01.02/10.L. Le Golden Bar - Entre vents et marée

Ludvig échangea quelques banalités avec Lily-Rose durant tout le trajet, évoquant toute sorte de sujet sauf celui qui l'avait amené à San Francisco. Il attendait pour cela d'être tranquillement installé avec sa charmante interlocutrice au Golden Bar, l'un des lieux les plus prisés de San Francisco. Une fois arrivés à Baker Beach, le taxi les déposa et Ludvig régla la note en y ajoutant un bon pourboire.

Le duo était arrivé devant un charmant bar de plage mis en valeur à la faveur d'une des rares éclaircies:


Le vent marin était un peu plus présent sur la baie qu'à San Francisco même et le bruissement du plafond végétal était un son délicieusement suave aux oreilles de Ludvig.

"Ce café est un petit peu branché mais la vue y est particulièrement somptueuse. Il vous dit-il quelque chose?" Interrogea t-il, en se tournant vers Lily-Rose.

L'un des serveurs, habillé d'un veston rouge et d'un pantalon noir, vint aussitôt s'occuper d'eux lorsqu'il s'aperçut de leur arrivée. Ludvig demanda une table en terrasse et donna à nouveau un pourboire garçon qui l'accepta avec un sourire affable avant de les mener tout deux à une table isolée sur le bord droit de la terrasse. L'endroit était parfait pour contempler Baker Beach et le Golden Gate.


Ludvig resta un moment debout à contempler le panorama.

"Je ne connais pas de plus belle vue... Enfin si, mais les autres, je ne peux pas les atteindre de cette manière..." Ajouta t-il avec un sourire mais il n'était pas sûr que Mask ait comprit l'allusion à son pouvoir. Après tout, elle venait à peine de le copier.

Toutefois, Lily-Rose et lui n'étaient pas venus pour faire du tourisme et il l'invita donc à s'asseoir, pour poursuivre la discussion précocement interrompue.

Lily-Rose trouvait la situation quelque peu étonnante, même si elle y participait de bonne grâce et causait avec cet étranger comme s'ils étaient de vieilles et vagues connaissances. Elle l'observa s'occuper de tout : payer le taxi, qui sembla très content, arranger leur arrivée dans un établissement agréablement distingué. Mask parcourut des yeux le décor et fouilla en vain sa mémoire insatisfaite.

"Non ce n'est pas celui auquel je pensais ... celui-ci est très bien."

C'était tellement loin qu'elle ne se souvenait même pas du nom. De vagues images de bancs et de tables, de faux palmiers, de spots de lumière, d'un paysage balnéaire nocturne ... lui revenaient mollement à l'esprit.

La baie surtout lui évoquait des sensations lointaines, une nostalgie fugace. Elle remarqua du coin de l'œil que Ludvig prenait le temps de la contemplation du paysage. Cet homme ne l'avait pas amenée n'importe où, et il maîtrisait l'étiquette et toutes ces bonnes manières mondaines. Un vrai gentleman. Travaillait-il dans la "haute société" de son pays lointain ? Dans le monde des affaires, sans doute. Un milieu que Lily-Rose n'avait jamais fréquenté. Elle sourit à sa remarque faussement innocente.

"Vous avez beaucoup voyagé, de cette manière ... ?"

Interrogea-t-elle tout en s'asseyant sans se presser, prenant soin de lisser les plis de sa jupe. Elle plongea son regard dans le sien avec une lueur finaude qui en disait long sur la portée de sa question. Autant entrer dans le vif du sujet. Mask était heureuse de vivre un moment de détente - tandis que les pauvres élèves exténués se contentaient d'un sol dur et de sandwichs au curry - mais elle ne pouvait perdre de vue le mystère inquiétant de la situation. Ludvig semblait un homme charmant et cordial, mais il était aussi mentaliste, entre autres facultés. Elle soupçonnait qu'il convoitât le Cerebra. Il avait très bien pu obtenir ces renseignements en les espionnant. Et il avait pu faire cela d'assez loin pour que ni Walentyn ni elle ne se doutent de quoi que ce soit. La situation était donc, d'un certain point de vue, dramatique. Elle pouvait presque sentir le regard de braise, chargé de coutelas, que porterait Walentyn lorsqu'il aurait connaissance de l'affaire.

Mask joignit ses mains fines et usées devant elle, tournant machinalement une discrète alliance.

"Qu'est-ce qui vous amène auprès de nous, Ludvig ? Outre l'amour du prochain ?"

Elle sourit d'un air entendu. Il n'était pas impossible que l'homme soit simplement curieux, et veuille rejoindre des frères de gène qu'il aurait détecté au hasard de ses "pérégrinations" mentalistes. Mais elle n'y croyait guère. Si ça avait été sa motivation, il aurait rapidement rejoint les UMS et ses Pères Fondateurs.

Ludvig s'assit, une fois que Lily-Rose se soit elle-même installée. Elle avait comprit la référence et il répondit à sa question d'un air vague:

"Oui, beaucoup à mes débuts. Trop peut-être, je ne sais pas, je n'ai pas de point de comparaison. Aujourd'hui, un peu moins mais il n'arrive pas un seul jour sans que cela ne m'arrive."

