01.01/29.L.Old School - Good morning, Chicago!

Les yeux ensommeillés, la tête dans le cul, les cheveux en bataille, c’était à peine éveillée que Lucy se présentait aujourd’hui. Un foutu décalage horaire, entre Chicago et Perth, qu’elle avait du se taper la veille avant de débarquer dans cet hôtel miteux de la ville. Sitôt arrivée, une chambre commune avec des autres nanas lui avait été confiée, et elle s’était effondrée sur son pieu, sans même prendre le temps de défaire ses bagages. Elle avait juste pris la peine de virer ses vêtements de voyage, inconfortables après tant de temps de vol, pour revêtir un t-shirt cinq fois trop grand qui appartenait à son frérot, resté en Australie. T-shirt qu’elle arborait toujours, en guise de robe de nuit, et qui lui arrivait à peine à mi-cuisse. Elle n’avait pas vraiment l’habitude de vivre avec des inconnus, et n’avait de grand matin pas pensé à changer ses habitudes matinales.

Encore engluée dans son sommeil, elle avait végété pendant une bonne demi-heure à la recherche de quoi grailler pour son petit déjeuner. Faire une visite toute seule d’un hôtel à moitié abandonné alors qu’on est encore dans le coltard ne s’était pas avéré être une chose très efficace, et elle s’était plus d’une fois paumée au détour d’un couloir, sans jamais croiser personne.

Elle avait fini par trouver la cuisine, un truc immense avec des tas d’instruments dont elle n’avait jamais vu la moitié, et dont elle ne savait se servir que du tiers, et de la bouffe en suffisance pour régaler son estomac gargouillant. S’étant généreusement servie sur un plateau propre trouvé là, elle s’était rendue dans la salle à manger, qu’elle avait traversée juste avant, et s’était installée sur une chaise en bout de table pour commencer à manger.

Un café dans un grand mug, pour bien se réveiller, et une demi douzaine de toasts beurrés et recouverts de marmelade de framboise, pour la douceur. Mais bon, là, pour le moment, c’était toujours l’état catatonique qui prenait le dessus, et la seule chose qui la tenait éveillée était le ‘plic plic’ régulier des gouttes de cafés qui dégoulinaient de son toast pour retomber dans son mug, alors que son regard perdu dans le vide scrutait sans s’en apercevoir une légère fissure dans le plafond, à l’opposé de la pièce.

Face à sa valise presque terminée, Luz s'était retrouvée devant un dilemme cornélien. C'était elle qui avait récupéré le dernier chargement d'herbe qu'elle partageait avec ses deux amies, mais ça se passait avant qu'on lui propose innocemment de changer de vie à des milliers de kilomètres de là. Dans un pays où la législation sur les substances illicites était autrement plus rigoureuse, en particulier pour les mineurs comme elle.

Elle ne savait si elle devait prendre le petit sac comme souvenir des après-midi ensoleillés passés à se bousiller le cerveau en faisant tourner des joints de taille déraisonnable, ou si au contraire, elle devait le rendre symboliquement à ses amies. L'hypothèse de se faire arrêter par la douane et de se retrouver en garde à vue avant même de partir l'avait faite pencher vers la seconde solution, et elle avait couru jusqu'à chez Angelica pour lui remettre à contrecoeur le précieux sésame, vaguement anxieuse à l'idée de ne pas savoir comment s'en procurer une fois sur place. Certes, Lily-Rose avait parlé de "tous frais payés", mais elle doutait que ces frais-là soient inclus. Un pressentiment.

Cette angoisse avait depuis été remplacée par la fatigue du voyage, et elle s'était endormie sitôt allongée, sans même prendre la peine d'être terrifiée par la laideur du papier-peint, et de l'hôtel en particulier. Pas de problèmes d'argent, mais pas de dépenses inutiles non plus. Mais elle se sentait presque plus à l'aise dans les lieux ringards, et était à moitié excitée de rencontrer ses camarades, ceux au milieu desquels avoir deux tentacules sur la tête n'était pas si étrange.

Elle s'était habillée simplement et rapidement au réveil - un pantalon large bleu ciel, un poncho léger un peu plus sombre, et des tongs au couleur de la Jamaïque qu'elle avait piquées dans un brocante à un vendeur qui jetait ses mégots par terre. Un réflexe certainement lié à son cerveau reptilien guida ses pas encore ensommeillés jusqu'à la cuisine locale, où elle put se servir un bol de café qu'elle espérait capable de réveiller un mort. Elle attrapa également une orange, grimaçant intérieusement à l'idée du parcours qu'elle avait du faire depuis le lieu où elle avait été cueillie, et donc du nombre de litres d'essence qui avaient été nécessaires pour l'amener à bon port. Mais elle était bien trop nouvelle pour envisager l'instauration de pratiques éco-responsables dans ces lieux, et surtout, elle avait besoin de son jus d'orange matinal.

L'orange, c'est également la couleur qui la frappa quand elle rentra dans la salle à manger après avoir attrapé un verre et un couteau de ses deux doigts libres restants. La jeune fille qui la précédait avait une couleur de cheveux pour le moins remarquable. Elle alla poser ses affaires à côté d'elle, et s'assit en la saluant sobrement.

- Buenos dias.

A peine assise, elle but plusieurs longues gorgées de café, satisfaite de son intensité. Elle sentait presque ses neurones se connecter sous l'effet de la caféine.

Petit salon

Chicago, quelque part entre sa mère à NYC et son père à LA. Finalement, cette position médiane tombait à pic. En plus, ça la changeait de visiter une ville sans acronyme pour changer. Le voyage avec Emily avait été sans histoire. La blondinette avait pu se la péter un peu fenêtres ouvertes dans la voiture girl power de l'Asiatique. C'était plus la classe que les vieux pick-ups dans lesquels Roxie avait fait du stop. Elle avait été toute excitée à son arrivée dans l'hôtel, mais avait vite déchanté en s'apercevant qu'elle était la première arrivée. En vérité, elle s'était passablement ennuyée une fois son baluchon de fugueuse défait, ce qui avait dû lui prendre 5 minutes à tout casser. Le reste de la journée d'hier avait été passée à zoner dans l'hôtel. Les profs avaient l'air très occupés, car la blonde n'avait rencontré qu'Emily.

L'ado avait tout de même prit la peine d'appeler son père pour lui dire de ne pas s'inquiéter. Ca avait été difficile d'éviter de lui révéler sa position exacte, mais elle n'avait aucune envie de voir débarquer la mère Nichols pour la ramener manu militari en pension. Quant à sa mère, Roxie laissait son père s'en charger. Mieux valait faire la morte un moment, le temps que la colère - car elle n'en doutait pas, elle devait être furibarde - retombe. Autant profiter de sa liberté au maximum.

Roxie avait entendu du bruit pendant la nuit. A son réveil, plusieurs nenettes avaient élu domicile dans sa piaule, ce dont la jeune fille était loin de se plaindre. Enfin un peu d'animation ! Excitée comme une puce à l'idée d'enfin retrouver de façon quotidienne des jeunes de son âge, la blonde s'était levée tôt et avait profité de la salle de bain tranquillement. Les yeux soulignés d'un trait de crayon noir, un débardeur noir, une cravate tirée de son uniforme de pension à moitié nouée autour du coup et un baggy coupé à mi-mollets, elle était allée manger ses céréales au chocolat devant les dessins animés dans le petit salon, qui était aussi craignos que le reste de l'hôtel, mais tout de même équipé d'une téloche. Néanmoins, l'environnement général lui plaisait assez : ça la changeait de l'institution coinços pour jeunes oies blanches dans laquelle sa mère l'avait expédiée. Le style grungy lui convenait mieux, au moins, au naturel, elle ne jurait pas avec la déco. C'était d'ailleurs assez exaltant de se dire que les jeunes qui la rejoindraient seraient également à leur place ici.

Entendant du bruit de vaisselle dans la salle à manger, Roxie éteignit la télé au beau milieu d'un épisode de Skyrocket. Pas grave, elle l'avait déjà vu, celui-là. Par contre, il y avait de la nouveauté à la salle à manger, du jamais vu. Son bol comptant encore quelques grains de riz soufflé dans la pogne, elle entra dans la salle à damer. Deux nenettes étaient installées. Une rouquine et une... verte. Surprise, elle ne put s'empêcher de cligner bêtement des yeux, puis se donna une petite gifle pour se remettre les idées en place. C'était stupide. Elle s'était préparée à voir débarquer des gamins doués de pouvoirs, mais ne s'était pas imaginée tout ce que cela pouvait impliquer. Elle subissait pourtant elle aussi des effets secondaires lorsqu'elle utilisait son pouvoir, mais rien de comparable à "l'effet primaire" que vivait cette fille au quotidien. Cela lui faisait bizarre de voir quelqu'un d'autre porter une trace physique de sa mutation. Le physique sans histoire d'Emily l'avait peut-être confortée dans cette omission.

Cela dit, quand on avait vu des gros types hirsutes se gerber dessus à tour de rôle dans un pogo, la vision de cette fille verte à trompes était-elle si terrible ? A bien la regarder, elle avait même plutôt un visage doux.

"Waouh, salut les meufs !" s'exclama-t-elle pour camoufler sa surprise. "C'est cool de plus être toute seule, je commençais à me faire chier sévère !" ajouta-t-elle pour retomber sur ses pattes.

Elle retourna une chaise en face des deux inconnues, s'installa à califourchon dessus et posa le menton sur le haut du dossier pour observer ses deux camarades. La rouquine était plutôt mignonne dans son genre.

"J'm'appelle Roxie." se présenta-t-elle en posant son bol sur la table. "J'pense que ça doit être avec vous que je partage ma piaule, vous êtes les premières que je croise, enfin à part les deux petites macchabées qui se tenaient la main dans le couloir over-kitsch." plaisanta-t-elle avec son accent urbain.

