01.01/25.C.Saint Petersbourg, Russie - Sortie de partiels

"Posez les stylos!"

Fin de l'épreuve écrite de Pneumo-phtisiologie. Thème du partiel: les pathologies cliniques. Un sujet vaste pour lequel la jeune polonaise ne s'inquiétait pas. C'était sa dernière épreuve de la journée. Maintenant, elle n'avait plus qu'à se préparer pour la soirée de ce soir. Et la jeune femme avait hâte d'y être. Etre sérieuse, c'était bien, mais savoir s'amuser, c'était mieux. Même si cela lui occasionnait quelques migraines. L'avantage, pendant les partiels, c'était que les seules pensées qu'elle captait c'était des pensées studieuses sur: comment répondre à telle ou telle question. Hormis un ou deux qui pensaient plus à la cuite qu'ils s'étaient payés la veille et à la pauvre fille à laquelle ils avaient été peut-être infidèles avec un homme, en plus! En captant cette pensée, elle avait bien failli mourir de rire. Mais le cancer bronchique primitif était loin d'être drôle. Aussi avait-elle gardé un sérieux imperturbable. Néanmoins, l'idée d'imaginer un gros tas avec un jeune éboueur qui noyait son chagrin de n'avoir pu trouver que ce boulot là alors qu'il avait un bac + 5 de chimie, c'était, vraiment, pathétique.

Kal' posa son stylo et attendit sagement que le surveillant ramasse sa copie pour se lever. Enfin! Elle avait terminé! Plus que la journée du lendemain, et le semestre serait terminé. C'était une bonne, une très bonne, une excellente chose. Non pas qu'elle s'en fasse pour ses résultats. Bien au contraire. Sans nul doute finirait-elle encore major de promotion. Ou pas loin en tout cas. La jeune femme haussa les épaules à cette idée et se dirigea vers la sortie de la pièce en récupérant son sac au passage. Maintenant que l'examen était terminé, les pensées autour d'elle se multipliaient. Elle se précipita vers la sortie. La soirée de ce soir serait, sans aucun doute, nettement plus simple.

"Hey! Kallan!"

Et merde... Pas lui... Son ex. Kallan leva les yeux au ciel, une nouvelle fois et se tourna vers celui qui avait tenu à peine plus d'une semaine. Comme la plupart de ses relations, à dire vrai.

"Tu veux quoi encore, Alexei? Je t'ai dit que je ne voulais plus te voir, pourtant... Tu sais que je m'en fous de toi, comme de ma première couche culotte..."

Ok, elle était un peu dure. Mais à dire vrai... Hormis d'être le style parfait escort boy, ce type n'avait rien pour lui. Rien dans la tête, tout dans les muscles. Après une soirée, il lui avait donné envie de mourir. Mais il fallait reconnaître qu'il présentait bien. Même s'il ne serait sans doute jamais rien d'autre qu'un brancardier. Et encore... Uniquement celui qui conduisait le véhicule. La veille encore, elle avait dû lui réexpliquer pour la énième fois au moins les gestes de premier secours. Autant dire qu'il n'avait qu'un petit pois en guise de cerveau...

Sans attendre davantage, la jeune femme se retourna pour se diriger vers la cité universitaire et se préparer en vue de la soirée de ce soir là. Ce qu'il pouvait avoir à lui dire lui importait peu. Très, très, très peu.

Manque de chance pour Alexei, Kallan n'en avait strictement rien à faire de le blesser ou non. Elle se fichait de l'égo du jeune russe comme de l'an 40. La polonaise n'avait jamais réellement perdu son accent lorsqu'elle parlait russe. Mais, pour le coup, c'est tout un chapelet de grossièretés en polonais qu'elle lâcha. Des injures concernant Alexei, et concernant les messagers en règle générale, et contre la drogue également. Sans même lui jeter un regard, elle lâcha acerbe:

"Tu m'as l'air de drôlement bien savoir ce qu'il y aura à cette soirée... Ou du moins, de drôlement bien le présumer. Pourquoi?"

Cette fois, par contre, elle daigna lui jeter un regard, clairement dédaigneux, mais bel et bien soupçonneux, alors qu'elle plongeait dans les méandres de l'esprit du jeune garçon, se doutant qu'il ne lui dirait rien de lui-même à ce sujet-là.