Le regard du Norvégien se posa imperceptiblement sur l'anneau avec lequel Lily-Rose jouait ; une alliance très certainement... Ludvig était relativement surpris car il n'avait jamais songé qu'une femme de sa trempe soit mariée. En effet, il n'avait pas menti à Lily-Rose, ses investigations mentales avaient toujours été superficielles dans le but de respecter la vie privée de chacun. Ils ne savaient donc pas grand chose de cette femme, tout comme de ses coéquipiers et des élèves du Old School.

La question de Mask le sortit de sa torpeur et Ludvig fixa son regard sur elle, prêt à débuter. C'est le moment que choisi le serveur pour s’enquérir de la commande.

"Un martini...blanc pour moi, s'il vous plait." Répondit-il sans la quitter de yeux.

Une fois que Lily-Rose eut commandé et que le serveur soit parti pour préparer sa commande, il put commencer:

"Mes motivations vous paraîtront peut-être obscures et seule ma sincérité sera en mesure de vous prouver leur véracité. Toutefois, il me semble que l'un de vos coéquipier à les moyens de savoir si je mens... Je me soumettrais bien volonté à un test pour que vous soyez assurés de mon honnêteté. J'ai conscience que vous ne voulez pas vous engager avec n'importe qui et à votre place, j'agirais de la même manière que vous: avec prudence."

Sur ce, le serveur vint déposer sa commande, accompagné d'un petit plat remplis de toasts aux couleurs vives et aux allures appétissantes. Ludvig, le tendit vers son interlocutrice pour l'inviter à se servir puis il enchaîna:

"Depuis mon enfance, j'ai toujours été très empreint d'un sentiment de devoir envers les autres, d'une sorte de nécessité d'aider mon prochain. La découverte de mon don n'a fait qu'amplifier ce sentiment et certains évènements de ma vie m'ont encouragés en ce sens... J'étais certain que mon don ne m'avait pas été accordé par le Créateur par hasard et qu'il me fallait m'en servir pour des causes justes... Loin de moi l'idée de me sentir investi d'une mission sacrée ; seulement, je pense que comme j'ai reçu plus, je dois donner plus et cela passe par l'aide de mon prochain. Je crois savoir que c'est un sentiment que vous partagez... Ce qui fait de vous, la personne du Old School, la plus à même de me comprendre..." Le hasard ou plutôt Dieu faisait bien les choses et il était heureux que ce soit Lily-Rose qui l'ait accueilli à Graymalkin Industries. "C'est ainsi qu'il y a deux ans, j'ai décidé de mettre en pratique beaucoup plus concrètement mes idées, afin de faire du bien aux gens qui en ont besoin. Dans cette optique, je me suis installé à Toronto et j'ai repéré avec mes moyens d'action, les lieux, les populations et les situations nécessitant une aide et Dieu sait s'il y en a! J'ai dans un premier temps engagé des sortes de mercenaires pour accomplir différentes missions mais ils ne réussissait pas toujours et il m'en fallait beaucoup pour réussir. Je me suis donc tourné vers les porteurs du gène X en engageant, deux voir trois mutants, beaucoup plus efficaces que de simples soldats mais la plupart ne partagent pas ma vision des choses et n'effectuaient qu'une ou deux missions pour disparaître ensuite. Ils étaient rémunérés mais cela ne leur suffisait pas et j'ai vite compris que les mutants sont souvent plus soucieux de se cacher et de vivre une vie -dite normale- que d'utiliser leurs dons pour aider une humanité qui les rejette..." Ludvig marqua une pause où il but une gorgée de son martini.

Expliquer toutes ses motivations à Lily-Rose étaient beaucoup plus complexes qu'il ne l'avait imaginé, mais au moins il savait qu'il s'adressait à une personne réfléchie et sensible et c'était déjà beaucoup.

"Cela fait maintenant six mois que je recherche activement des mutants susceptibles de m'aider pour ce genre d'opération délicate. Et, il y a moins d'une semaine, je vous ai trouvé... J'ai décidé de vous suivre dans tous les sens du terme et j'ai été agréablement surpris par votre organisation. Tous différents mais unis pour une lutte commune..." Remarqua Ludvig d'un air songeur. "J'ai trouvé et je trouve toujours cela très noble de votre part, surtout des plus jeunes qui s'engagent dans un combat extrêmement difficile et risqué. Je me demandais donc si vous accepteriez un léger surplus de travail..."La voix de Ludvig se faisait assez basse pour être certain que personne ne les entende.

Fort heureusement, leur table était assez isolée et un groupe de musicien dont un pianiste venait de débuter un air de jazz qui assurait amplement une grande discrétion à chacune des tables. Dans un autre contexte, la situation aurait été très amusante pour Ludvig qui écoutait la légèreté du morceau avec un sourire, tout en observant Lily-Rose.

"Très sympa cette musique, vous ne trouvez pas?" Interrogea le Norvégien.