Le style décoratif lui rappelait un vieux film d'horreur qu'elle avait regardé avec son père. Pas très flippant, mais l'ambiance était glauque à souhait. Néanmoins, il ne lui vint même pas à l'idée que ses interlocutrices pourraient ne pas saisir la référence.

Elle n'avait jamais dû voyager seule pour le moment et Janet n'avait pas osé dire à Lily-Rose que a lui posait des problèmes. Au final, elle n'utilisa pas beaucoup de l'argent qui lui avait été confié vu qu'elle avait souvent voyagé sous forme d'un petit chat sous un siège de train ou de bus. C'est fou comme un chat peut paraître attendrissant et attirer la gentillesse d'un passager qui ne veut pas le dénoncer. Il n'y avait qu'à supporter quelques caresses, à ronronner un peu et le tour était joué. Au final elle s'était toutefois mal débrouillée, arrivant dans la nuit seulement au fameux hôtel. Dans l'obscurité, le quartier ne paraissait pas mort, loin de là. Vaguement en phase terminale plutôt. Sous respiration artificielle pour résumer. Elle avait espéré un mieux pour l'intérieur du bâtiment.

Heureusement qu'il faisait noir ou Janet aurait immédiatement pris ses pattes à son coup pour tenter de jouer les filles de l'air au premier aéroport venu!

Ruminant sa descente aux enfers, elle chercha une chambre et s'y coucha, abrutie par une alchimie complexe de décalage horaire, de voyages et de hot-dog au gout de pigeon avarié. Au réveil, le premier geste de miss Jameson, membre d'élite de la haute société, est d'aller à la fenêtre pour admirer la vue magnifique de la mer méditerranée. En écartant les rideaux spartiates, la réalité la percuta avec la tendresse d'un train à grande vitesse sur un haricot rouge oublié sur la voie. Une ville qu'elle ne connaissait pas. En hiver. Un hiver qu'on ne passe pas à Aspen. Une ville qui en plus n'avait rien de commun avec tous les endroits où elle s'est jamais réveillé. Enfin si, ça y ressemblait quand même un peu. La nuit, de dos, de loin et dans le brouillard...

S'arracher à la vue morne lui fit l'impression d'avoir un visage en tissu fixé à un scratch récalcitrant. La nouvelle vue ne fut pas mieux. Des lits de couleurs dépareillés, une moquette élimée, un papier-peint à peine suffisant pour se faire les griffes... C'était vraiment les Etats Unis d'Amérique ici?

*C'est... un cauchemar...*

S'ensuivit un bruit de claquement. La joue douloureuse, Janet dut admettre que c'était une réalité à laquelle elle ne pouvait pas échapper. Dire qu'il y a une semaine, à cette heure, elle faisait des longueurs dans la piscine olympique de l'hôtel 5 étoiles égyptien. Poussant un profond soupir, elle jeta un oeil à ce qu'elle possédait qui se limitait aux habits neufs portés à son arrivée au Delaware. Même pas de sous-vêtements de rechange. S'habillant de pied en cape, en laissant toutefois sa veste polaire sur le lit pour marquer son territoire, miss Jameson entreprit de fouiner dans l'hôtel.

Il paraissait qu'il y avait au moins deux autres professeurs dans cette "école" qui tenait plus du squat organisé. Et sûrement aussi des élèves vu qu'elle avait noté les traces de passages dans la salle de bain. Empruntant avec force hauts le coeur la brosse à dent d'un inconnu, elle sacrifia au rituel matinal. A présent que la femme des cavernes avait salué le soleil, avait fait ses ablutions à la source et constaté l'absence de prédateurs à proximité immédiate, elle devait partir en chasse.

Prenant la forme d'un chat américain connu, le Maine Coon, Janet se laissa guider par son odorat pour trouver la salle à manger. Délaissant la salle bruyante, elle gambada dans la cuisine. Horreur, malheur et stupéfaction! Il n'y avait pas de cuisiner! Pas de domestiques! Mais mais... alors... elle devrait se préparer à manger? Elle-même? D'un autre côté, elle sentait de la nourriture dans la pièce d'à côté et se risqua dans la salle à manger. Si elle avait été une des créatures de Tex Avery sa mâchoire aurait déjà atteint la cave, voir même entamé la croûte continentale. Des... portes? Sur des trétaux? C'est une école ça?

Se secouant un peu, Janet sauta souplement sur un siège libre pour voir un peu mieux qui était là. Les filles virent alors un gros chat qui devait avoir une base blanche avec beaucoup de mèches grises recouvrant son pelage, laissant immaculé une collerette digne d'un lion et le long de son ventre. Les poils très longs dépassaient même par touffes de ses oreilles et un toupet noir pointait au bout de chaque oreille.



Le regard presque intelligent du chat les passa en revue. Une fille rousse hésitant encore entre le statut de réveil et de coma profond. Une... chose... lui rappelant de façon désagréable son expérience dans le Delaware. Et pour finir une pure rebelle qui semblait avoir plus sa place dans une maison de détention que dans une école. A la mention des deux cadavres, Janet se sentit mal, revoyant de façon bien trop nette les deux corps sans vie des pauvres victimes des pères fondateurs. Une nouvelle venue vint aussi, qui sembla vouloir les saluer dans un langage aussi proche de l'anglais que la tronçonneuse l'est du couteau à pain. Enfin, cette dernière semblait vouloir faire des efforts vestimentaires. La situation n'était pas tout à fait désespérée.

Elle lâcha un long miaulement plaintif et posa sa tête sur la table. Ce que ce serait long jusqu'au moment où elle pourrait botter les fesses de ces papounets fondateurs... Cette demi-heure depuis son réveil avait déjà été l'un des moments les plus longs de son existence.

Un peu partout dans l'école puis cuisine

Cela faisait une semaine depuis que les frères Conowell avaient fait leur rencontre peu commune avec celui qui les avait conduits à cet endroit: Corentyn, ou Becassyn Mhalefik... Il n'arrivait pas à retenir son prénom.... Il faut dire que leur rencontre n'avait pas été des plus cordiales: Gabriel l'ayant prit pour un maque pédophile, et le professeur lui ayant fait comprendre le contraire de manière plutôt violente...

La nuit avait été dure, le jeune homme avait beaucoup de difficultés à s'accommoder de cette situation qu'il considérait comme précaire. Qu'est ce qui lui avait prit? Quitter son appart génial, pour une espèce de pension miteuse qu'il partageait avec des inconnus et... son frère... Voila bien une cohabitation qui promettait d'être explosive. En réalité depuis une semaine, ce qui occupait le plus ses pensées était d'avoir été mis devant le fait accompli: il était mutant... Voila bien une idée à laquelle il n'avait pas voulu s'accrocher. Ne pas être normal attirait l'attention, mais pas de la manière dont il le voulait. D'ailleurs, il avait rejoint cette troupe de cirque et dans cet hôtel, ils allaient préparer leurs numéros pour élever leur chapiteau dans les plus grandes villes du monde. Voici donc l'avenir auquel il s'était destiné. Alors qu'à cette même soirée, son père s'occupait de son futur de manière bien plus efficace...

Après les révélations de Walentyn sur le coup monté/tentative de meurtre, Gabriel avait demandé des explications au principal concerné: Mr Schmidt... Le scandale qui avait suivi avait quelque peu perturbé la soirée, tout comme l'affaire le concernant. Que lui restait il donc comme alternative? Cette école proposée par le mystérieux Szatanik... Après un peu de réflexion et concertation avec son frère, Gabriel finit par accepter. La perspective qu'on tente à nouveau de le tuer aidant, il n'eut pas tellement de mal à persuader les parents que l'école privée que leur proposait Walentyn était bien plus prometteuse que la simple fac de Wellington. Et de fil en aiguille, il se retrouvait à déambuler dans les couloirs, d'une humeur peu-mieux-faire...

Après un petit tour solitaire du propriétaire, la faim l'avait finalement conduit vers la cuisine. Celle ci avait au moins le mérite d'être plus grande que celle de chez ses parents, même si niveau déco, il n'y avait pas de quoi être fier... Une jeune fille rousse en sortait par une autre porte alors qu'il entrait. Sans chercher à la rattraper outre mesure, il se mit donc en quête de victuailles comestibles. Pas de croissants en vue, ni de toasts grillés accompagnés de marmelade d'orange sanguine. Tant pis, avec l'argent que lui donnait sa mère, il réfléchira à aller prendre ses repas ailleurs, à l'avenir. La faim avait baissé d'un cran, au vu de la cuisine un peu glauque il avait surtout envie de quitter la pièce. Il prit donc un verre de jus d'orange bon marché et un bout de pain nature pour se diriger vers la porte que la fille avait emprunté précédemment.

Pas très réveillé, mais bien habillé et coiffé comme il se devait, le jeune homme pénétra à son tour dans la salle à manger où il ne vit pas une fille mais bien trois!! Heu... et une lézarde... C'était la première fois qu'il voyait ce qu'il qualifiait à la base de mutant. Pour lui, étaient mutants ceux sur qui cela se voyait, l'ensemble faisait connaissance de leurs blancs d'œil respectifs autour d'une table moisie. un peu tro pde filles à so ngoût, mais elles étaient plsu facilement imrpessionables...

"La vache!" Dit-il avec un petit sourire narquois. Mais sans en dire plus, il se dirigea vers la table assaillie alors qu'une blonde électrique s'évertuait à briser le silence des matins difficiles.

"Heu! Bonjour!" Ajouta-t-il avant de manquer d'écraser un chat en s'asseyant dessus. "Tiens, ca change des clébards..." Il agrippa une chaise pour s'assoir. Il fixa Luz un moment, mordant dans son bout de pain, avant de regarder celui-ci d'un air insatisfait. Puis tout de même soucieux de faire connaissance avec ceux qui partageraient un bout de sa vie -quel privilège ils avaient-, il enchaina à l'attention de toutes:

"Vous êtes ici depuis longtemps?"