"Tu ne serais pas un peu mêlé à tout ça?"

Non pas qu'elle s'en soucie réellement. S'il se fichait dans la merde, c'était son problème. Mais si elle, elle se retrouvait dans les emmerdes jusqu'au cou, c'était une autre paire de manche. Mais une chose, néanmoins, la dérangeait dans cette histoire d'être prévenue par son ex:

"Tu y gagnes quoi, toi, dans cette histoire? Tu te dis que tu resteras encore un peu mon dernier ex en date? Ou bien que je te serai redevable de quoi que ce soit? Je suis assez grande pour prendre soin de moi toute seule..." acheva-t-elle en se stoppant et en faisant volte-face brusquement.

La longue jupe qu'elle portait par dessus ses bottes fourrées à talons larges voleta autour d'elle. Elle pointa son doigt sur la poitrine du russe avant d'ajouter, martelant chaque mot:

"Tu es du passé. De l'histoire ancienne. Un souvenir, relativement bon, moins mauvais que d'autres, en tout cas. Si c'est pure générosité de ta part, je te remercie. Si c'est un mensonge calomnieux pour espérer obtenir quelque chose de moi, tu te fourres le doigt dans l'oeil, et bien profond..."

Peut-être avait-elle exagéré quelque peu. Elle avait été dure, il était parti blessé. Si elle avait été plus humaine, elle l'aurait sans doute rattrapé. Mais d'humaine, elle n'avait que le nom. Elle ne se sentait pas réellement humaine. Trop différente de ces humains là. Son humanité, elle la partageait avec sa mère. Mais c'était tout. Elle se sentait bien incapable de ressentir quoi que ce soit pour qui que ce soit.

"D'Ivan et Mateusz..." murmura-t-elle pour elle-même.

Deux gars fêtards. Très fêtards. Mais s'il devait y avoir de la drogue à la soirée, elle n'avait pas envie d'être mêlée à ça. Toujours était-il qu'il avait, visiblement, voulu l'aider et pas autre chose. Kal' poussa un soupir et sortit son portable. C'était des choses qui se faisaient. Plantée dans le couloir, elle l'ouvrit pour envoyer un sms. Un simple: 'Désolée pour ma rudesse' Il n'y avait rien d'autre à dire. C'était le mieux qu'elle puisse faire, de toute façon. Une chose était sûre et certaine, elle n'était pas une jeune femme très chaleureuse. 'Je n'irai pas' finit-elle par ajouter au piètre début de son message.

Elle irait ailleurs, et puis voilà. Tant pis pour la soirée étudiante. Ca lui donnerait l'occasion de "pécher" dans d'autres sphères. Ailleurs qu'en médecine. La jeune femme haussa les épaules pour rentrer chez elle, à la Cité U. L'avantage d'être sur place, c'était qu'elle n'avait pas à prendre le métro. Même si... Elle devait diner chez sa mère, ce soir... Elle poussa un profond soupir à l'idée de ce passage obligé par le métro russe. Elle avait les transports en commun en horreur. La puanteur, la foule toujours trop importante, les personnes qui braillent fort, bref. Quant à un potentiel changement d'avis concernant la soirée, elle verrait plus tard. Quand le moment se présenterait. Pour l'instant, regagner son petit appartement qu'elle partageait avec deux autres étudiantes, et voir si elles comptaient aller à la soirée.

Enfin rentrée! Kallan se plaqua contre la porte d'entrée du petit appartement, histoire de pouvoir souffler avant de se mêler à la vie de l'appartement. Pour l'instant, ça allait. Bon, allez. Direction la chambre. Et là, ce fut le drame... Asia en pleine crise de modélite aigüe. La benjamine de l'appartement était gentille, pas bête, mignonne, mais en terme de mode, c'était une catastrophe. Kal ne put s'empêcher de penser pour à énième fois qu'au collège-lycée, elle devait être la petite boulotte de la classe avec des grosses lunettes toutes rondes. Mais elle avait bien changé aujourd'hui. Elle était tout à fait au goût de Kallan, qui s'était cependant promis de ne rien faire avec ses colocataires, tant elle voulait préserver au maximum le calme des lieux. Esfir rappliqua rapidement. Elle non plus n'était pas mal. La psychologie, ce n'était pas tout à fait au goût de Kal, mais l'aînée de la chambrée était aussi tout à fait plaisante. Mais non. Comme pour Asia, hors de question de semer le trouble dans l'appartement.

