. Agrippée à la casserole comme si sa vie en dépendait, Eden avait l'air complètement larguée quand finalement tout se calma. Recroquevillée, la tête rentrée dans les épaules, elle fuyait la luminosité les yeux clos en se demandant si ils auraient à un moment ou à un autre la possibilité de regarder à nouveau ce qui les entouraient, ne serait-ce que pour trouver un abris. Les paupières papillonnantes, elle entrevu le fond de la casserole, vidée de l'essentiel du contenu, et se trouva passablement idiote. A quoi ça avait servi au juste? Elle n'en savait rien. Dakota en avait eu au moins, c'était déjà ça. Dans la tourmente, elle n'était même pas sûre que Damian avait pu en prendre. Ses mains effleurèrent ces flammèches bizarres qui ne brûlaient étrangement pas.

Peu à peu, mais avec une lenteur passablement embarrassante, la lumière semblait moins agressive et elle se risqua à regarder autour d'elle, les yeux toujours plissés. De nouvelles couleurs se propageaient dans toutes les direction, sans offrir le moindre point de repère valable. Comment savoir maintenant où aller, hein? Trempée jusqu'aux os (décidément ça allait devenir une habitude), elle constata que le froid était devenu plus supportable, même si aucun d'entre eux n'était clairement vêtu pour y faire face. Les doigts crispés sur la casserole à s'en faire blanchir les phalanges, Eden tâcha tant bien que mal de réfléchir. Quand ils parlaient à la créature, où se trouvait l'aube? Le soleil plus ambré et le chaos qu'il provoquait sur son passage pouvait encore leur servir de repère pour restituer leur échange nocturne, et avec lui la direction indiquée par l'elfe fantomatique. Relâchant finalement d'une main la casserole, elle se protégea les yeux et leva son regard vers le ciel. Peut-être qu'en s'élevant assez haut, elle aurait un meilleur point de vue? Mais étant donné les distances, elle doutait de pouvoir apercevoir quoi que ce soit d'utile.

Ce fut la remarque sur le froid et les méthodes de réchauffement de Damian qui la rappela à l'inconfort de la situation. L'air perplexe, elle douta un instant d'avoir sérieusement saisi où il voulait en venir. Il fallait encore se coller les uns aux autres? C'était déjà assez gênant comme ça. Le réveille l'avait assez perturbée. Pourtant, elle avait froid, c'était un fait. Mais elle se montra quelque peu crispée au moindre contact. Elle ne relâcha pas la casserole. Savait-on jamais, peut-être que ça pourrait servir. Elle releva les yeux vers l'horizon, cherchant à savoir si en tenant compte du lieu de l'aube et du placement du soleil, l'indication hasardeuse de Damian correspondait plus ou moins avec celle donnée par leur interlocutrice.

"Alors ne traînons pas."

Si la marche suffisait à les réchauffer, c'était toujours ça de gagné. Rester dans ce désert étrange ne lui plaisait pas. Elle se sentait bien trop exposée, totalement perdue, et dans un inconnu qui la stressait. Trouver un signe de civilisation ne serait pas de refus, et le plus tôt serait le mieux.

Berk ! La tisane c'était vraiment dégueu ! Dakota fit la moue une fois le liquide ingurgité. La fantôme avait dit que c'était important alors il valait mieux l'écouter dans le doute. Le gamin blond avait soudainement l'impression d'avoir passé la nuit sur l'ordi et d'ouvrir les volets le matin quoi. L'éclatage d'yeux total. Putain, il était où le bouton pour diminuer la lumière ? Le môme baissa le regard en faisant une visière avec ses doigts et resta près d'Eden. "Vas-y putain, fais chier, je veux rentrer à la maison… Si je nourris pas mon dragon il va crever quoi…" grogna le gamin qui en avait marre d'être malmené de minutes en minutes.

Ca serait quoi la prochaine étape ? Se faire bouffer par un ver géant qui sortirait du sol ? Se faire canarder de crottes de dragon ou être bombardé par des vaches ? Les aventures, c'était mieux dans les jeux vidéo d'abord. On arrêtait quand on voulait, on pouvait reprendre la sauvegarde, on pouvait tricher, et puis ça faisait beaucoup moins peur ! En plus il continuait à se geler les miches à moitié à poil. Encore y'aurait la mer pour faire trempette, mais là c'était cette saloperie de boue bizarre qui se barrait qui faisait office de flotte. La loose sur toute la ligne quoi.

Le soleil changeait de couleur maintenant et il y avait de la vraie eau qui se formait. " Ca va être la forêt luxuriante dans deux minutes ou quoi ? C'quoi ce bordel là… " commença à s'énerver le gosse. La boue avait disparu mais il se sentait toujours aussi humide maintenant. Dakota jeta un oeil rapide à la poitrine d'Eden et à son pantalon afin d'observer discrètement les vêtements collés à la peau épousant parfaitement ses formes. Il n'y avait malheureusement rien d'intéressant. C'était pas moulant. Pff… Même pas un petit remontant dans ce monde de brute !