À la fissure du plafond se substitua rapidement deux bosses vertes étranges accrochées à la tête de ce qui ressemblait à une humanoïde bipède à la peau de la même couleur que ses protubérances étranges. Lucy mit quelques secondes avant de réagir, et ce fut un ‘Ploc’ plus grand, signe que la marmelade avait fini par se planter aussi dans son café, qui éveilla chez elle un brin de lucidité. Et ses yeux à moitié clos s’ouvrirent grand face à l’apparition qui venait de la saluer dans une langue inconnue, qui sonnait plutôt latino. Une martienne ! Telle avait été la première pensée de la rouquine devant la créature au look rasta qui s’avançait vers elle. Puis, les effluves de café parfumé à la framboise aidant, elle se rappela qu’elle faisait son premier jour dans la planque d’une école mutante secrète aux projets obscurs. Ainsi, la demoiselle qui lui faisait face n’était qu’un spécimen de mutation externe, qui passait un peu moins inaperçu que son pouvoir mentaliste. Elle fit même le lien avec le machin bizarre qu’elle avait aperçu dans un lit de sa chambrée, la veille au soir, et qu’elle avait pris pour une sorte de peluche immense. Et elle décréta donc que lui répondre était la meilleure chose à faire, histoire de pas se faire passer pour la grincheuse de service dès le premier jour. C’est donc avec une voix encore rauque de la nuit qu’elle lança :

« Hmm’lut »

Plutôt bref, mais bon, pour le moment elle ne pouvait pas faire mieux. L’alien s’assit, imperturbable, et commença à siroter son café. Lucy se dit qu’elle ferait mieux d’en faire autant, et jeta un œil à la confiture rose qui était en train de se casser la gueule dans son mug. Prise d’un soudain instinct de préservation, elle enfourna sa tartine en bouche pour en prendre une bouchée généreuse qu’elle mâchouilla mollement avant de l’engloutir, ponctuée par une gorgée de café bouillant, mais ô combien utile pour la maintenir éveillée.

Sur ces entrefaites était entrée une autre jeune fille, à l’aspect plus ou moins normal. Aucune queue, pas d’oreilles géantes, de cornes ou de trompe à la place du tarin, juste une ado banale au look rebelle. Mais à peine celle-ci fut-elle entrée dans la pièce qu’elle commença à déblatérer avec entrain des salutations et présentations rapides, accompagnée de commentaires personnels sur la déco douteuse de l’hôtel. Bah, le précédent squat de Lucy n’était pas beaucoup plus luxueux, même si son frère et Steve avaient tenté d’y apporter une touche sympa, avec les années. Ce qui comptait, c’est qu’ils aient un toit, non ? Après la déco… L’ambiance glauco-viellotte du bâtiment pouvait donner lieu à des trucs marrants, et elle se voyait déjà éveiller les autres pensionnaires, un couteau à la main et un air psychopathe collé au visage, en pleine nuit. Bon, avec des mutants potentiellement mortels, c’était dangereux, mais bon, il était encore trop tôt pour y penser. Selon les dire de la dénommée Roxie, elle était la seconde squatteuse de lit de la chambre où elle avait débarqué la veille. Bon, elle n’y couperait pas, il faudrait bien passer par les présentations. Le café lui avait donné assez d’énergie pour sourire à la nouvelle et lui répondre :

« Lucy ! »

Court, une fois de plus. Mais il ne fallait pas trop demander, encore. Surtout qu’une autre nana débarquait pour les saluer avec un accent de l’est qui lui donnait des airs de fille de mafieux soviétique, ou de descendante bourgeoise d’une lignée de tsars déchus. Elle semblait en tout cas porter beaucoup d’intérêt à son apparence… Et apparemment, elle aimait les félins : son chat venait de débarquer aussi, sautant sans gêne sur la table en geignant. Pas moyen de prendre son p’tit déj tranquille, dans cette piaule ? On aurait dit que tous les pensionnaires s’agglutinaient autour d’elle comme des mouches autour d’un sucre. C’était la marmelade qui faisait cet effet là ?

Et en plus, elles étaient toutes habillées ! Elle avait l’air bête maintenant avec son t-shirt/robe de nuit mauve et ses pieds nus. Il fallait qu’elle ait un visage humain, avant que…

Et merde. Un mec. Elle avait eu la chance de n’avoir eu jusqu’ici que la visite de demoiselles, et voilà qu’il suffisait qu’elle pense à son look pour qu’un beau gosse se pointe. Pur réflexe, elle plongea littéralement dans sa tasse de café, ce qui, à défaut de lui donner des fringues subitement, la sortit définitivement de son état léthargique. De toute manière, il y avait désormais trop de monde pour somnoler. Elle passa une main sur ses paupières, cligna quelques fois des yeux et hop, Lucy était éveillée. Enfin, plus qu’avant, en tout cas. Elle répondit avec un nouveau sourire au garçon :

« Hier soir, pour moi. »

Wah, presque une phrase complète. Y’avait pas de doute, le noir de noir, ça faisait effet. Elle prit même pitié de lui et de son pain dur, et de sa tête de Caliméro, et lui envoya un de ses toasts à la marmelade. Elle en avait de toute façon trop pour elle, et il avait l’air un peu paumé. Bon, elle ne savait déjà plus où elle avait rangé le pot, ni même si elle l’avait rangé, mais soit.

« Alors z’êtes tous des mutants hein ? Au lieu de s’présenter bêtement en récitant nos pouvoirs, si on essayait de les deviner ? Hm ? R’garde toi par exemple… »

Elle pointa du toast la bourge russe.

« Hmmm… J’suis sûre que tu parles aux bestioles. »

Ce disant, elle jeta un regard au chat qui avait failli finir en compote sous les fesses du beau gosse paumé.

Luz remarqua que, même pour une jeune femme qui selon toute vraisemblance devait être mutante, son apparence pouvait déconcerter. Elle ne s'en formalisa pas, un plongeon de confiture dans du café étant bien préférable à d'autres réactions qu'elle avait pu vivre, telles que le cri strident prolongé, l'évanouissement immédiat, ou encore le "j'attrape le premier truc qui me tombe sous la main pour m'en faire une arme au cas où". Elle ne savait pas si elle devait espérer l'apparition d'autres physiques étranges pour ne plus être seule, ou au contraire se satisfaire d'être l'étrange parmi les étranges.

Elle n'eut de toute façon pas le temps de pousser plus ses réflexions, car une tornade qui devait vivre avec une perf' de caféine pour avoir tant de pêche à une heure si matinale fit son entrée et les salua pour le moins jovialement. Luz sourit tout en replongeant dans son bol de café, et ne répondit qu'après en avoir ingurgité plusieurs autres gorgées.

- Moi c'est Luz.

Elle jugea que cette nana dynamique devait avoir le pouvoir de voir les fantômes, ce qu'elle trouvait plutôt original. Ca lui rappelait une histoire dont elle avait entendu parler sur un môme et un pédopsychiatre. Peut-être que ça venait de Cris ? Elle s'abstint néanmoins de tout commentaire tandis qu'une nouvelle fille - décidément - faisait son entrée, même si son allure laissait présager un capital sympathie nettement inférieur à la dénommée Roxie. Elle n'avait jamais accroché avec les filles qui prenaient trop de temps, selon ses critères, à soigner leur apparence. Et celle-ci n'avait pas exactement l'aspect "saut-du-lit", que la rouquine, par contre, incarnait à la perfection. Elle salua néanmoins sans reconnaître la première langue qu'elle avait utilisée, puis se retourna vers son café tandis que le premier homme faisait son entrée, manquant de s'asseoir sur un superbe chat qui avait du faire son entrée pendant qu'elle contemplait le fond de son bol, et qui devint instantanément l'être le plus intéressant de cette pièce à ses yeux. Luz jeta un regard assassin au maladroit avant de se lever et de contourner la table et de s'accroupir à deux mètres du petit animal, auquel elle tendit la main et parla de sa voix la plus douce.

- Minet ! Viens ! Allez, viens, je te veux aucun mal !

Elle rendit sa main lumineuse pour essayer d'amadouer la bête. Ce chat était comme un éclair de nature - de nature domestiquée, certes, mais de nature tout de même - au milieu de cet océan de bitume dans lequel elle devait désormais vivre.

Ouf, son trouble était passé comme une lettre à la poste. Roxie doutait que ses talents d'actrice y soient pour quelque chose. Elle avait dans l'idée que le coltard dans lequel était plongée la rousse y était pour quelque chose. La fille verte, dénommée Luz, n'avait pas bronché non plus. Histoire de délayer le tout, la blonde entreprit de boire le lait chocolaté qui restait dans son bol de céréales. Elle laissa échapper un "ahhhh" sonore, une moustache de lait nappant sa lèvre supérieure.

Pendant ce temps, une blonde en cuissardes et un mec avaient fait irruption dans la pièce. Roxie détailla des yeux la poupée russe, ou du moins slave à en juger par l'accent. Elle était nettement plus pomponnée que la plupart des filles que l'ado croisait dans la vie de tous les jours. Comparée au look baba cool de la fille verte et le pyjam de la marmotte, ça détonnait carrément. En même temps, elle avait l'air un peu plus âgée. Roxie s'empressa de se lécher les babines à son arrivée pour éviter de passer pour la clown de service dès la première minute.

Le gars quant à lui, manqua d'écraser un chat qui s'était installé sur une chaise. Roxie pouffa de rire.

"Tiens c'est marrant, je suis là depuis hier matin, mais c'est la première fois que je le vois." commenta-t-elle, répondant pour le même coup à la question du garçon. Le genre de question que se posaient les taulards sur le nombre d'années qu'il leur restait à tirer.