"Je vais régler la crise, ne t'inquiète pas..." fit-elle à l'adresse de la jeune femme qui retournait finir de se maquiller.

Elle se retourna vers Asia, jugeant d'un oeil critique les vêtements empilés sur son lit.

"On croirait que tu veux aller au carnaval de Ryo, comme ça..."

Ouch... Kallan et sa diplomatie coutumière. Ses critiques étaient rarement tendres. Mais elle était ainsi. Et il fallait l'accepter. Elle attrapa les vêtements d'Asia dans une main, celle de la jeune étudiante dans l'autre, et embarqua la jeune fille dans la chambre de cette dernière pour fouiller son armoire et trouver des vêtements qui iraient bien ensemble et pourraient convenir à une soirée.

"Hmmmf... Je reviens..."

Le fait était qu'elle visualisait tout à fait le genre de vêtements que la petite poupée de l'appartement pouvait porter, et qu'elle les avait dans son armoire. Enfin... Sauf pour le haut, qu'elle savait en possession de la jeune fille. Elle revint rapidement dans la chambre, une petite jupe en jean et un legging noir s'arrêtant sous le genou à la main.

"Tiens. Essaye ça pendant que je cherche ton petit haut noir à col ballerine et manches trois-quart qui te va à ravir...

Asia semblait du genre ultra enthousiaste. L'enthousiasme. Voilà une chose que Kallan avait parfois bien du mal à saisir, tant elle se sentait étrangère à tout ça. Mais bon. Malgré tout, elle était contente de voir sa jeune colocataire aussi enjouée. Ca, c'était un fait. Elle resta dans la chambre d'Asia après le départ de celle-ci pour la salle de bains, sans prêter attention à l'arrivée d'Esfir dans la chambre. Arrivée qui la fit d'ailleurs sursauter.

"Je vais y aller, oui. Je devais diner chez ma mère ce soir, mais bon. Tant pis. J'irai demain. Par contre... Alexei est venu me voir, à la sortie du partiel. Il a entendu Ivan et Mateusz parler de drogue en circulation à la fête de ce soir. T'en pense quoi, toi?"

Autant ne pas parler de tout ça devant Asia. Celle-ci risquant fort de sortir de la salle de bains à tout moment, Kal' entraîna Esfir vers sa chambre, pour se changer en même temps qu'elles discutaient. La blonde n'était pas pudique. Donc, ça ne la gênait pas. Elle sortit de son armoire un pantalon droit blanc, ainsi qu'un bustier de la même couleur, sans bretelles. Elle les enfila, après avoir enlevé ses vêtements du jour, se contentant de tourner simplement le dos à Esfir lorsqu'elle se retrouva en sous-vêtements et enleva le soutien-gorge qui se serait vu comme le nez au milieu de la figure sous son bustier. Elle en attrapa rapidement un sans bretelles également qu'elle enfila avant de mettre le bustier. En guise d'accessoires, elle prit une large ceinture noire, ainsi que des bottes en cuir noir à bout pointu et à talons aiguille et se retourna vers Esfir.

"Alors? Que penses-tu de toute cette histoire? Et oui, je sais... C'est très blanc... Mais j'aime le blanc."

Il ne lui restait plus maintenant qu'à se maquiller. Et à prévenir sa mère que ses plans pour la soirée avaient changé.

Parfaite comme d'habitude. Oui. Kall esquissa un sourire à ce compliment. Ce n'était pas vanité que de dire que oui, elle s'habillait bien comme d'habitude. Elle adorait la mode, après tout. Surtout le blanc qui était très chic. Et un symbole de pureté. Bien qu'elle ne soit plus pure au sens biblique du terme, et ce depuis longtemps déjà. La jeune femme esquissa un sourire à l'adresse d'Esfir. Oui, les soirées de Vlad étaient célèbres. C'était le moins que l'on pouvait en dire. Dans des décors souvent somptueux. Mais une chose était sûre. Ce n'était pas avec deux colocs fêtardes qu'elle allait tenir les propos qu'elle avait mis à Alexei par sms. Mais si au moins ça pouvait le rassurer, c'était toujours ça.