Il avait dit le plus important et désormais il jugeait préférable de détendre l'atmosphère en attendant la réaction de Mask. Mais en son for intérieur, Ludvig appréhendait ce moment qui pourrait largement déterminer de la suite des évènements quant à ses activités...

Lily-Rose se demanda si elle avait raison de penser que le mutant en face d'elle lui ressemblait sur pratiquement tous les points qu'il abordait. En fait seul le choix de la boisson différait de ses goûts.

"Une bière, Samuel Adams blonde si vous avez."

Répondit-elle au serveur avant de reporter toute son attention sur le récit de Ludvig. Dès qu'il eut terminé elle cligna des yeux et arqua les sourcils. La musique était d'avantage de nature à la déconcentrer qu'à la détendre mais elle acquiesça d'un vague hochement de tête à la question du germanique. Elle enchaîna ensuite.

"Je comprends parfaitement votre démarche, et je l'approuve, bien entendu. C'est celle que le Seigneur nous pousse chaque jour à entreprendre non ? En réalité, je ne pensais pas que des hommes comme vous existaient encore Ludvig."

Dit-elle avec un sourire amusé, songeant qu'elle tenait devant elle l'antithèse parfaite de l'immoral et égocentrique Walentyn Szatanik. Cette brute épaisse qui n'hésitait pas à frapper par surprise une faible doyenne. Ludvig avait tout du gentleman éclairé, altruiste et bienveillant. Ah si seulement c'était lui qu'elle avait recruté à Londres, Emily aurait eu un meilleur protecteur et modèle à son bras que ce voyou polonais.

"Mon coéquipier sera ravi de vous tester sans vous en demander l'autorisation. Comme vous il est très entreprenant dans son domaine."

Ajouta-t-elle, surprise d'avoir mis le doigt sur le seul point commun entre les deux hommes. Elle se remémora les paroles de son vis-à-vis, qui lui inspiraient de nombreuses questions.

"Pardonnez-moi d'être abrupte Ludvig, mais pourquoi ne pas avoir considéré le combat des Pères Fondateurs comme une cause juste ? Ils ont sorti beaucoup de mutants de la misère et de la solitude ... Ils ont redonné espoir à beaucoup d'entre nous."

Question provocatrice s'il en était. Ludvig semblait plus intéressé par les actions ciblées d'assistance que par la politique. Il parlait comme un travailleur de l'humanitaire qui agit sur tous les théâtres pour guérir les conséquences des catastrophes sans se mêler des causes. Approche louable en soit mais dont la doyenne voulait s'assurer.

Le récit des tentatives de recrutement de "mercenaires" par ce bon samaritain amusait Lily-Rose. Elle comprenait sans effort que la plupart des mutants recrutés préféraient une vie normale ou cachée, à celle de justicier.

"En effet, il n'est pas facile de trouver du bon personnel mutant de nos jours."

Commenta-t-elle non sans ironie. Elle avait beaucoup de questions en tête mais en sélectionna déjà deux à l'importance cruciale.

"Dans quel domaine travaillez-vous, dans le civil ? Et si ce n'est pas indiscret ... avez-vous fondé une famille ?"

Alors seulement elle s'autorisa à goûter l'une des gourmandises apportées par le serveur. C'était plus fade que le pop corn over-salé qu'elle prenait jadis avec sa bière devant un sympathique match de football américain.

Au compliment de Lily-Rose, Ludvig répondit:

"Je ne pense pas être le seul homme animé de telles intentions, seulement tous n'ont pas les moyens que j'ai..." Il sourit et expliqua: "Notre caractère mutant nous offre bien des avantages en fin de compte..."

Ludvig était ravi de constater que la réaction de Mask à ses intentions était plutôt positive. Elle comprenait son idéologie puisqu'elle la partageait et cela facilitait grandement les choses. Lily-Rose fit mention de Walentyn et des vérifications qu'il n'hésiterait pas à faire. Ludvig ne s'était jamais opposé à un télépathe directement mais il était presque certain qu'il ne ferait pas le poids contre celui-ci et dans tous les cas, le Norvégien n'avait aucunement l'intention de s'opposer à lui, bien au contraire.

"Ça ne me posera aucun problème, Walentyn pourra fouiller mon esprit...dans la limite du raisonnable..." Précisa le mentaliste. Il n'était pas non plus question que ce parfait inconnu fouille sans vergogne dans les moindre recoins de son passé.

Réagissant, au monologue de Ludvig, Mask le testa l'interrogea au sujet des Pères Fondateurs et de leur combat. Prenant une mine plus grave, le mentaliste expliqua:

"L'objectif de leur combat est à la limite juste mais les moyens employés ne le sont pas et c'est tout le problème. Leur attitude littéralement machiavélique remet en cause toute la légitimité de leur lutte, j'ai vu ce dont ils étaient capables pour convaincre des gens, j'ai vu comment ils s'imposaient, j'ai vu la manière dont ils traitaient ceux qui ne partagent pas leur point de vue..." Ludvig marqua une pause, comme un hommage silencieux à la destruction du Old School. "Une telle révolution des mentalités au sujet des mutants -si elle doit avoir lieu- doit se faire en douceur pour mener à quelque chose de valable. Aujourd'hui, les Pères Fondateurs n'ont fait qu'aggraver la situation et les mutants sont de plus en plus déconsidérés par l'action d'une poignée."

