04.06/29.L. La dernière Templière et son Graal

Une tête curieuse se profila dans l'espace laissé par la porte entrouverte, suivi bientôt par le reste du corps d'un jeune adolescent. S'il avait toujours les cheveux aussi ébouriffés, Malo affichait un visage étrange, d'une pâleur surprenante en cette période de l'année où chacun prend un plaisir certain à arborer un magnifique bronzage, signe de vitalité et de vie au grand air. Accentués par ce teint blafard, les yeux du Breton ressortaient d'autant mieux qu'ils étaient soulignés par d'impressionnantes cernes. Mais,en dehors de ça, le gamin semblait en relative bonne forme même si un accès de faiblesse lui fit empoigner le montant de la porte pour rétablir son équilibre.

Il faut dire qu'il arrivait en ligne droite (du moins en supposant que la téléportation empruntât ce chemin réputé être le plus court) de l'aéroport. Pressé de retrouver l'ambiance de Graymalkin Industries et faisant fi des consignes de ménagement qu'il avait reçues, Breizh avait décidé d'utiliser son pouvoir pour accélérer son retour. Mal lui en avait pris car un vertige venait de le saisir, confirmant le besoin de se reposer encore afin de retrouver la plénitude de ses moyens.

"Putain,mais c'est la Gostream Tech !", s'exclama-t-il avec spontanéité, preuve qu'il n'avait rien perdu de sa discrétion légendaire. "Tu m'f'ras essayer ?"

D'une démarche mal assurée, le garçon fit quelques pas dans le salon, son sac de voyage encore à la main. Esquissant un sourire fatigué, il s'approcha de Jane (et indirectement de la pizza) avant de s'apercevoir que la jeune fille avait un peu l'air perdu devant l'enchevêtrement de câbles.

"Tu veux un coup de main ?",proposa-t-il aussitôt. "Enfin, dès qu'j'ai vu madame Donowho pour lui signaler que j'suis arrivé. Tu sais où j'peux la trouver ? Ou alors, tu m'prêtes ton communicateur que j'l'appelle. Ça ira plus vite..."

Bon sang. S'il avait su qu'en l'espace de quelques semaines, il passerait du stade de nouveau prof à directeur, il aurait probablement refuser d'en être. Comme s'il n'avait pas déjà assez à faire sur Khane, il fallait maintenant qu'il se tape tout le bâtiment à gérer tout seul. Quelle plaie. Au moins, une partie des gosses étaient retournée crécher ailleurs, ce qui n'était vraiment pas un mal.

En attendant, il devait continuer ses aller-retour pour gérer la paperasse américaine liée à la gestion d'un tel établissement, sans parler de son autre taf. Qu'allait-il faire de Graymalkin ? Il n'en avait aucune idée. Les combats qui avaient démarré sans lui l'indifféraient. Mêle s'il connaissait les tenants et aboutissants potentiels, il ne lui semblait pas nécessaire d'aller chercher des noises ailleurs et encore moins de se faire remarquer.

Alors quand il avait un peu de temps, il retournait tout de même à Graymalkin dès que possible pour montrer qu'il était toujours là. Il n'avait aucune idée de quoi faire des élèves. Les entraînements ne seraient sans doute pas de trop mais l'école était sans doute le principal pour ceux qui en avaient besoin. Pour les autres, les lieux étaient un refuge le temps de se remettre.

Une tablette sous la main, Morgan arriva dans le salon, esquivant Malo sans vraiment réaliser qu'il n'était pas sensé être là et imaginant davantage Dakota et se dirigea vers les fauteuils. L'odeur de pizza était bien présente et commençait à embaumer les lieux, ce qui aurait pu être agréable s'il n'avait pas déjà déjeuné.

" Mangez à la cuisine, ça pue la bouffe dans les lieux de vie après. " lança Morgan comme réprimande rapidement oubliée.