Elle marqua un temps d'arrêt. Vouloir rassurer Alexei? Elle en aurait éclaté de rire si elle avait été seule. Non. Le rassurer, elle s'en moquait. C'était plus Se donner bonne conscience après la façon dont elle lui avait parlé qui était important pour elle. Là, déjà, on était plus proche de la vérité que précédemment.

Elle ne répondit pas à Esfir, n'étant pas non plus ultra bavarde à la base. Quand bien même l'aurait-elle voulu, un grand bruit dans la salle de bains la fit se retourner. Grand bruit suivi d'un cheptel de jurons et d'une accusation à Esfir avec la voix d'Asia. C'était vrai que concernant les produits de beauté, l'aînée de l'appartement était parfois un peu bordélique. A nouveau, Kal garda le silence tandis que la concernée répondait à Asia avant de se retourner vers elle.

"Oh... Je verrai sur place s'il y a quelque chose d'intéressant..." répondit-elle comme si elle allait faire son marché.

D'ailleurs, c'était plus ou moins le cas. Elle se dirigea vers sa commode, sur laquelle s'entassaient ses propres produits de beauté et attacha rapidement ses longs cheveux blonds avec un crayon de papier le temps de se maquiller. Légèrement, mais avec quelques paillettes au coin des yeux pour faire ressortir ses iris. Du mascara, un gloss brillant, et elle y était. Plus qu'à se parfumer. Elle attrapa son flacon de "Tentation". Un parfum féminin quelque peu entêtant, mais au combien agréable... Il avait d'ailleurs fait bien des ravages, ce parfum. Aussi bien chez les hommes que chez les femmes...

Kal n'aimait pas trop monter dans la voiture de Piotr. Niveau class, on faisait mieux que ce vieux tacot rafistolé de toute part. La jeune femme n'aurait, d'ailleurs, pas été surprise de le voir tomber en panne - au mieux - ou en miettes - au pire - à tout instant. A chaque dos d'âne, elle serrait les dents, guettant le bruit qui indiquerait que le pot d'échappement était tombé, et que le reste allait suivre. Mais après vingt minutes de route, aucun bruit suspect ne s'était fait entendre, et la voiture n'avait pas toussé. Tout allait donc pour le mieux, pour l'instant. Toutefois, elle se sentit quelque peu minable de descendre de ce vieux tas de tôle pour rentrer dans cette villa.

*Ce qui compte, ce n'est pas la voiture dont tu sors, c'est qui tu es... Et ce n'est même pas ta caisse, en plus...*

La tête haute, elle pénétra dans la villa. Il n'y avait pas encore trop de monde. Tant mieux. Peu de danseurs pour l'instant. La jeune femme haussa les épaules et adressa un signe à ses colocs et à Piotr, indiquant qu'elle allait au bar, auquel elle ne tarda pas à s'accouder avec élégance avant de commander un Cosmopolitan.

*Rien de tel que ce petit cocktail pour bien commencer une soirée...*

La foule commençait à arriver, petit à petit. Asia, pour le moment, était aux prises avec un dragueur invétéré, mais ne semblait pas trop en souffrir. Esfir et Piotr n'étaient plus en vue, sans doute à l'étage. Et Mateusz et Ivan arrivaient. Autant en avoir le coeur net. La jeune femme se brancha sur l'esprit des deux garçons, pour démêler le vrai du faux de ce que lui avait dit Alexeï. Avait-il bien entendu? N'était-ce qu'une rumeur sans fondements? Le dealer était-il attendu avec impatience?

Pour se donner contenance, la jeune femme porta son cosmo à ses lèvres, se rapprochant des deux garçons pour faire mine de passer devant eux sans s'arrêter, chose qu'elle ne comptait pas faire, de toute façon, puisqu'elle se dirigeait vers l'extérieur. Même s'il y faisait frais, il y aurait toujours moins de monde, et ça serait plus confortable pour elle. Pour l'instant.