Lily-Rose enchaîna alors sur le problème du recrutement mutant, offrant à Ludvig une transition toute trouvée:

"Oui pas facile du tout et ce ne sont pas les Pères Fondateurs qui nous y aide. Ils recrutent eux aussi de leur coté avec des arguments de choc..."

Prenant un toast, Ludvig l'enfourna dans sa bouche et déglutit alors que son interlocutrice poursuivait sur ses questions. Le Norvégien porta son verre à ses lèvres pour faire passer le goût du toast aux œufs de lump qu'il n'appréciait vraiment pas, lui offrant le temps de la réflexion pour répondre à ses deux questions.

"Non, je ne travaille pas dans le civil... En réalité, je ne travaille pas actuellement. J'ai fais des études de sciences politiques et j'ai été diplomate pendant plusieurs années, j'ai côtoyé ceux que l'on appelle les "grands de ce monde" mais je ne faisais pas ce que je voulais... Je n'avais pas de moyens d'action suffisamment concret... C'est pourquoi, je me suis installé à Toronto où je participe désormais à des opérations "d'aide" à travers le monde. On peut dire que je suis un humaniste et c'est un travail à plein temps..." Acheva Ludvig avec un léger sourire.

La seconde question de Mask était plus personnelle et éveilla des souvenirs douloureux. Ludvig ne parlait jamais d'elle, car même si cela faisait déjà longtemps, elle était toujours là.

"J'ai été marié, il y a quelques années. Je ne le suis plus." Se contenta d'ajouter le mentaliste en observant le plat de toasts colorés."Je suis libre de toutes attaches... C'est certainement mieux ainsi..." Poursuivit-il plus pour lui-même. Les voix du Seigneur sont impénétrables et clairement le mentaliste s'était fait une raison. Il ne voulait plus regarder le passé mais se tourner vers l'avenir désormais.

"Et vous Mask, avez vous une famille en dehors du Old School?" Le regard du mentaliste se porta distraitement sur l'anneau que portait son interlocutrice.

"J'ai aussi oublié de vous mentionner: si vous acceptez de faire participer vos élèves à mes "missions humanitaires", je serai ravi de pouvoir vous aider en retour d'une quelconque manière que ce soit par exemple, il est tout à fait possible de leur attribuer une rémunération s'ils le désirent..." Précisa Ludvig avec sérieux. Après tout: tout travail méritait salaire.

Lily-Rose était très satisfaite du résultat de son test concernant les Pères Fondateurs mais elle commençait vraiment à croire que Ludvig s'était préparé à l'entrevue. Comment pouvait-il être si parfait sur tous les plans ? C'était trop beau pour être vrai.

"Walentyn a une conception toute personnelle des "limites" et du "raisonnable", mais je suis sûre que vous arriverez tous les deux à un arrangement."

Elle n'en dit pas plus, désirant laisser aux deux mentalistes le soin de se tester mutuellement ou de ne pas le faire. De toute façon, Walentyn aurait une piètre opinion de Ludvig dès que la doyenne en parlerait de manière positive. Ce qu'elle avait évidemment l'intention de faire.

"Vous avez également observé les Pères Fondateurs ? Oui ils ont du mal à accepter la contradiction, mais certains sont plus fins que d'autres. Il nous faudra en tout cas du temps pour effacer les traces de leur passage."

Lily-Rose se surprit elle-même à dire "nous" si vite. Ludvig était déjà considéré comme un allié alors qu'Emily et Walentyn n'étaient pas au courant de son existence et encore moins de ses plans ? En même temps, son jugement de mutante vénérable était plus sûr que ceux des deux jeunes gens réunis, le passé récent l'avait prouvé. Autant se faire confiance à soi-même. Elle avait également fait confiance à Hermès, certes après un petit sondage télépathique.

Comme il en venait aux questions plus personnelles, Lily-Rose écouta attentivement tout en s'aventurant à goûter un toast garni d'un pâté rose appétissant. L'homme était bien un familier de la haute société, des cercles dirigeants même. Un monde inconnu de la métamorphe, qui n'avait occupé que le bas de l'échelle chez les Pères Fondateurs. Ludvig devait avoir de sacrées relations un peu partout sur le globe. Au moins autant de relations que Walentyn dans les égouts de Londres ou Emily dans les conférences confinées des architectes.

"Vous n'avez donc plus de relations professionnelles, plus aucune allégeance ou obligation ? Dans quel pays serviez-vous, si ce n'est pas indiscret ?"

Lily-Rose but une généreuse gorgée de bière, histoire de faire passer l'indiscrétion de la question. Mais ce n'était rien comparé à la suite. Sa curiosité naturelle brilla dans son regard quand Ludvig évoqua, non sans une émotion contenue, son statut marital. La doyenne recula le buste et observa le "jeune homme". Il bottait en touche ... soit. Elle sourit.