Il alla s'asseoir dans un canapé après avoir ramassé rapidement la télécommande de la télé, lança une chaîne d'information en continue comme bruit de fond puis se concentra sur sa tablette après avoir rapidement jeté un œil à ce que faisait Jane. Il devait avoir une tonne d'emails.

Prenant machinalement la part de pizza, Malo balayait le salon du regard comme s'il en découvrait les détails.

"Euh, me... merci.", bafouilla-t-il, l'esprit visiblement ailleurs. "J'ai pas trop f..."

L'arrivée soudaine de Morgan apporta une diversion en interrompant la réponse. Slalomant entre les adolescents avec l'habileté d'un serveur se faufilant dans la salle comble d'un bistro quelconque, l'homme vaquait à ses occupations sans se préoccuper le moins du monde de ce que faisaient les premiers arrivés dans la pièce.

"B'jour m'sieur", marmonna machinalement le Breton avant de reporter son attention sur Jane.

"Ça a l'air mort pour brancher la console maint'nant.", poursuivit-il avec une lueur ironique dans le regard pourtant fatigué. "J'crois qu'j'f'rais mieux d'aller porter mes affaires dans la chambre et prév'nir la patronne qu'j'suis rentré. J'lui ai envoyé un message pour lui dire mais elle n'a pas répondu..."

Son sac de voyage toujours tenu de la main gauche, Malo tendit, de l'autre main, la part de pizza à sa camarade, n'ayant, à aucun moment, fait mine de croquer dedans. Cette indifférence surprenante devant de la nourriture n'était pourtant pas dans les habitudes de l'éternel affamé et constituait un indice certain pour indiquer que le gamin avait quelque chose de changé.

Poussant un long soupir, Morgan commença à faire glisser son index sur sa tablette, faisant défiler des dizaines d'emails de toute part. Une partie des documents à signer vis à vis de Graymalkin l'avaient été mais d'autres restaient à discuter avec divers organismes. Evidemment, d'autres tentaient de profiter de l'arrivée inopinée d'un nouveau gérant pour essayer de lui vendre de nouveaux services qui avaient déjà été refusés probablement des dizaines de fois auparavant. Difficile de savoir ce qui était légitime dans tout ce foutoir et comme pour beaucoup, l'administration était loin d'être son fort.

C'était dans ce genre de situation qu'il avait envie de tout envoyer paître. Retourner dans sa zone de confort sur Khane ou dans son autre travail aurait été bien plus simple mais il avait malheureusement un poids sur les épaules avec les mômes présents. Nombreux étaient ceux qui s'étaient carapatés à juste titre. Mais pour ceux qui croyaient encore en l'endroit, il ne devait pas baisser les bras...

Lorsqu'il fut question du cancer de Donowho, Morgan releva les yeux et quitta un instant un email parlant du chauffage du bâtiment. Il réalisa soudainement que ce n'était pas Dakota qui était présent mais Malo. Il devait y avoir un paquet de choses à lui raconter, mais le prof était ravi de ne pas avoir à le faire lui-même.

Alors qu'il s'apprêtait simplement à quitter le salon pour rejoindre sa chambre, Malo s'immobilisa en entendant les explications de Jane. Les mots employés, tout autant que le ton sur lequel ils étaient prononcés, glacèrent le gamin qui tourna aussitôt la tête vers sa camarade, cherchant à accrocher son regard fuyant.

"Quoi ? Merde... C'est...", s'étonna le garçon. "Mais, c'est arrivé quand ? J'veux dire, la dernière fois qu'j'ai vu, elle avait l'air de péter la forme. C'est moi qu'était pas frais..."

Se pouvait-il que l'état physique dans lequel l'adolescent se trouvait à ce moment ait pu altérer sa perception de son environnement ? Il est vrai que Malo se rappelait surtout des paroles rassurantes de la doyenne et que tout le reste se mélangeait dans une sorte de brume opaque.