Damian proposait qu'ils se collent les uns aux autres. Pervers ! Dakota voyait bien le petit jeu d'Hawkeye. Se coller, se coller. Ouai. Et après peloter et faire un massage aussi ? " Je suis pas un garçon facile, je me colle pas à n'importe qui moua ! " affirma-t-il en se rapprochant d'Eden. Elle, c'était pas n'importe qui d'abord. Surtout qu'il proposait de le suivre grâce à sa chance. La bonne idée ! Si y'avait un piège, il irait dedans le premier. " Vas y Damian, passe devant, on te suit ! " Dakota quant à lui garda une distance faible avec Eden et alla même jusqu'à lui prendre la main. " C'pour pas s'perdre, c'tout hein. T'fais pas d'idées… " Et un peu parce qu'il avait peur ? Non, non. Qui aurait peur à onze ans trois quarts dans une monde totalement inconnu où il se passait des trucs potentiellement mortels ?

Hawkeye fut immédiatement titillé par la direction qui lui paraissait, sans doute possible, la bonne. Pendant ce temps Wraith faisait ses estimations et tomba à peu près d'accord avec son acolyte.

Quant à Eko, il put mesurer l'aspect prémonitoire de ses paroles : une couche d'herbages rabougris donnait au sol une progressive couleur vert olive, tout autour d'eux et à perte de vue. On pouvait pratiquement voir à l’œil nu cette végétation pousser. Les collines au loin se couvraient d'un tapis similaire.

Les mutants se mirent en marche, mains dans la main pour Eden et Dakota, sur ce tapis d'herbes fines qui devint rapidement une pelouse fournie. Des plantes poussaient ici et là, plus vite les unes que les autres. Ce n'était d'abord que des feuillages verdoyants, puis des fines fleurs longilignes et blanches, puis des tiges plus épaisses, comme celles de tournesols, se développèrent et déployèrent des feuilles.

La température devenait de plus en plus chaude, atteignant bientôt un très confortable 25 degrés.

A chaque minute la masse végétale poussait d'environ dix centimètres. Les X-Men gardaient le cap grâce à Damian tandis que le soleil irradiait de sa lumière orangée. De grosses fleurs roses semblables à des lotus poussèrent au bout des tiges épaisses et se tournèrent vers le soleil.

Ces grandes plantes arrivèrent à la taille des jeunes gens et commençaient à vraiment gêner leur progression. Les feuilles étaient larges et plates.

Tout à coup, comme par "hasard", Hawkeye déboucha sur une sorte de plaque d’égout, plus épaisse et solide, juste devant lui. La végétation poussait autour mais heureusement, les X-Men étaient passé assez près pour remarquer sa présence. Il s'agissait d'une plaque ronde, visiblement lourde mais sans mécanisme apparent. On pouvait y lire, gravée grossièrement en lettres latines attachées :

Cabane des Touldeu

Hawkeye ne put pas le dire ou l'affirmer de quelque façon que ce soit mais il sentait la bonne direction par là... Eden lui confirma sa sensation sans trop de problème. Un bon point ses pouvoirs à lui aussi fonctionnait, il influait toujours sur les probabilités.

Fait surprenant la végétation poussait à vue d'oeil, comme s'ils étaient sur un monde ou la journée et le temps passaient plus vite que sur terre... Verrait il à nouveau Mia un jour? Etait elle quelque part sur ce monde elle aussi? Il sentait une boule se former dans sa poitrine. Mais il se reprit avec le relatif froid ambiant pour ne pas paraitre touché ou faible devant les autres et surtout devant Dakota qui avait sans doute besoin de repères.

Eden et Dakota, main dans la main lui emboitèrent le pas. Ils marchaient sur un tapis d'herbes fines qui devint rapidement une pelouse fournie. Des plantes apparaissaient la vie reprenait ses droits sur ce territoire.

La température devenait de plus en plus chaude, atteignant bientôt un très confortable 25 degrés. Il se sentait mieux, et rapidement étouffé par cette subite chaleur. Le passage de la premiere température à la seconde avait donné à son corps qu'un faible temps pour s'habituer au changement de température, un peu extrème à son goût.

Les végétaux poussaient démesurement. Damian sentait toujours la bonne direction activée dans sa tête. Mieux qu'un GPS, il ne savait pas le dire mais il savait où aller.