"Oui, Dieu m'a donné une épouse et trois enfants. Et Dieu soit loué, les enfants sont grands et vivent leur vie humaine. Mes affaires mutantes m'ont éloigné d'eux bien sûr, mais on se téléphone."

Résumé rapide et concis qui occultait toutes les complications, mais elle en transmit l'idée à son interlocuteur par un sourire un peu navré. Son regard dévia quelques instants sur le paysage magnifique de la baie, puis elle laissa filtrer un léger soupire amusé.

"Ludvig, si nous devons travailler ensemble, et pour être honnête je dois d'abord en parler à mes deux compagnons, si nous devons travailler ensemble ... vous ne serez plus un homme sans attaches."

Elle appuya son sourire ponctué d'un regard rieur.

"On s'attache très vite à ces enfants. On se retrouve à trembler pour eux chaque jour que Dieu fait. S'ils vous aident ponctuellement, alors oui peut-être que vous n'aurez pas d'affection particulière, mais j'en doute."

Comment ne pas être attendri par ce poupon de Malo, cette épave de Flesh, cette trublionne de Roxie ou cette ingénue de Clara. Elle se frotta négligemment le menton avant d'adresser un regard incisif à Ludvig.

"Et il y a aussi des jeunes filles, des adolescentes, voire de jeunes adultes. Si elles savent que vous êtes seul, "sans attaches" ... ma foi ce sera à vos risques et périls."

Dit-elle en songeant à la beauté des jeunes filles en fleur de leur bande de nouveaux X-Men. Une certaine Russe avait en plus une véritable formation professionnelle pour mettre les hommes sous sa coupe (ou sous sa croupe ...) et une certaine Sud-Africaine avait le don de se mettre nue en public aussi ... Mais Mask faisait cent pour cent confiance à cet inconnu pour ne pas abuser de la situation ... tout en sachant que les roses mutantes avaient des épines bien à elles.

Elle sourit malgré elle et but un peu de bière pour chasser les images amusantes qui lui venaient à l'esprit. Elle secoua ensuite la tête.

"Non Ludvig c'est inutile, concernant la rémunération, ce sont des jeunes gens animés par la cause qu'ils défendent. Ils ne voudront pas recevoir d'argent et je pense que ce n'est pas une bonne idée. Par contre, offrez leur des petits cadeaux. Invitez-les à un match de foot avec vous par exemple. Les jeunes adorent ce genre de choses. Ou bien des places de concert. Ce sera largement suffisant."

Dit-elle d'un ton on ne pouvait plus assuré, occultant tout à fait le souvenir de ses propres enfants blasés par ses "petits cadeaux" trop cool. Elle posa les yeux sur les toasts et sourit.

"Ils sont délicieux."

Puis après un instant de silence ou elle caressa négligemment la surface froide de son verre.

"Excusez-moi si je suis horriblement indiscrète mais ... est-ce à cause de votre don si vous avez ... quitté votre femme ?"

Peu surpris par la singularité de Walentyn exprimée par Lily-Rose, Ludvig afficha un léger sourire. Il était convaincu lui aussi qu'il parviendrait à un point d'accord avec le télépathe. Le Norvégien avait une grande capacité d'adaptation et trouvait toujours un intérêt dans chaque personne ou du moins il s'y efforçait et Walentyn ne ferait pas exception à cette règle, tout comme les Pères Fondateurs qu'avaient mentionné Lily-Rose.

"Je les ai observer à leur début mais je n'ai pas continué... Je crains qu'une certaine Désir ne m'ait télépathiquement repéré et j'ai préféré ne prendre aucun risque sur ce terrain. Je dois vous avouer que, bien que je réprouve les activités des Pères fondateurs, je ne souhaite pas les combattre. Du moins, ils ne sont pas ma priorité. Toutefois, il m'arrive d'assister à certaines de leurs interventions pour le moins représentatives de leurs méthodes... En effet, je vous rejoins sur ce point: il est certain que les mutants auront beaucoup à faire pour faire oublier ces terroristes à la population mondiale." Reprit Ludvig qui avait ainsi interprété le "nous" de Lily-Rose.

Le Norvégien se servit alors, à la suite de la X-Woman qui poursuivit par d'autres questions auxquelles Ludvig répondit:

"J'ai toujours des relations professionnelles on va dire, dans le sens où j'organise et je gère quelques équipes d'aide humanitaire mais plus véritablement dans le sens strict du terme. Il m'arrive de rencontrer et de discuter fréquemment avec des anciens collègues et collaborateurs qui me renseignent à travers le monde mais c'est tout, je n'ai aucune allégeance envers un pays, ou une société et notamment l'Allemagne que j'ai servi durant trois ans. J'ai mis mon pouvoir au service d'un état et c'est une chose que j'ai regretté plus tard. C'est aussi l'une des raisons qui m'a incité à quitté ma place de diplomate."