L'odeur de nourriture avait peut-être tiré ce matou hors de sa planque. Roxie n'avait jamais eu d'animal domestique. Ca lui plaisait plutôt qu'un chat errant traîne dans l'hôtel.

"C'est cool qu'on ait un chat ! Faudrait qu'on lui achète de la pâtée, ça les fait puer de la gueule. Et qu'on lui donne un nom, aussi. Je fais pas confiance à Emily pour lui donner un nom qui soit pas chelou." fit-elle en faisant tourner horizontalement son index à côté de sa tempe. La Hongkonaise était sympa mais un peu bizarre. Bizarre attachant, mais un peu à l'ouest quand même, un comble pour une orientale. Néanmoins, ses goûts en matière de bagnole étaient plutôt cool. Roxie rêvait d'ailleurs de pouvoir toucher au volant de son bolide, mais elle pouvait sûrement encore rêver un moment.

Les yeux ronds, Roxane observa Luz s'improviser guirlande de noël à une boule.

"D-D'ailleurs, en parlant des profs, vous avez vu quelqu'un aujourd'hui ? Depuis que je suis arrivée, j'ai vu qu'Emily." bafouilla-t-elle en fixant Luz faire son miracle. La lumière était. Non vraiment, il allait falloir qu'elle s'habitue. C'était clairement d'enfer. Tout ce qui la faisait rêver depuis son plus jeune âge. Mais c'était une chose de se gaver de SF et de fantastique, de dessins animés, de BD, de films... C'en était une autre de les voir débarquer dans le quotidien. Avant de rencontrer Emily, elle n'avait connu que son propre pouvoir, qui relevait plus du méta-humain que du surnaturel. Là, on pataugeait dans le surnaturel.

La dénommée Lucy proposa de deviner les pouvoirs. C'était une chouette idée : Roxie aurait par exemple été incapable de deviner que Luz était une lampe ambulante. Elle observa à nouveau la slave, désignée d'office par Lucy comme amie des bêtes, un job qu'elle aurait plutôt confié à Luz, à priori, en se basant sur son style zen. Mais les apparences pouvaient être trompeuses.

"Nannnn... Moi je dirais... Z'Yeux lasers, un peu comme dans le numéro 138 des Technorangers. Ca peut être utile d'avoir le regard qui tue." répondit-elle. Et c'était vrai que la matriochka avait plutôt les yeux révolvers. Pour ne pas avoir l'air de la fixer avec trop d'insistance, elle se tourna vers le garçon. Un mâle, ça ne faisait pas de mal. Pour déconner, la jeune fille avait toujours préféré la compagnie des garçons. Elle avait d'ailleurs ses côtés garçon manqué.

"Et toi..."

Elle leva les yeux au plafond deux secondes, cherchant un pouvoir qui pourrait correspondre au jeune homme. C'est alors qu'elle remarqua la fêlure au plafond.

"Waouh, vous avez vu là-haut ?!" s'écria-t-elle en pointant la zébrure inquiétante du doigt, tout en passant du coq à l'âne.

Elle reposa son regard sur Gabriel.

"Allez, je dis téléportation. Comme Mineko dans Zettai Unmei."

Le cauchemar se continuait avec son implacable logique. Ou plutôt absence de logique. Qu'est ce qu'elle faisait donc ici par tous les saints du pognon?

Au moment où elle avait cru que ce ne pouvait pas être pire, un mec arriva. Et quel mec. Bon chic bon genre, déjà bien coiffé et habillé, s'installant dans la place comme un super-prédateur au milieu d'une oasis. Il transpirait le pognon et l'assurance et, détail grave à ses yeux, il était beau. Les mecs beau sont toujours au courant qu'ils le sont et ils en jouent. Immédiatement, Janet catalogua l'inconnu dans la catégorie "à surveiller" mais il ne resta pas longtemps dans le dossier car il était parvenu, en quelques phrases, à lui hérisser le poil aussi sûrement qu'un passage sous une ligne à très haute tension.

Un Maine Coon, ça change d'un clébart? Un animal pur race dont les chatons se négocient au poids en utilisant une échelle de valeur proche du platine? Elle avait une furieuse envie de faire le gros dos et de feuler, mais elle se contenta de se redresser sur sa chaise, bien assise comme une sculpture de chat égyptien s'étant préparé pour une odyssée transsibérienne, puis, elle leva sa patte droite à hauteur de son visage, contemplant les coussinets. Sans faire le moindre bruit, un assortiment de griffes blanches qui semblaient être bien douloureuses sortit d'entre les poils.

Ce silence était agaçant. Il faudrait que ça fasse "Snikt".

Puis, le gros chat pivota sa tête et regarda attentivement le pantalon de l'inconnu avec la même attention que s'il s'agissait d'un bout de ficelle se balançant devant ses yeux. Et il sourit. Un chat normalement constitué ne peut pas sourire de joie, ça ressemble plus à un rictus de prédateur vu l'attirail de mastication qui était révélé à ce moment. Avant que le pantalon de mister belle gueule meurt et se réincarne en miracle du patchwork, la comateuse en stade terminal émergea plus ou moins (plutôt moins que plus d'ailleurs) de la gange de coton qui lui comprimait le cerveau. Un prénom émergea par-dessus le bol : Lucy.

Janet s'accorda quelques secondes pour réfléchir, plus parce que l'odeur de la tartine l'a stoppée dans son élan pantalonicide qu'autre chose. Il y avait différent accents dans cette pièce. Ils parlaient anglais mais ça crevait les yeux qu'ils débarquaient de pas mal de coins différents. Ils ont aussi subis des problèmes du même calibre que ce qui l'amenait là? Miss Jameson en doutait pour la simple raison que même miss pyjama devait avoir un début de garde-robe. Elle en était là de ses considérations et de son apitoiement sur elle-même quand la chose aux tentacules verdâtres sembla s'intéresser à elle. Elle faisait de la... lumière?

Si Janet adorait être le centre d'attention, elle se serait bien privée de ce genre-là de comportement. Car si Iguane devait être un gros consommateur de mouche, rien ne lui prouvait que la demoiselle nommée Luz n'avait pas un régime alimentaire à base de poils de chats. Elle se raidit, inquiète de la suite des évènements. Pendant ce temps, miss délinquance 2045 continuait son babil persistant. Son exclamation concernant quelque chose à voir en haut ne la décrispa pas, craignant que la mutante verte ne profite de l'occasion pour lui sauter dessus et lui faire, suprême horreur, un gropoutou. Seule information valable : il y avait une autre prof dans le bâtiment. Dans ce cas qu'elle vienne. Vite de préférence.

La belle plante (encore une consciente de l'impact qu'elle fait sur les hormones masculines) rentrée un peu plus tard s'installa à table et fut ouvertement cynique et blessante. En voila une personne comme elle les aime! Un peu femme fatale et maniant un humour aussi tendre qu'une scie émoussée sur de l'os. Le ciel s'éclaircit un peu. Mais la zone droit devant elle devenait bien trop claire.

Comprenant qu'un chat risquait de subir une attention bizarre de la part de mutants et n'ayant aucune envie de servir de cible pour prouver leurs pouvoirs, le Maine Coon bougea subitement. Avec une souplesse toute féline, il bondit sur le dossier de la chaise avant de faire un saut s'écartant de la table. Avant de toucher le sol, le chat avait laissé la place à une adolescente plutôt petite, aux cheveux bruns en désordre et aux habits polaires plus très frais. Elle tourna un visage un peu fatigué vers eux.

"Janet... et je vote pour la même chose que... heu... enfin bref à plus tard...

L'odeur de cette nourriture bas de gamme lui retournait l'estomac. Il lui fallait prendre de l'air.

Vers le toit.

Les différents profils se dessinaient dans la pièce, et le moins que l'on puisse dire, c'était qu'il y avait de toutes les origines géographiques, comme sociales. Cette fille rousse par exemple, une irlandaise sans hésitation, avait probablement été arrachée à sa vie de misère parmi ses 15 frères et sœurs. Et puis, il y avait aussi une blonde insolente, visiblement sous extasies, tombée dans la drogue et l'alcool dès son plus jeune âge, un dragon de Komodo qui voulait briller en société, une prostituée biélorusse, que la vie de débauche avait rendue terne et acariâtre, et...

"Non mais... Sérieusement, à qui est ce chat?" Demanda-t-il mi anxieux, mi énervé, en se levant de sa chaise pour s'en éloigner raisonnablement. "Non parce que s'il n'est à personne, on pourrait le jeter par la fenêtre..." Et par "on", il sous-entendait "n'importe qui sauf moi". Il faut dire qu'il n'avait jamais été autant regardé comme un bout de steak saignant, à part peut être quand il le voulait bien... Depuis l'illusion de l'attaque de Chihuahuas carnassiers que lui avait fait subir Walentyn, ces chers animaux à crocs, griffes et yeux vicieux ne lui inspiraient plus tellement confiance. Il regarda Roxane d'un air écœuré. "Et tu comptes l'appeler comment? Sakapuces?" Il pensait également à quelque chose comme "Salopridcha" mais se garda bien de le proposer, puisqu'au final, lui trouver un nom était bien la dernière de ses priorités.

La conversation allait bon train, Gabriel restait plutôt observateur dans un premier temps. Apparemment, tout le monde était arrivé à peu prêt en même temps. Le soir d'avant avait été tellement crevant que la fin du voyage devait se terminer dans le lit, sans autre forme de procès. Le jeune homme se demandait combien il restait encore de phénomènes cachés un peu partout dans l'école. Si ceux-ci s'avéraient être trop ennuyeux, il n'aurait qu'à partir à la recherche des autres... Cela n'allait peut être pas tarder car un jeu idiot avait été lancé: qui est quoi? Cependant, Gabriel était intrigué par l'étendue de ce dont était capable un mutant, alors pourquoi ne pas écouter un peu? Il ne fallu pas longtemps à un des protagonistes pour l'accuser de téléportation abusive. Mais... la téléportation... c'était quoi exactement? La fille avait vraisemblablement des références d'un autre univers, mais en puisant lui-même dans ses souvenirs, il réussit à faire un lien.