Le dealer venait d'arriver. Kal le scruta un long moment. C'était, pour elle, un parfait inconnu. Mais visiblement, pas pour de nombreux autres participants à la petite sauterie qui venaient de l'entourer. A moins que certain(e)s ne le trouvent à leur goût. Cette idée la révulsa quelque peu. Pas parce qu'il était immonde, mais par ce qu'il représentait. La drogue. C'était bien là une chose à laquelle elle n'avait jamais touché et à laquelle elle ne comptait pas toucher. D'autant qu'elle était étudiante en médecine.

Depuis l'extérieur, elle surveilla Asia, qui se faisait toujours baratiner. Peut-être devrait-elle s'assurer que la jeune fille allait bien, tout en vérifiant que le dealer ne comptait pas s'approcher de ses colocataires? C'était ce qu'elle allait faire. Ne serait-ce que pour s'assurer qu'elle ne risquait pas d'ennuis en repartant avec les filles et Piotr. Et puis de toute façon, il faudrait bien qu'elle se mette en chasse à un moment, et ce n'était pas dehors qu'elle pourrait.

La jeune femme prit donc une grande inspiration et revint à l'intérieur de la salle et se brancha sur l'esprit du dealer tout en se dirigeant vers Asia. Elle cherchait à savoir ce qu'il venait faire à cette fête, s'il connaissait Esfir, Piotr et Asia. Elle ferma son esprit à toutes les autres sources de pensées parasites, se contentant de celles du dealer.

Visiblement, Kallan était allée un peu vite en besogne et avait présumé de son bouclier psychique. Mais bon. Elle s'en doutait un peu. Elle avait, toujours, eu tendance à tenter le diable à ce niveau là, ne se satisfaisant jamais de ses capacités. Mais elle était parvenue à saisir l'essentiel. Le dealer, Dmitri, n'avait pas sa camelote sur lui. C'était déjà ça. Elle lui jeta un coup d'oeil, tout en portant ses mains à ses tempes pour se les masser.

Presque immédiatement, elle fut rejointe par Asia. Au moins, elle pouvait être sûre que celle-ci ne serait pas davantage importunée par Gregor, puisque sa jeune colocataire vint de suite vers elle, comme à la recherche d'air pur. Même si son prétendant du jour lui emboîtait déjà le pas.

"J'ai une migraine subite. Tu sais? Comme ça m'arrive de temps en temps dans les soirées..."

Jamais elle n'avait parlé de son pouvoir à personne. Hormis sa mère. Et ça ne risquait pas d'arriver avec quelqu'un d'autre. Sa mère pouvait comprendre. Elle était comme elle. Ce n'était, certes, pas le même pouvoir. Mais c'était la révélation de celui de Kal', neuf ans plus tôt qui avait précipité leur exode de Pologne pour venir en Russie, le régime polonais étant clairement anti-mutants. Rien que penser à tout ça augmentait encore le mal de crâne de Kal qui ne tarda pas à prendre légèrement appui sur Asia, comme pour signifier à Gregor qu'elle était sa propriété.

"Sortons une minute. Tu veux bien? Gregor? Si tu pouvais me trouver une aspirine ou un truc du même genre, ça m'aiderait grandement..."

Elle l'envoyait au loin de sa protégée? Oui. C'était un fait. Mais elle ne voulait pas voir tourner ce dragueur invétéré autour d'Asia et de son petit coeur d'artichaut. Kal n'était pas sentimentale. Loin de là. Mais Asia lui avait toujours fait l'effet d'une petite chose fragile à protéger. Et c'était bien ce qu'elle comptait faire, une fois de plus.

"C'est un dragueur de pacotille..." lâcha-t-elle avec un mépris évident dans la voix.

Ce n'était pas un gars pour Asia. C'était clair et net dans la tête de la télépathe. Celle-ci n'imaginait pas la benjamine de l'appartement sortir avec ce... Ce... Les mots lui manquaient. Etait-ce à cause de son mal de crâne récent, ou à cause de cette pensée qu'elle avait capté, de quelqu'un cherchant un jeune mutant, ou bien d'avoir senti Piotr dans la foule qui entourait le dealer? D'ailleurs, en parlant de ça, ça la choquait énormément. Kal n'était pas un modèle de vertu. Elle draguait hommes et femmes. Ne restait pas plus d'une à deux semaines avec ses conquêtes, incapable qu'elle l'était de ressentir une émotion. D'une certaine façon, elle était frigide. Sentimentalement parlant. Car son corps ressentait les choses. Lui. Mais bref...