Après avoir évoqué sa situation familiale, Mask fit de même, attisant la curiosité de son interlocuteur. Lily-Rose avait été mariée mais à une femme et elle avait eu des enfants! Serait-il possible qu'elle ait vécu avec un corps d'homme durant des année? Quelle étrange personnalité cette femme devait avoir... Osciller entre deux sexes, des physiques différents... Elle était l'espionne parfaite mais son pouvoir avait de quoi rendre fou... Comment était-elle à sa naissance? Fille, garçon? Son apparence actuelle était-elle la véritable Lily-Rose? Y'en avait-il seulement une?

"Vous avez dû avoir une vie extraordinaire Mask... Bien plus riche que le commun des mortels..." Ajouta Ludvig qui imaginait les multiples possibilités de son pouvoir. Car bien qu'il avait déjà songé à son utilité concrète, il n'avait jamais pensé que la métamorphe puisse l'utiliser dans sa vie personnelle... Rien qu'au niveau des expériences vécues, Lily-Rose devait avoir une mesure d'avance. "Excusez-moi mais cela m'intrigue, vous avez vécu dans la peau d'un homme et vous avez fondé une famille ainsi? Qu'êtes-vous à l'origine? Ne finissez-vous pas par vous perdre psychiquement dans toutes vos multiples métamorphoses?" Interrogea le Norvégien, fasciné par de tels pouvoirs.

Préférant se taire sur de possibles attaches affectives au sein des X-men, Ludvig aurait bien avoué son ignorance à savoir si entretenir des relations familières avec les élèves était une chose bonne ou pas. Il avait apprit que s'attacher n'était pas synonyme de bonheur mais plutôt de dépendance plus ou moins saine. Il aviserait en temps et en heure, sans chercher à repousser ou encourager ces relations avec les élèves ou les professeurs. La métamorphe alla même jusqu'à évoquer les risques d'une possible liaison au sein de l'Institut.

"Comme dans toutes relations humaines... Que ces jeunes filles soient des élèves ne changent rien. Elles restent des femmes avant tout et moi un homme. Je verrai bien si l'occasion se présente mais j'agirai dans tous les cas pour le bien commun..." Expliqua Ludvig, dans des propos assez énigmatiques. "Pas de soucis pour la rémunération, je verrai avec eux ce qui peut leur faire plaisir..."

Puis Mask après avoir jugé les amuse-gueules délicieux, demanda si le pouvoir de Ludvig était à l'origine de la fin de son mariage. Étrange question... La liaison de Lily-Rose s'était-elle achevée à cause de cela?

"Ne vous excusez pas, je trouve la curiosité légitime. Pour vous répondre, non, ce ne sont pas mes pouvoirs qui m'ont contraint à quitter ma femme ; mon épouse connaissait mes dons et trouvait que c'était un phénomène tout à fait singulier et fort intéressant à étudier. Malheureusement, elle a été tuée peu après notre mariage..." Acheva le Norvégien sur un ton impassible.

Il ne voulait pas laisser transparaître ses sentiments, pas devant une presque parfaite inconnue du moins.

"Et vous Mask, voyez-vous toujours votre épouse?" Interrogea le mentaliste pour ne pas avoir à développer sur le cas de sa femme au cas où celui-ci développerait de nouvelles questions chez son interlocutrice.

Quel dommage que Ludvig avoue ne pas vouloir combattre les Pères Fondateurs ... En l'écoutant, la doyenne s'était subrepticement imaginée accorder son congé à Walentyn pour le remplacer par ce fringuant et honnête Nordique. Ludvig était à l'évidence un homme sensé, capable de jauger les risques pour ne pas mettre sa cause en péril. Il se montrait en outre généreux et soucieux du "bien commun". Elle le jugea adulte et responsable. Elle hocha la tête et exprima un léger sourire lorsqu'il expliqua sa grande indépendance professionnelle. Quel drame que ce mutant fort capable, poli et gentleman ne soit pas intéressé par la bagarre avec les frères ennemis ...

Lily-Rose faisait honneur aux toasts raffinés, avec le même détachement que pour la dégustation de chips au bacon. L'alcool aidant elle eut un quasi éclat de rire quand Ludvig s'extasia sur sa vie "extraordinaire".

"Détrompez-vous, avant les éclats des Pères Fondateurs, ma vie fut celle de Monsieur tout le monde, certainement bien moins trépidante que la vôtre. On voit que vous n'avez pas connu l'après-Jour M, jeune homme. Pour vivre heureux, il fallait vivre caché."

Dit-elle en reposant son verre de bière déjà aux trois-quarts vide. Elle posa un regard un peu moins enjoué sur ce bon Ludvig, qui n'hésitait pas à mettre les pieds dans le plat. En même temps, c'était elle qui avait commencé avec les questions indiscrètes. La doyenne laissa son regard fuir sur la baie, et s'adossa contre son dossier dans une attitude repue.

"Que suis-je à l'origine ..."

Répondit-elle lentement en plissant ses yeux clairs, comme si elle cherchait très loin dans les tréfonds de sa mémoire. Histoire de faire mariner le curieux. Ses questions étaient à la fois naïves et provocantes. Mask était amusée, mais elle ne put s'empêcher de penser à ce monstre de Walentyn qui la traitait de folle. Elle afficha néanmoins un sourire.