"La téléportation, c'est quand on disparaît d'un endroit pour apparaître à un autre en une fraction de seconde, non?" Il réfléchit un moment, pensant au lien que cela avait avec ce qu'il pouvait effectivement faire. "Et bien... Oui... Je pense que c'est ce que je peux faire..." Avec quelques petites différences. "Sauf qu'en fait je peux me voir..." Dur à expliquer, pour lui qui n'avait jamais essayé de mettre un mot sur le phénomène.

La rouquine lui envoya un toast, que Gabriel refusa d'un signe de main.

"Merci, mais je n'ai vraiment pas faim..." Il la fixa ensuite un bref instant. "Et pour toi, ca n'a pas un rapport avec le feu?" Lui demanda t'elle, avec en tête l'idée qu'elle ait pu griller ses toasts toute seule.

Alors que Luz s'apprêtait à papouiller le chat, celui ci sembla avoir un reflexe de survie particulièrement sensé et préféra fuir. Se passa alors ce que Gabriel était loin de s'imaginer. Les yeux écarquillés, le jeune homme regarda la transformation s'effectuer.

"Puréééée... Le chat peut se transformer en gamine???" Dit-il avec une main sur la bouche. "Mais où est ce que je suis tombé, moi?" Marmonna-t-il dans sa barbe de deux jours. La jeune fille, nouvellement apparue se présenta brièvement avant de prendre la poudre d'escampette. Cela lui avait coupé l'envie de se rasseoir... Soufflant un bon coup, il commença à faire une petite visite de la pièce, tranquillement, histoire de se changer les idées, regardant un peu partout si une blatte ne s'y cachait pas.

Le jeune homme pouffa de rire devant la réplique cassante de la blonde. Amusant, il y avait donc en ces lieux quelqu'un de pire que lui!!! Il allait vite falloir lui rabattre son caquet... Revenant vers la table, il prit un air plus sérieux. Il était temps d'élucider tout ce mystère. Au final, on ne lui avait expliquer que peu de choses, et totu avait décidé en à peine une semaine.

"Dites, tout le monde a été amené ici pour les mêmes raisons? Je veux dire... Ca ne vous semble pas bizarre à vous, qu'on nous ai rassemblé tous ici, dans cet endroit miteux?"

Certains d'entre eux y étaient visiblement habitués... Il regarda à son tour la fissure qui lézardait au plafond avant de jeter un œil autour de lui, histoire de vérifier que son tortionnaire favori n'était pas dans les parages...

"Visiblement, nous sommes tous des mutants..." C'était assez dur à avouer pour lui. "Mais pensez vous que nous avons été rassemblés pour de bonnes raisons?"

Le joli chat plein de poils sur lequel le regard de Lucy était tombé n’était pas vraiment ce qu’il semblait être. Oh pas qu’il ne soit pas réaliste, l’Australienne étant parfaitement sûre qu’il s’agissait du chat de l’un des mutants présents ici, et peut-être même l’espion en chef de cette ‘Don’t know who’ dont Emily Wong lui avait parlé à Perth, mais il était quand même bizarre. Il jetait des regards acérés au détenteur du postérieur meurtrier sous lequel il avait failli finir écrabouillé. Et la rouquine doutait de la présence de rancune chez les félins mignons. Ils étaient trop fiers pour ça, et s’ils avaient à se venger, ils le faisaient sur le moment même.

La plante verte dénommée Luz semblait cependant vouloir apprivoiser cette petite bestiole en dévoilant la nature secrète de ses pouvoirs : elle tentait d’hypnotiser la bête avec une main lumineuse toute verte, essayant de faire croire au félin qu’elle ne le lui ferait aucun mal. Si ça tombait, le minou était tout droit sorti de son garde-manger personnel. La mutante verte cachait peut-être une rangée de dents acérées derrière son doux minois et ses airs de baba-cool.

Le discours du beau gosse mystérieux était bien plus belliqueux à l’attention du petit chat. Sans doute l’homme de la situation en avait-il pris pour sa fierté machiste en se voyant la cible d’un regard si enfiévré de colère… Et puis, finalement, le chat dévoila par lui-même sa véritable identité, pour la plus grande surprise de tous les mutants présents. Sous les yeux ébahis et presque plus endormis de la rousse flamboyante, la bestiole se changea en fille bizarre, qui se présenta et quitta les lieux aussitôt.

Et c’est à cet instant que les premières réponses du petit jeu des pouvoirs qu’elle avait lancé commencèrent à pleuvoir dans cette salle à manger improvisée. La participante la plus assidue était sans conteste l’ado rebelle, qui conféra à la coincée russe le pouvoir de lasers oculaires. Dans un sens, elle n’avait pas tort, tout dans son attitude faisait penser à un robot Terminator prêt à tout exterminer sur son passage… Elle donna aussi un pouvoir de téléportation au beau gosse qui dissimulait encore son prénom. Lucy ne comprenait pas les références de la mutante bavarde, elle devait être américaine, mais trouvait aussi que ça lui allait bien. Il avait une tête de lâche qui fuyait ses obligations à la moindre occasion. Et de fait, il confirma plus ou moins la prédiction, même si ses explications semblaient confuses. Comme s’il ignorait lui-même de quoi il était capable. Puis, le sans-nom refusa le toast de l’australienne, espérant sans doute qu’elle le reprenne devant elle pour le manger. Maintenant qu’il avait traîné sur cette vieille porte couchée, il ne fallait même pas espérer. Et puis, il fallait bien qu’elle trouve une excuse pour ne pas manger tout ce qu’elle avait préparé…

« Bon ben… Si quelqu’un veut. »

Il lui confia alors un pouvoir en rapport avec le feu. Le type était physionomiste, à n’en pas douter. Un peu naïf, mais bon, on n pouvait pas lui en vouloir. Ainsi, Lucy se contenta d’hausser les épaules avec un grand sourire.

« Attention de ne pas t’y brûler… »

La blonde, elle, ne répondit même pas aux propositions, et se contenta de dire froidement un truc sans sens avant d’attaquer ouvertement et non sans une certaine prétention la bavarde sympathique. Elle se fit même insultante à son égard, et Lucy sentait la moutarde lui monter au nez. Était-ce une manière de parler aux inconnus qu’on venait de rencontrer ? Elle pointa la blonde d’un regard assassin, et sans tenir compte de la question stupide du beau gosse complètement à l’ouest, elle intervint farouchement, sans dissimuler sa colère naissante.

« Non mais ça va aller, mamzelle j’me la pète en prenant les autres de haut ? La politesse, tu connais ? »

Elle ne supportait pas ce genre de personne. Ça lui rappelait un peu ses parents, en quelque sorte… Ses parents qui l’avaient abandonnée, et qui ne méritaient plus la moindre considération. Ainsi, la rouquine continuait de regarder la blonde avec un regard noir, les poings serrés sur la table. La colère avait pris le dessus sur la fatigue… Et un tempérament flamboyant. Le beau gosse avait pas totalement tort, finalement.

Le cycle des arrivées semblait s'être terminé avec l'arrivée du seul mec - pour l'instant - mais Luz préférait concentrer son attention sur le petit animal, même s'il ne semblait pas exactement rassuré par son apparence. Les animaux ne voyant pas les couleurs, ils l'assimilaient traditionnellement à la catégorie "humaine", mais celui-ci donnait l'air d'être pour le moins méfiant. Ce qui fut expliqué lorsqu'il se transforma en une gamine plus jeune qu'elle qui prit la poudre d'escampette. Surprise, Luz poussa un petit cri avant de tomber sur les fesses, déséquilibrée. La lumière de sa main s'éteignit automatiquement. "Au temps pour la nature", songea-t-elle. Elle était bel et bien coincée dans une mer de bitume, et il n'y avait pas d'échappatoire, car elle sentait que le contact avec la gamine animorphe n'aurait rien de simple.

Vaguement lasse, elle alla s'asseoir sur une chaise libre en écoutant la conversation. Puisqu'elle avait déjà dévoilé ses cartes, à ceux qui avaient regardé au moins, elle s'octroyait le droit de rester silencieuse. En plus, tout ce qu'on disait semblait pouvoir être retenu contre soi par la grande blonde, avec laquelle elle était désormais quasiment certaine de ne pas s'entendre sauf cas de force majeure ou danger de mort. Elle lui associa le mec, qui faisait très petit bourgeois à geindre sur l'état des lieux. OK, c'était pas le grand luxe, mais certaines périodes de sa vie avaient appris à Luz de se contenter du confort minimal.

Heureusement, Roxie avait l'air sympathique même si un peu speed, et Lucy avait eu la même réaction qu'elle, en plus volubile, devant l'attitude de la blondasse. Luz posa le coude sur la table, la joue sur la paume de sa main, en songeant que sauver le monde allait peut-être se révéler plus difficile que prévu. Pas d'un point de vue stratégique, mais elle n'imaginait pas qu'on pouvait aussi trouver des caractères difficiles chez les mutants. Du moins, des caractères difficiles avec leurs congénères. Elle s'attendait à un esprit d'union sacrée, où tout le monde se serrerait les coudes, mais la réalité était bien loin de ses attentes. Avec un peu de recul, elle se réprimanda d'avoir été aussi naïve. Après tout, avant d'être des mutants, ils étaient des ados. Elle soupira en songeant qu'un bon joint aurait pu chasser toutes ces préoccupations quasi instantanément.

De sa main libre, elle fit le signe de la paix, tendant son index, son majeur et son annulaire à la baston en devenir. Il était trop tôt, et elle n'était pas dans le bon état d'esprit pour apprécier à sa juste valeur une bagarre mutante.