"Piotr était dans la foule pour aller se fournir... Tu le savais, qu'il se droguait? Esfir aussi?"

Tout pour ne pas penser à cette personne qui cherchait un mutant. Et pourtant... Etait-elle la seule dans cette soirée, de mutante? Cette personne la cherchait-elle? Non. C'était un jeune mutant. Un garçon. Ce ne pouvait être elle. Pourtant, le doute était semé. Et la jeune femme se tourna vers la porte fenêtre, se concentrant pour essayer de trouver la personne qui avait émis cette pensée, et si elle y parvenait, savoir pourquoi elle cherchait ce mutant.

"Je l'ai aperçu près du dealer... Quand on est passées" fit-elle simplement.

Elle n'en revenait pas de ne s'être doutée de rien concernant Piotr. Elle était télépathe, pourtant! D'un auter côté, elle s'était toujours interdit de fouiller dans l'esprit de ses colocataires, et par extension, dans celui de Piotr qu'elle avait toujours connu avec Esfir. Mais tout de même. Elle aurait dû savoir. Asia ne tarda pas à partir chercher Esfir, laissant Kallan seule à l'extérieur. Cela se sentait que la benjamine de la colocation était inquiète. Et Kal' le comprenait parfaitement.

Mais elle avait d'autres soucis. Cette femme, qu'elle avait repérée. Cette mutante, qui cherchait un autre mutant. Devait-elle aller la chercher? Devait-elle l'appeler? Un chose était sûre, cette personne ne voulait pas de mal au mutant recherché. La jeune femme prit une inspiration. Elle prenait un risque, avec ce qu'elle s'apprêtait à faire. Elle se brancha sur le canal mental de la femme pour lui adresser un message télépathique.

*Quelqu'un pourra peut-être vous renseigner à l'extérieur sur l'objet de votre recherche..*

Profiter qu'elle était seule pour en apprendre plus sur cette femme. Sur celui qu'elle recherchait. C'était la seule chose à faire. Et ça la tiendrait occupée, au moins. Et qui était cette femme? Elle ne l'avait jamais vue. Ni d'Eve, ni d'Adam. Une chose était sûre. Elle ne dévoilerait pas son identité, à moins d'être certaine des intentions de la femme, et que ce soit elle la recherchée, si tant était que la femme ne sache pas si elle cherchait un jeune homme ou une jeune femme...

Kallan surveillait attentivement la porte menant à la terrasse à laquelle elle se trouvait. La femme allait-elle répondre à son appel? Si elle était mutante, elle répondrait, sans nul doute, à celui d'une personne de son espèce. D'ailleurs, Kal ne tarda pas à voir l'asiatique sortir, une coupe de champagne à la main. Un sourire se dessina sur le visage de la polonaise. La femme était venue. Elle avait répondu. La blonde resta un instant le long de la rambarde à laquelle elle s'était appuyée, puis se dirigea vers la jeune femme après avoir pris une grande inspiration.

"Bonsoir... Vous êtes aussi à la fac de Saint Petersbourg? Je ne vous y ai jamais vue..." demanda-t-elle en toute innocence.

La femme reconnaîtrait-elle sa voix mentale? Dans le cas contraire, cela pourrait être assez amusant à jouer... La blonde esquissa un sourire à l'adresse de son interlocutrice. Sourire qui, extérieurement, pouvait passer pour chaleureux. Alors qu'elle s'amusait plus de la situation qu'autre chose.

"Je m'appelle Kallan..." ajouta-t-elle en tendant la main vers la jeune femme, avec un sourire charmeur.

Jeune femme charmante extérieurement au demeurant. Elle ne pouvait le nier. Pourquoi ne pas en profiter? Joindre l'utile à l'agréable? Elle s'admonesta intérieurement. D'abord, savoir ce que cette femme voulait au mutant, ou à la mutante, qu'elle cherchait. Ensuite, elle verrait si elle pouvait en profiter...