"Je suis une femme. Mais comme j'étais un homme lorsque je suis tombée amoureuse, et que l'amour était réciproque, je n'ai pas voulu tout gâcher en reprenant mon corps d'origine. Avouez que ça aurait été dommage. Et grâce à Dieu, j'ai vécu de longues années merveilleuses, et fondé une famille oui. La vie m'a comblée."

Elle haussa les épaules d'un air tranquille et poursuivit sur un ton discrètement ironique.

"Je crois que ce corps est le premier, mais ce qui m'inquiète c'est qu'il ressemble beaucoup à ma grand-mère Suzy Donowho que je ne pouvais pas supporter quand j'étais adolescente ... une vraie mégère, de mon point de vue. Mais qui m'aimait beaucoup en réalité. Grâce à ce pouvoir, je peux vous assurer qu'il y a du bon en chacun de nous, Ludvig."

Expliqua-t-elle les yeux brillants, avant d'entreprendre de rassurer son vis-à-vis.

"Me perdre psychiquement, allons, bien sûr que non. Ma volonté est intacte quelle que soit l'apparence. Ce serait plutôt à moi de vous demander si vous n'avez pas parfois perdu le fil qui vous relie à votre enveloppe charnelle. Cela vous est-il arrivé ?"

Elle laissa d'ailleurs la question en suspend en prenant une avant-dernière gorgée de bière. Elle reçut comme un coup de poing au cœur quand l'impassible mentaliste révéla le sort de son épouse. Une femme qui par ailleurs, avait bien accepté le gène X de son mari ... sans doute une vraie perle rare.

"Oh Mon Dieu Ludvig, ..je suis désolée ..."

La doyenne n'eut guère le temps d'enchaîner car le diplomate faisait diversion avec une nouvelle question personnelle.

"Je vais la voir oui ... mais elle est malade. Elle perd la mémoire. A présent elle reconnaît à peine son mari et ses enfants."

Lily-Rose était intriguée. La conversation avait pris des tournants serrés dans les interstices plutôt intimes de leur vie respective. Le tragique destin de Ludvig résonnait particulièrement dans son cœur, malgré le peu qu'elle savait de lui et de sa femme. Elle en voulait à Dieu de lui avoir accordé quelque chose qu'Il avait refusé à Ludvig.

Elle se redressa sur son siège, comme prête à se lever.

"Et si nous retournions à Graymalkin ? J'ai passé un moment délicieux avec vous, cela faisait très longtemps. J'aimerais tout de même vous présenter à notre petit groupe de résistants."

Le cœur encore légèrement emballé par le tragique de la situation, elle replia ses mains devant elle en attendant la décision de son interlocuteur.

Lily-Rose considérait sa vie comme bien ordinaire mais Ludvig trouvait que -malgré son mode de vie- elle avait connu l'extraordinaire. A commencer par le jour M - comme elle se plaisait à le rappeler -, la vie d'un homme, ce qui n'était pas donné à toutes les femmes, et enfin la possibilité de devenir n'importe qui, alternant une infinité d'expériences possibles. Non, la vie de cette femme ne pouvait être ordinaire. Mask était même allée jusqu'à dire que celle de Ludvig était plus trépidante et il n'était pas non plus d'accord sur ce point: sa vie était en réalité bien simple et quelque peu cloisonnée dans des carcans, même s'il admettait volontiers qu'il avait eu des expériences uniques en leur genre. Dans tous les cas, il était lui aussi resté M. Tout le monde et avait souffert au même titre que le reste de l'humanité. C'est peut-être ce qui le rapprochait tant de la morale évangélique.

Sensible, à la reconnaissance que Lily-Rose exprimait envers Dieu, Ludvig détecta une profonde maturité chez cette femme. L'âge et l'expérience l'expliquaient sans doute. La personnalité de cette femme forçait dans tous les cas un grand respect.

La métamorphe était à l'origine une femme et ce corps était bien le sien. Elle évoqua sa grand-mère, à qui elle ressemblait trop, selon elle. Lily-Rose se considérait-elle comme une mégère? C'était une femme de poigne certes mais une mégère, sans doute pas. Songea le Norvégien avec un léger sourire, tandis que son interlocutrice évoquait à présent le bon coté que chaque être humain possédait.

"Oui, il y a du bon en chacun de nous et parmi ceux qui semblent en être dépourvu, je pense que ce coté est masqué et qu'il apparaîtra tôt ou tard.... L'évolution de l'homme prend du temps..." Ajouta le mentaliste, pensif. Il venait de reconnaître un nouveau point commun entre elle et lui. Ils partageaient tout deux cette faculté d'empathie, elle par son caractère métamorphe et lui par sa télépathie.