- Peace. Gardez votre mauvais karma pour les méchants.

Elle se tourna ensuite vers le mec, qui était visiblement à l'Ouest, ou alors qui avait oublié le speech de Lily-Rose, et poursuivit sur le même ton traînant.

- Ouais, on est là pour botter les fesses des types qui contrôlent Washington. La vieille te l'a pas dit quand elle est venue te chercher ?

Mimi-Rose lui avait dit qu'elle pouvait se métamorphoser, néanmoins, Luz avait la nette impression qu'elle ne s'était pas transformée en grand-mère pour rien. Elle n'était pas toute jeune, elle pouvait le jurer. Peut-être était-ce quelque chose dans son attitude, ou sa façon de parler, ou la facilité qu'elle avait pour incarner une mamie espagnole, alors qu'elle était vraisemblablement américaine.

Cela étant dit, peut-être était-ce quelqu'un d'autre qui avait recruté ce gars. Décidant d'arrêter ici sa réflexion, elle se tourna vers Lucy.

- Tu me passes un toast ?

"Wow." fit Roxie lorsque son nouveau chat se changea en fille. Elle pouvait toujours chercher à lui faire bouffer de la pâtée pour chats, mais le petit nom, elle devait déjà probablement en avoir un. D'ailleurs, il ne tarda pas à arriver. L'adolescente était déçue. Elle aurait bien aimé avoir un animal. Néanmoins, ça devait pouvoir se trouver dans les ruelles craignos du quartier... Tant pis si le garçon n'aimait pas les bestioles, il n'était pas obligé de traîner dans ses pattes. L'hôtel était plutôt grand, il devait y avoir suffisamment de place pour l'éviter. Et léviter, pour peu que l'un d'entre eux ait le pouvoir de voler. En tout cas, Roxie commençait à se dire que s'ils avaient tous un caractère de cochon, ils n'auraient pas besoin d'un chat pour vivre dans une ménagerie.

Pour commencer, seule une partie des jeunes s'était présentée, et ceux qui ne l'avaient pas fait ne semblaient avoir aucune envie qu'on puisse les appeler par autre chose qu'un sifflement ou un claquement de doigts. Bizarre. C'était d'ailleurs le cas de la Slave. Roxie la dévisagea les sourcils arqués tout en léchant sa cuillère. Probablement qu'ils préféraient se murer dans le silence et pousser quelques cris gutturaux lorsqu'ils avaient besoin de se faire comprendre, dans son pays. C'était le genre d'image d'Epinal qui circulaient sur cette froide et sauvage partie du globe chez les jeunes Ricains. Néanmoins, son maintien, sa tenue et son regard hautain lui rappelaient plutôt les oies blanches de la pension pour jeunes filles où sa mère l'avait expédiée, et où elle n'avait pas tenu un mois. C'était bien sa veine...

"J'retire c'que j'ai dit : tu dois juste être désagréable." répondit-elle du tac au tac, avant de se retourner vers ceux qui avaient accepté de jouer le jeu des devinettes. "Laisse béton... Lucy." ajouta-t-elle avec légèreté à la jeune fille qui prenait sa défense. Elle avait eu son lot d'animosité au lycée, et savait d'ailleurs se défendre toute seule. Un peu comme en zonzon, les lycées et autres pensionnats nécessitaient ce genre de rapports de force. C'est l'une des seules choses que Roxie avait retenues de son séjour dans le Maine. Ceux qui ne savaient pas s'imposer, qui s'écrasaient, se faisaient bouffer par les autres. Et si on lui cherchait des crosses, Roxie serait au rendez-vous. Toutefois, les réactions à la table lui permettaient d'avoir une bonne idée du pourcentage de coolitude des élèves.

Roxie avait beau bouquiner pas mal, l'explication du garçon sur son pouvoir n'était pas très claire, et l'ado ne parvenait pas réellement à l'associer à un personnage existant. Sa question la prit d'ailleurs au dépourvu : en fait, Roxane n'avait pas vraiment calculé plus loin que l'alternative pour éviter la pension. Emily lui avait parlé de super-héros, un langage que la New-Yorkaise comprenait bien, et ça avait suffi pour la convaincre de venir.

"Moi j'le trouve cool c't'hôtel. Personne risque de v'nir nous faire chier ici." répondit-elle en s'étirant les bras au-dessus de la tête. Sous-entendu pas ses parents, c'était tout ce qu'elle demandait. "J'préfère ici à là où j'étais avant, et ça, ça me suffit."

Roxie tourna un regard intrigué vers Luz. Une vieille ?

"Une vieille ? Elle est pas relou, j'espère ?"

Il ne pouvait pas s'agir d'Emily, elle devait avoir quinze ans de plus qu'eux à tout casser. Tout ce qu'elle espérait maintenant, c'était que cette vieille ne soit pas aussi coincée du cul que Mme Nichols, la dirlo de sa pension.

Gabriel ne s'était pas encore présenté. En temps normal, c'est la première chose qu'il aurait faite, histoire de marquer les esprits et qu'on se souvienne de lui. Mais pour le moment, il était encore en plein doutes, les raisons qui l'avaient conduites ici ne lui étaient toujours pas claires. Vraiment, il ne voyait pas comment cette poignée d'ados était sensé pouvoir se transformer en justiciers en étant terrés comme des rats dans ce lieu qui manquait clairement de fraicheur... Et puis, pour une école, cela manquait de professeurs... Cependant, la blonde se prêtait également au jeu, il allait donc rester le seul inconnu de la pièce, ce qui était inenvisageable. Par contre, ayant cerné à peu près le tempérament des personnes présentes, il savait qu'il allait devoir la jouer mollo s'il voulait se faire aimer... dans un premier temps. La blonde, Kallan donc, était aussi sympathique et agréable qu'un moustique. Il allait pouvoir se servir de cela pour fonder les bases du clan dont il serait bientôt le leader incontesté.

En parlant de professeurs, si tous ceux qui étaient venus les recruter en était, cela en faisait trois de révélés. Walentyn, une asiatique et une vieille...

"Ah... pas de vieille pour moi non plus... Non, moi j'ai eu l'immense honneur d'être torturé par un homme aux allures de mafieux..." Il se remémora douloureusement l'illusion des chihuahuas mordant avidement son entrejambes...

Il était donc temps de passer à la phase de socialisation contrôlée. S'approchant à nouveau de la table/porte en souriant il attendit le moment opportun pour faire son annonce.

"Il me semble qu'il me reste à me présenter. Moi c'est Gabriel. Je viens de Nouvelle Zélande et comme vous l'avez surement remarqué, je ne suis pas un expert sur la question mutante et j'ai donc du mal à définir ma capacité." Tout en parlant il reprit place sur la chaise qu'il occupait un peu plus tôt. Il tourna le visage vers Kallan. "Et comme, vous toutes ici, semblez vous y connaître un peu plus, je pense que le plus simple c'est que je vous montre, comme ca vous pourrez m'en dire plus..."

A ces mots, il se cala bien au fond de son siège, puis la tête du jeune homme tomba en avant un moment comme s'il s'évanouissait et revint à sa position de départ un court instant après. Son double translucide apparut alors derrière Kallan.

"Comme je l'avais dit, je peux me voir" Dit celui-ci en fixant l'original qui sourit à son tour.

La projection disparut alors pour réapparaitre instantanément à côté de Roxane.

"Et je peux faire ca aussi, la téléportation que tu disais" Dit Gabriel l'original, juste avant que la projection n'ajoute en fixant sa bouille physique: "D'ailleurs je préfère ce profil..."

Cela lui faisait vraiment étrange, car c'était réellement la toute première fois qu'il faisait ce petit tour en public... cela dit, c'était grisant! Il faut croire qu'il se sentait à l'aise parmi... ses semblables... Mais voir son corps ainsi à la merci des mains vicieuses de cette troupe féminine était trop difficile à soutenir, car sous cette forme, il était vulnérable et ne pourrait fuir si Kallan décidait de faire de lui sa première victime de l'école. Aussi décida-t-il rapidement de mettre un terme à son petit tour. C'est ainsi que la projection disparut, et cette fois ci, pour de bon...

Gabriel l'original, le vrai, le pur et le dur, reprit donc les commandes, et pour la première fois depuis bien longtemps, il se sentait légèrement intimidé, en témoignait son teint rosé.

"Je dois avouer, que je n'ai vraiment pas l'habitude. Vous êtes les premiers à qui je montre ca." Puis se remémorant une bien triste nouvelle: "Ah!.. Mis à part mon frère qui l'avait vu malgré moi... Il est ici aussi..."

Le voyage avait été long, mais pas assez long pour les réconcilier ou même les laisser avoir une conversation normale. Dès leur arrivée, ils s'étaient effondrés sur leur lit pour rejoindre le pays des rêves, et aux dernières nouvelles, Alexander y était toujours. Gabriel balaya à nouveau la pièce du regard, l'air peu convaincu.

"Et c'est donc ici le QG de notre... mission?"

Ils n'avaient eu que peu d'informations, et connaissait peu l'impact des Pères Fondateurs. Sur son ile du bout du monde, c'était lui le père fondateur. Il lui faudrait surement un bon moment avant de comprendre ce qui l'avait profondément poussé à venir ici. Etait-ce la fuite de la menace qui pesait sur lui, ou les paroles sibyllines de Walentyn? En tout cas, une chose était sure, à terme, il lui faudrait absolument reconstruire son fief ici.