Tout à coup, le hasard faisant bien les choses, il trouva une sorte de plaque d’égout, plus épaisse et solide, juste devant lui, devant eux.. La végétation poussait autour, il s'agissait d'une plaque ronde, à l'air lourde. Une inscription... Cabane des Touldeu

Damian se tourna vers ses deux compagnons d'infortune... Un paradoxe pour lui et avec leur aval tenta de déplacer la plaque en question, si ce geste nécessitait une aide il le ferait savoir à ses accolytes.

La plaque se révéla beaucoup plus lourde qu'une simple plaque d’égout... ou bien elle se trouvait, d'une façon ou d'une autre, bloquée ou barrée de l'intérieur. Malgré sa force Hawkeye s'échina sans succès, d'autant que les bords apportaient peu de prise.

Les plaintes de Dakota lui filèrent un sacré coup de blues. Pas spécialement en raison de la mort prématurée d'un dragon virtuel, mais plutôt par la perspective qu'elle n'était pas prête de "rentrer à la maison". Dire qu'elle avait voulu s'éloigner de chez elle... Pourtant, le fait était que sur Terre, rien ne l'empêchait de changer d'avis, de revenir sur ses pas, quitte à le faire la queue entre les jambes en chouinant et se laissant humilier par son père. Elle n'aurait même plus cette possibilité là. Comment elle allait faire si elle n'avait plus la bonne humeur d'Adrian au bout du fil à chaque fois qu'elle avait un début de vague à l'âme? Et Sam? Qu'est-ce qu'ils allaient avoir comme nouvelles d'eux? Danger avait-elle tout fait sauter? Etaient-ils tous laissés pour morts? Si oui, comment son père allait-il justifier le décès de sa fille dans un lieu truffés de mutants alors qu'elle était juste censée poursuivre ses études hors de L.A.? A ce rythme, Eden allait se faire péter une migraine de tous les diables.

La main de Dakota dans la sienne l'arracha à son délire silencieux. Surprise d'abord, elle baissa les yeux sur son camarade qui balança la première justification bidon entendue depuis son réveil sur cette planète. C'était pour pas se perdre, soi-disant. Bien sûr que non, il était effrayé. Qui ne le serait pas dans des circonstances pareilles? Elle-même était franchement terrorisée à la simple idée de se retrouver dans un monde totalement inconnu, sans aucun réel repère valable, sans la moindre idée de ce qui s'était passé entre l'attaque de leur bâtiment et leur arrivée ici, sans même savoir où étaient les autres. Parce qu'ils ne pouvaient décemment pas être les seuls survivants, hein? Hein... Ses doigts se resserrèrent en douceur sur la main de Dakota.

"Pour ne pas se perdre, ça me va."

Elle ne prononça plus le moindre mot tandis qu'ils marchaient. Concentrée sur le simple fait de ne pas trop penser, d'éviter de s'inquiéter plus que de raison, ce n'est que lorsque le paysage changea, quand elle senti non plus le sol fade mais l'herbe sous ses pieds qu'elle releva plus franchement les yeux vers l'horizon. Perplexe, elle baissa un regard interrogateur sur Dakota. Il avait un don de voyance ou quoi? La température devenait bien plus agréable aussi, ce qui n'était pas pour déplaire à Eden. Elle ne relâcha pas pour autant la main de Dakota. Si ça continuait, ils risqueraient bien d'avoir des raisons de se perdre. quand les plantes leur arrivèrent à la taille, la californienne commença sérieusement à s'inquiéter. Jusqu'où ça allait pousser au juste? Les fleurs colorées cherchaient leur soleil, étalant leur beauté irréelle. Sa main libre toujours armée de la casserole, Eden tâcha d'écarter la végétation pour faciliter la progression, sans grande conviction. Décidément, elle se sentait totalement ridicule avec sa machette de fortune.

Et le miracle fut. Damian tomba par coup de chance sur une plaque. Ce qui étonna le plus Eden, c'était surtout le fait qu'ils puissent la lire! Comment justifier un alphabet semblable à celui de leur monde sur une tout autre planète? Il y avait des humains ici? Enfin des choses plus proches d'eux qu'une elfe fantomatique?

Déjà Damian essayait de la soulever, sans succès. Si elle s'y mettait aussi, avec le soutient de sa télékinésie, y arriveraient-ils? Eden fixa la plaque quelques secondes... Et renonça à utiliser ses pouvoirs.

"Ça va peut-être vous paraître idiot, mais... Si on arrive à forcer cette plaque, et qu'il y a des gens sous-terre, ils risquent de nous considérer comme des agresseurs. On ferait pas mieux de toquer, pour commencer? Si vous voulez, je m'y colle et vous restez à distance, si ça tourne mal, autant que les "Touldeu" croient que je suis seule."