Manifestement, les métamorphoses de Lily-Rose n'affectaient pas sa personnalité selon elle, mais ce genre de chose était tellement complexe que la métamorphe n'était pas forcément à même de s'en rendre compte. Avoir vécue dans la peau d'un homme modifiait certainement sa façon de penser et de voir le monde ; cela influait donc sur sa personnalité, la rendant plus tolérante par exemple... Pensa Ludvig en détaillant la vieille femme. Elle retourna alors la question à son interlocuteur qui répondit:

"Ça ne m'est jamais arrivé... A ma connaissance, ce lien est...indestructible. Seulement, il est plus ou moins...souple et si on force trop, il agit aussitôt comme...un élastique, et la forme psychique réintègre le corps. A force d'entrainement, je parviens désormais à voyager psychiquement à travers le monde sans difficultés. L'espace est aussi atteignable, jusqu'à une certaine limite..." Explicita Ludvig qui cherchait ses mots pour exprimer des sensations aussi singulières.

L'aveu de Ludvig sur la mort de sa femme semblait avoir sincèrement touchée Lily-Rose, mais la question du mentaliste la contraignit à ne pas s'épancher sur le sujet et c'est ce qui convenait au jeune homme, il ne voulait pas être plaint. Elle évoqua alors l'amnésie de son épouse et le Norvégien compatit avec sincérité:

"Je suis sincèrement désolé... Les maladies mentales sont souvent plus douloureuses pour la famille que la mort elle-même... J'ai beaucoup d'admiration pour ceux qui entourent le malade ; ils font souvent preuve d'une grande abnégation: ils sont - à mes yeux - des modèles de conduite..." Avoua le Scandinave.

Il appréciait véritablement la simplicité de la conversation qu'il entretenait avec Lily-Rose : ils avaient tous les deux abordés des pans intimes de leurs vie alors même qu'ils venaient de faire connaissance, surtout pour Lily-Rose qui ignorait tout de Ludvig. Ce dernier appréciait réellement la confiance qu'elle avait placée en lui..

Se redressant, Mask proposa alors de rejoindre Graymalkin afin qu'elle fasse les présentations avec les élèves. Ludvig reçut cette invitation comme une nouvelle preuve de la confiance de Lily-Rose et, reconnaissant, il répondit:

"Avec grand plaisir, j'ai moi aussi partagé un excellent moment: vous êtes d'une compagnie très agréable Lily-Rose..." Admit l'ancien diplomate sans se départir de son sourire. "Ça ne vous dérange pas que je vous appelle ainsi? Je préfère cela à Mask..." Indiqua t-il avec franchise.

Puis le Norvégien vida d'un trait le fond de son verre et composa le numéro du taxi qui vint quelques minutes plus tard les cueillir devant le Golden Bar pour rejoindre le repaire des X-men.

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En écoutant le récit de Ludvig sur son pouvoir singulier, Lily-Rose décida qu'elle ferait un petit essai le soir-même, afin de se rendre compte. Son pouvoir lui permettait de connaître à fond ceux des autres et elle n'allait pas ignorer ce cadeau de Dieu. Elle hocha donc la tête d'un air entendu.

La doyenne apprécia la sincère compassion du germanique à l'égard de la triste situation de Charity. Malheureusement, cet homme avait raison, les vrais modèles de conduite étaient ceux qui étaient présents auprès de la malade, malgré toutes les peines que cela pouvait occasionner. Et Mask n'était pas de ceux-là.

"Vous êtes quelqu'un de bien Ludvig. Oh en privé vous pouvez m'appeler par mon prénom de jeune fille, je n'ai rien contre. Mais dans le cadre professionnel, je ne réponds qu'à mon nom de scène. C'est une petite coquetterie que vos pères et grands-pères mutants ont inventé pour flatter leur égo. Il faut respecter ces traditions. Soyez indulgent, j'étais adolescente quand j'ai choisi ce nom de code."

Dit-elle avec un sourire, tout en se dirigeant avec son comparse vers la sortie du sympathique Golden Bar. Le taxi ne tarda pas à se présenter et alors qu'elle s'installait sur la banquette arrière, Lily-Rose eut un drôle de pressentiment. Comme un pincement au cœur. Avait-elle eu tort de s'absenter de Graymalkin, même pour une si courte entrevue ? Quelque chose s'y passait-il ? Ou bien, était-ce le sort tragique de la femme de Ludvig qui la travaillait ? Comment avait-elle pu déballer sa vie devant un homme si parfait et si meurtri par le destin ? Elle qui avait négligé une vie heureuse en famille pour une vie anonyme de super-héroïne ... alors que cet homme avait été privé du bonheur familial et agissait dans l'ombre pour aider ses semblables ... S'il l'un des deux mutants était un saint, il n'y avait pas photo.

Alors que la route défilait, Lily-Rose décida de se tourner vers le Norvégien, d'un air grave.

"Ludvig je ne veux pas vous importuner mais, était-ce un accident ? Ou bien ..."

En présence du chauffeur de taxi il était indécent d'être plus explicite, mais la doyenne voulait éclaircir ce point. Il venait de lui traverser l'esprit que Ludvig pouvait vouloir l'aide de mutants pour régler des comptes avec le meurtrier de sa femme ... Les implications seraient trop grandes pour qu'elle ne soit pas au courant dès le départ.

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