Visiblement, la colère avait pris l’ascendant sur la raison de Lucy. S’énerver ainsi dès une première rencontre n’était pas très bon pour sa réputation, surtout après s’être fait involontairement passer pour la lavette de service. Quoi qu’en termes de première impression foireuse, certains y allaient à fond les manettes : Kallan la pétasse méprisante, Roxie la bavarde, Gabriel, qui s’était enfin présenté, le beau gosse paumé. Seules la fille-chat et Luz s’en sortaient plutôt pas mal, bien que pour la dernière, la réputation était toute faite avec son physique de rasta-girl extra-terrestre. D’ailleurs, ce fut elle, dans son rôle de hippie de la pièce, de calmer un peu le jeu entre la blonde et la rouquine, arguant qu’il était préférable de laisser les rancœurs interindividuelles pour les ennemis qui les attendaient à l’extérieur, ces Pères Fondateurs et leurs collègues mutants très dangereux.

Roxie renchérit en demandant à Lucy de laisser tomber. Il était vrai qu’elle n’avait pas grand-chose à faire dans cette affaire. Mais tout de même, Kallan avait été totalement irrespectueuse, et elle ne pouvait pas piffer les prétentieux qui dénigraient les autres. Surtout quand elle appréciait ces autres en question. Et comme Roxie lui paraissait sympathique…

Et puis, alors que les ardeurs de Lucy se calmaient un peu, et qu’elle desserrait ses poings crispés sur la table, ce fut au tour de la russe de donner son avis sur la question, sur un ton qui hérissa les poils de Lucy, avec une condescendance et une hypocrisie malsaines, et une mauvaise-foi complètement flagrante. Elle affirmait qu’elle était la victime dans tout ça, et qu’elle avait été insultée. Sans blague, qui avait commencé à traiter Rox de bavarde soulante ? à côté de ça, ce qu’avait dit Lucy n’était qu’une logique remise en place de cette pète-cul de première catégorie. Et en plus, Kallan commit une erreur monumentale dans son petit discours dépréciateur.

« Quoi ? C’est une menace là ? Apprends à bien te comporter, et on verra si tu en mérites, du respect. Et si tu crois que tu me fais peur, tu te fourres le doigt dans l’œil jusqu’au coude. »

Elle se présenta alors, comme si elle avait complètement oublié qu’être poli pouvait aussi être spontané. Sa question sarcastique fit froncer une nouvelle fois les sourcils de la rouquine.

« Mouais… Enfin bon, j’aime pas non plus le conflit pour le conflit, alors on va gentiment laisser couler, j’propose. Faudra qu’on se fasse à l’idée qu’on va passer un gros bout de temps, ensembles. »

Même si Lucy espérait secrètement que la russe soit tellement répugnée par l’hôtel qu’elle décide de mettre les bouts.

Heureusement, la discussion suivait son cours naturellement, mis à part ce petit incident. D’ailleurs, il y en avait un qui semblait ne pas du tout avoir remarqué l’incident en question : Gaby n’était pas intervenu, et restait dans son monde à faire la démo en public de son pouvoir, toutefois assez sympa. Lucy avait dû résister intérieurement à l’envie de posséder le corps sans vie du mutant juste devant ses yeux ébahi, mais elle préférait que les autres devinent son pouvoir, même si ça n’était pas évident. Et puis vu comme il tombait des nues, ça l’aurait sûrement traumatisé, le pauvre. Taquine, elle le regarda avec un sourire indescriptiblement mutin, et lui lâcha :

« Hé Gaby, t’as pas peur de ne plus pouvoir revenir dans ton corps ? Ou qu’il lui arrive un truc de pas sympa ? »

Comment faire flipper un newbie de mutant, leçon 1.

Et puis, ça discutait aussi des profs, qui étaient recensés pour l’instant au nombre de trois : la vieille dont lui avait parlé Emily, un maquereau mafieux au nom inconnu, et Emily herself.

« Moi j’ai eu Emily aussi, l’asiate. Elle est sympa. »

Et puis, dans la pièce, plusieurs demoiselles semblaient vouloir gouter aux bons toasts à la marmelade de framboise de tata Lucy ! Pas comme cet empoté de mâle qui avait presque injurié ses petites tartines grillées en leur préférant un pain sex et rassis.
Ainsi, la rouquine fit glisser un toast vers la mutante verte, comme elle l’avait fait précédemment pour Gabriel. Elle fut même étonnée lorsque la blonde lui en demanda un également, avec politesse, attention ! Ca sonnait un peu comme le calumet de la paix, et Lucy haussa les épaules avec un demi-sourire avant d’en envoyer un aussi. Hélas, elle calibra mal son tir et le toast garni de marmelade valsa par-dessus la table/porte, droit vers les belles bottes de la russe. Effarée, elle ouvrit de grands yeux…

« Oups… »

On allait encore croire qu’elle l’avait fait exprès.

Luz accueillit le toast avec soulagement, puisqu'il signifiait que Lucy n'était plus d'humeur belliqueuse. L'ambiance dans la pièce n'était pas devenue cordiale, mais elle était moins tendue, et moins apte à se transformer en bataille rangée. L'Espagnole n'en tenait pas rigueur à la rouquine, considérant que la responsable était unilatéralement la prétention qui émanait de Kallan presque aussi nettement que son parfum, mais elle préférait adopter la tactique de l'ignorance.

Elle se tourna vers Roxie.

- Non, elle avait pas l'air pénible. Et puis si ça se trouve, elle est pas vieille, puisqu'elle se transforme. Mais elle savait vraiment bien parler comme une vieille.

Elle jeta un regard vaguement intéressé à la transformation de Gabriel, se demandant si le fait de se dédoubler ne rendait pas vaguement schizophrène. En cet instant, elle était heureuse de son physique particulier, elle était certaine que ce n'était pas elle que viendrait espionner l'ectoplasme pendant la douche. Il semblait plus intéressé par Roxane. Malheureusement, celle-ci partageait sa chambre, ainsi que Kallan et Lucy, deux autres belles plantes. Les fantômes allaient pulluler. Et si son frère était capable de la même chose ?

Pour chasser cette pensée de son esprit, elle croqua goulûment dans la tartine en réfléchissant aux moyens à sa disposition pour se procurer son relaxant préféré. Ils étaient clairement limités. Elle avait un peu d'argent de poche - il faudrait qu'elle demande à sa mère de lui en envoyer régulièrement, il n'y aurait sans doute pas de souci. Mais elle ne connaissait pas les revendeurs, ni leur avis sur les filles vertes. A Séville, c'était Cris qui achetait : avec Angelica, elles avaient calculé que les grands yeux bleus de leur amie leur valaient un 15% de réduction en moyenne.

Elle regarda successivement les différentes personnes dans la pièce. Est-ce que l'une d'elles pourrait servir de prête-nom ? Elle avait déjà exclu Kallan, et quasiment fait de même avec le beau gosse, qui lui semblait aussi digne de confiance que les ponts suspendus dans les films d'aventure, avec son pouvoir d'espion pervers. Lucy ou Roxane semblaient sympathiques, mais dans tous les cas, il était encore trop tôt pour faire pareille proposition. Avec un peu de veine, l'une d'elles aurait les mêmes..."goûts". Ca simplifierait la problématique.

Jugeant qu'elle ne parviendrait à aucune conclusion dans l'immédiat, elle décida d'aller prendre le soleil. Le toit était censé être accessible, elle pourrait aller trouver un endroit où poser un matelas pour recharger ses batteries. Elle se leva tranquillement et sortit de la pièce avec sa tartine à peine entamée dans la main.

Toit

Se redressant sur la chaise retournée sur laquelle elle s'était installée, Roxie se gratta la tête avec perplexité devant la réponse de la blonde électrique. Ses oreilles bioniques n'avaient pas capté de propos injurieux dans la pièce, du moins probablement pas oralement, vu que quelques pensées négatives ne devaient pas être étrangères à l'animosité qui leur avait soudain bondi à la gorge. L'ado ne pigeait pas bien quelle mouche avait pu piquer la dénommée Kallan, qui finit par se présenter. Décidément bizarres ces Russes. En tout cas, toute grande gueule qu'elle était, Kallan s'était écrasée sans moufter à la réponse de Roxie, ce qui 1) témoignait du bienfondé de sa remarque 2) confirmait qu'elle pouvait en imposer aux fortes têtes sans même avoir à leur exploser les tympans.

Roxie se dit qu'il était néanmoins plutôt téméraire de menacer un élève sans avoir la moindre idée de ce dont elle était capable en retour. Si le pouvoir de Lucy n'était clairement pas le service de toasts, il pouvait être autrement plus... salissant.

La conversation reprit, et Roxie coula un regard en biais à Kallan quand celle-ci qualifia Emily, car il devait s'agir d'Emily, de plutôt mignonne. C'était vrai, la prof n'était pas laide à regarder, et elle avait été plutôt cool avec elle pendant le trajet depuis le Texas. La petite métalleuse trouvait fatalement cela suspect quand la première chose qu'évoquait une nana sur une autre nana était qu'elle était bonnasse. C'était le genre de commentaire qu'elle aurait pu faire avec les potes avec qui elle traînait à New York. Néanmoins Roxie n'eut pas le temps de s'attarder. Gabriel se présentait et explicitait ses pouvoirs. C'était assez impressionnant de voir quelqu'un sortir de son corps de cette façon, ça lui rappelait les films qu'elle avait pu voir sur les exorcismes.

"Cool !" s'exclama avec entrain la jeune fille. Elle approcha sa cuillère avec curiosité de l'émanation spectrale de Gabriel pour voir l'effet que ça faisait, et vit son couvert traverser l'enveloppe immatérielle.

"Rah c'est con que mes trucs soient chez ma daronne, j'ai une BD où un perso a ce pouvoir, ça ressemble à de la projection astrale ton truc." lui assura Roxie en hochant la tête.

Ca c'était sûr : ses affaires allaient lui manquer. Sa gratte, ses bouquins, ses BD... Peut-être que quand sa mère se serait calmée, il y aurait moyen de les récupérer. Mais il ne fallait pas trop y compter pour le moment. Elle devait être perdue quelque part entre la colère noire et le soulagement profond d'être débarrassée de sa gamine. Au moins comme ça, elles étaient deux.