Autant qu'un seul prenne des risques. Damian avait déjà tenté, et il était hors de question de laisser Dakota le faire. Et puis elle avait une casserole pour se défendre. Sans compter qu'elle avait de quoi se donner une opportunité de fuite avec ses pouvoirs. Enfin à supposer que les gens dessous n'aient rien de pire.
Elle se rapprocha donc à son tour et s'accroupi à côté de la plaque, prête à juste toquer, mais attendant avant que les deux autres fassent un choix.

Dakota observa avec surprise la végétation qui poussait comme il l'avait annoncé juste avant. Il ne loupa pas le regard d'Eden qui devait se demander comment il savait ça. La chance bien sûr. Ou un peu trop de séries à la télé ? " Je t'apprendrai un jour. " commenta-t-il comme si c'était un art qu'il maîtrisait à merveille. Le sol devenait agréable au toucher en plus. Vu qu'ils étaient pieds nus, c'était tant mieux !

Avec tout ce qui poussait, c'était un coup à tomber nez à nez avec une plante carnivore géante. Mais dans le doute, Dakota s'abstint de faire toute remarque. Des fois que ce qu'il raconte se réalise à chaque fois. On n'était jamais trop prudent. En plus, il avait bien fait de prendre la main d'Eden pour la rassurer et qu'elle ne se perde pas.

Avec les herbes qui grandissaient à vue d'oeil, le gamin se retrouvait presque submergé. Le temps devenait plus clément. Enfin la température. Le blond était moins crispé en marchant. Fallait que la température se maintienne. Si ça continuait à monter aussi vite, ils allaient cramer, c'était sûr ! Et ils avaient même pas de crème. Rapidement, Dakota se retrouva à devoir rester derrière Eden qui lui libérait le passage à cause de grosses fleurs dont les feuilles lui fouettaient le visage. Bon, ça allait qu'elle ait de jolies épaules et un beau dos à observer. Ca aurait été les fesses de MBarou, l'escapade aurait été encore moins sympa. Quoiqu'elle les aurait fait s'envoler.

La recherche les mena à une plaque d'égout joliment gravée d'un nom, ou quelque chose du genre. Touldeu. "Nous on est toultrois paumés sur une planète à la con…" maugréa le gamin. Damian essayait de jouer les gros bras pour l'ouvrir. Il voulait jouer le beau gosse ? " Et soudain, un flot de caca les éclaboussa…" se marra Dakota en imaginant la scène. Enfin tant que c'était que Damian, ça allait. Le môme avait déjà donné de ce côté là. Tout ça à cause de face de citron !

Mais le "mâle" était incapable de la lever. La plaque. Pas Eden. Autant faire "toc toc" pour vérifier si y'avait quelqu'un. Eden lui vola directement l'idée dans la tête et proposa d'en faire autant. Dakota fit une moue boudeuse l'espace d'une seconde. C'était lui le cerveau, d'abord. Puis il alla se cacher dans les herbes avec Damian. " T'imagines, c'est une araignée géante qui va soulever la trappe ? " Le gamin bloqua une seconde. C'était pas si impossible après tout… Ce con allait se faire peur tout seul…

Après avoir devisé, les mutants se séparèrent. Dakota et Damian allèrent se cacher à quelques mètres dans la végétation croissante. Les grosses fleurs roses avaient chacune atteint la taille d'une tête humaine. Au cœur de la fleur se trouvaient des graines roses qui semblaient juteuses.

Eden toqua à la plaque. Il se passa plusieurs secondes sans que rien ne se passe. Elle sentit enfin du mouvement, entendit un lourd cliquetis métallique plus loin sous terre, puis un second, sous la plaque elle-même.

L'épaisse capsule s'ouvrit, poussée par une main costaude et un bras nu, solide. Puis s'extraya la figure humaine d'une femme aux traits et à la stature épais, plutôt grande, la figure rougeaude, mais la peau étrangement tigrée de brun sur tout le visage. Elle portait un fichu jaune sur la tête, dissimulant sa chevelure. Des grands yeux noirs clignèrent le temps de s'habituer à la luminosité, puis se portèrent sur la visiteuse. La femme ouvrit la bouche et parla... anglais ! mais avec un accent et des tournures totalement inédits pour Eden.

"Ventre du dieu... Bon le bienjour ma petite demaselle. Mais qui vous envoie ? De l'aide pour le travail ne sera pas en rebut mais qu'on déjeune seulement ! Et c'est quoi ce chandail, a-t-on jamais vu cette mise ! Vous êtes pas bien ?"

Elle grimpa les derniers échelons pour arriver à la surface du sol. Elle portait une robe de toile et un tablier. Sans même laisser à Eden le loisir d'en placer une, la femme très costaude s'écria en direction du puit.

"Tabouray Touldeu on a là une gentille ânesse qui se promène sans chandail ni housaies et blanche comme une lente !"

Cette dernière réplique fut aisément entendue par les deux garçons.