Luz venait de quitter la pièce. Ca tombait bien, Roxie commençait à trépigner. Elle se leva à son tour.

"Bon, qui a envie de bouger ? J'ai tourné en rond toute la journée hier !"

Le petit jeu des pouvoirs l'avait bien occupée, allez... deux minutes. Mais elle avait déjà la bougeotte alors même que son tour n'était pas passé.

La règle numéro un lors d'un règlement de comptes entre filles: ne jamais intervenir à plus forte raison si l'on est du sexe opposé... Sa petite démonstration n'avait pas suffit à calmer les ardeurs, au mieux était il passé un peu plus pour un paumé. Les paroles de Lucy intriguèrent le jeune Néo-Zélandais. Ne plus revenir dans son corps, voila bien une pensée qui ne l'avait jamais traversée et qui, maintenant qu'on lui suggérait, avait de quoi troubler. Il était clair que la jeune fille avait dit ca de manière à lui faire peur, mais comme Gabriel ne la connaissait pas encore bien, il ne savait pas vraiment dans quel but: Menace? Blague? Réflexion existentielle? Il faut dire que son pouvoir avait des airs incontrôlables, même si ses somnambulismes fantomatiques avaient cessé depuis quelque temps, il n'en restait pas moins qu'il se dédoublait, et c'était d'autant plus inquiétant qu'il pouvait désormais presque avoir une conversation avec lui-même.

"Projection astrale..." Nota Gabriel dans un coin de sa mémoire. Au moins pouvait-il maintenant mettre un nom sur le phénomène que semblait lui indiquer une experte en la matière. Après tout, Roxane avait beau être un peu dans son monde, ce monde semblait pour une fois être une vraie encyclopédie.

Le moins que l'on puisse dire, c'était que les filles de cet établissement n'étaient pas du genre que Gabriel avait l'habitude de côtoyer. Il allait devoir être par conséquent différent de ce qu'il était à l'accoutumée, du moins dans un premier temps. Peut être les professeurs étaient il d'un gout plus raffiné, mais pour le moment, le seul exemple qu'i lait eu l'avait traité comme un jouet. Il était certain qu'il réussirait à se venger de lui d'une manière ou d'une autre pour cet affront. Toute école avait un directeur, tout ce que Gabriel se souvenait, c'était qu'il s'agissait de l'école Gravier, surement du nom du ou de la directrice. Il regarda Luz se lever avant de faire le lien avec la fameuse vieille.

"Ne serait-ce pas elle, la propriétaire des lieux? La vieille..."

Mais Hulkette partait déjà vers d'autres cieux. Il se tourna donc vers les trois filles restantes espérant en savoir un peu plus de leur part. Mais Kallan annonçait son départ à son tour. Voila qui annonçait clairement la fin du petit déjeuner, mais également que tout le monde s'évertuait à ne pas répondre à ses questions.

"Je suis vraiment le seul à ne rien savoir de ce qu'il se passe, ou tout le monde s'en moque?" Demanda-t-il un peu vexé. Ce devait être le prix à payer pour ne pas avoir écouté Walentyn lorsqu'il en avait l'occasion.

Ce fut en fait avec un certain soulagement qu'il regarda la blonde quitter la pièce, il y avait une despote de trop dans la pièce, et l'une des règles d'or de Gabriel restait "diviser pour mieux régner"... Cependant, c'était sans compter sur la deuxième blonde, qui voulait à son tour vadrouiller. Oh, et puis, après tout, pourquoi pas, car rien ne les retenait particulièrement dans cette pièce et ce serait l'occasion d'apprendre leurs qualités et défauts respectifs sur le terrain. Et puis, à fin de découvrir les secrets des lieux, il fallait les parcourir. Un problème subsistait encore: les noms des deux filles restantes... Tout en les observant, Gabriel tachait de remettre le bon nom à la bonne place: donc la rousse, c'était Luz, et la blonde Foxie, surtout ne pas les inverser, elles pourraient mal le prendre... Pour celles qui étaient parties, la mémoire de poisson rouge de Gabriel pour les noms avait déjà fait ce qu'il fallait pour qu'il ne s'en souvienne plus... Peut être Doushka, pour la dernière...

"Oui, je veux bien faire un tour... Je ne sais pas ce qu'on peut faire par ici, mais on verra bien" Répondit-il à Roxane en se levant de sa chaise. "Finalement, je suis l'un des seuls à avoir dit ce que je faisais... Je suppose que pour vous, il va falloir continuer à deviner."

Il sourit alors, comme il savait le faire. Ces deux jeunes filles devaient être plus jeunes que lui d'au moins deux ans, mais dans son appartement de Wellington défilaient régulièrement des amis de tout âge. Son tempérament jugé parfois instable lui permettait de se faire apprécier d'un large public, alors à voir si ici cela fonctionnerait.

"J'espère juste ne pas m'être fait embobiner à venir ici... J'ai lâché pas mal de choses pour ca..." Puis approchant de la sortie vers Roxane. "Où va-t-on?"

Les gens de la salle à manger improvisée entre deux portes se défilèrent vite, alors que l’ambiance était en train de dégringoler littéralement suite aux tensions des premières rencontres chaleureuses et pleines d’entrain de cette première journée au Old School. Luz se carapata donc sans rien dire, son toast entre les mains, rapidement suivie de Kallan, qui quitta la pièce sur une note un peu plus positive que tout le reste de ses interventions d’alors : elle promettait de ne pas les tuer ou se retourner contre eux si jamais ils affrontaient quelqu’un de malveillant. C’était vrai qu’ils auraient pu en douter, avec son comportement… Elle accorda tout de même un dernier regard meurtrier à Lucy en regardant l’état dégradé de ses belles bottes bien chères, et la rouquine ne sut plus où se mettre. Se fâcher alors qu’on agressait quelqu’un, c’était une chose, mais là, elle n’avait rien à dire : c’était sa faute. Même si elle espérait que la blonde comprendrait qu’il s’agissait d’une faute involontaire…

Ce double départ amena un grand vide dans la pièce, vide qu’essaya de combler tant bien que mal le mâle de service, qui s’étendait en hypothèses et questions sur sa présence ici. Lucy consentit à lui sourire, après un haussement d’épaules :

« Quoi, on t’a vraiment pas expliqué pourquoi on était là ? »

C’était étonnant qu’il ait accepté de venir, sans savoir où il allait, comme il avait visiblement du faire pas mal de concessions pour partit.

« Bon, comme tu l’as sans doute remarqué, on est tous mutants ici. Et cet hôtel, c’est une sorte de centre d’entraînement privé et secret pour développer nos pouvoirs afin de s’attaquer aux types qui ont pris le pouvoir de la Maison Blanche, les Pères Fondateurs, là. T’en as entendu parler, hein ? »

Même elle en avait entendu parler, à Perth, alors pourquoi pas un néo-zélandais ?

« Tiens, c’est marrant d’ailleurs que tu viennes de Nouvelle-Zélande. J’suis de Perth, moi. En Australie. Ouais, pour ma part, z’allez devoir deviner, pour mon pouvoir. »

Rox proposa alors de faire un tour ailleurs, histoire de changer d’air. Lucy n’était pas contre du tout. Elle enfourna en bouche le reste de son toast, termina en une grosse gorgée son café, et décréta :

« Ouais on bouge. »

Elle se rappela soudainement qu’elle était uniquement vêtue d’un T-shirt trop large.

« Mais on reste dans l’hôtel alors. Ou bien j’vais me changer d’abord. »

En fait, ces deux là avaient peut-être envie de se retrouver à deux… C’était bien possible.

« Ouais bon, en fait j’vais aller m’habiller. J’vous retrouverai plus tard ! »

Lucy se leva, rangea momentanément ses affaires sur un plateau, et se dirigea vers la sortie de la pièce.

Réception.

Roxie ne put s'empêcher de laisser traîner son regard sur la croupe de Kallan tandis que celle-ci quittait la pièce sur sa drôle de tirade. Au moins, elle était plutôt bien gaulée.
Elle retourna lentement la tête vers les deux mutants restants, la mine perplexe et les sourcils arqués.

"Mouais, un peu chelou celle-là..." fit-elle, sans même prendre la peine de ranger les couverts qu'elle avait utilisés. Comme quoi, avec sa face d'extraterrestre, Luz était peut-être moins zarbi qu'une fille normale à la plastique avantageuse.

"Moi, Emily m'a dit qu'on allait devenir des super-héros en ramenant la paix dans le monde, en gros. J'en sais pas beaucoup plus, mais ça me gêne pas, j'suis pas du genre à faire trop des plans tu vois. Style avant-hier je faisais encore du stop au Texas. Si on m'avait dit que j'serais dans un groupe de super-héros clandestins à Chicago aujourd'hui, j'l'aurais pas cru." répondit Roxie en haussant les épaules avec désinvolture.

Roxie hocha la tête d'un air entendu lorsque Gabriel évoqua ce qu'il avait abandonné pour venir là. Elle n'avait pas exactement abandonné sa guitare pour venir ici, puisque sa séparation prédatait sa rencontre avec Emily, mais Roxie pouvait comprendre ce sentiment.

"T'as lâché quoi par exemple ?" demanda-t-elle avec curiosité.

"Moi mon pouvoir, c'est pas vraiment un vrai pouvoir, vous voyez ? Vous allez avoir du mal à trouver, j'pense." ajouta-t-elle.

Franchement, comparé à la projection astrale, son pouvoir ne cassait pas trois pattes à un canard.

"On s'casse, y a pas grand-chose à faire ici. En plus, j'aimerais bien voir combien coûtent les grattes au centre-ville. J'ai laissé la mienne chez ma daronne." répondit la blondinette avec une intonation dédaigneuse en abordant le thème maternel, avant de faire un rif d'air guitar.

"A toutes alors !" lança avec entrain Roxie à Lucy.

Loop

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