"Mais, si elle est plus là, c'est Mancini qu'est l'dirlo ?", demanda-t-il avec une pointe d'inquiétude. "C'est lequel son bureau déjà ?"

Breizh ne s'était jamais senti véritablement à l'aise avec le toubib dont le caractère lui semblait particulièrement instable. Certes, il avait des circonstances atténuantes avec les mauvais traitements qu'il avait reçus, tant de la part des Pères Fondateurs que des Czatars, mais le jeune Breton se méfiait des sautes d'humeur et préférait nettement la sollicitude avec laquelle Lily-Rose les maternait.

Et si c'était Harlow ou même Valet qui avait pris les rênes ? L'ONE était capable d'avoir installer son pion à la tête de GI pour mieux pouvoir tirer les ficelles. Malo ne croyait pas trop à l'hypothèse impliquant l'ancien mercenaire, en raison de l'animosité que l'animorphe causait chez beaucoup d'élèves.

Le gamin lança un regard en coin vers Morgan, croisant rapidement le regard de l'homme. Au moins, Brown était encore là pour épauler l'équipe enseignante. Mais, à aucun moment, Malo n'imagina que le dernier arrivé parmi les professeurs puisse se retrouver, seul, à la tête de l'école. Reportant son attention sur la succube, il lui soumit rapidement le fruit de ses réflexions.

"Me dis pas que c'est la mère Harlow qui assure l'intérim ?", demanda-t-il en baissant la voix, espérant de ne pas être entendu par le Grand Maître. "Ça s'rait trop la loose pour nous si l'gouvernement nous serrait d'trop près..."

Chambre.

Rien de tel qu'une bonne douche après un échange de coup, enfin après pratiquement tout en réalité. Après s'être changé rapidement l'animal hésita sur la suite de sa journée, il était encore tôt pour aller au bar (oui il faisait des efforts la-dessus aussi) et en toute logique il travaillait ce soir, donc il lui fallait s'occuper jusqu'à 19h à peu près. Il faisait beau et chaud, mais Féral venait de transpirer à l'intérieur, il n'avait aucune envie de le faire à l'extérieur. Son regard doré se posa alors sur son bureau ou l'attendait bien sagement une enveloppe, c'était sa première fiche de paie, la première de sa vie même étant donné qu'il avait toujours travaillé sans être déclaré. Brown lui avait demandé de lui apporter, pour être sûr que Lazare ne lui montait pas un flan, était-ce si difficile de croire qu'il jouait du piano le soir dans le bar d'un grand hôtel ? Oui ? Ha bon bha…

Il prit donc l'envelopper pour aller la donner à celui qui la réclamait, il s'en suivi donc une longue marche dans la baraque vu qu'il ne savait pas ou se trouvait Morgan. Finalement, après avoir vérifié l'amphi', le bureau et deux autres pièces que l'animal abandonna l'idée pour le moment, autant aller s'abrutir un peu devant la télé. En approchant de la pièce il entendit la voix de Malo inquiète. Le breton était donc revenu et il était certainement en train d'apprendre la nouvelle des abandons. L'animal entra dans la salle à la fin de la phrase du français.

Yo Red. Lança t'il simplement à l'attention de Jane, apparemment ni spécialement surpris ou intéressé par le retour de Malo. Il dit d'ailleurs à ce dernier en Français : T'inquiète crèpe-man Harlow, Lorenzo et Valet se sont barrés aussi comme une bonne pété d'élèves. C'est Browny qu'est aux commandes maint'nant. Bon retour au fait.

Il avait dit cela sans arrière pensée et sans signe physique montrant quoi que ce soit. Il n'était ni peiné, ni réjouit de voir tout ce beau monde s'enfuir, il s'en fichait royalement en réalité. L'animal se dirigea ensuite vers Brown et une fois devant lui il lui tendit l'enveloppe.

Tient boss, ma fiche de paie comme promis. Et si t'as cinq minutes j'aimerais t'parler de l'AEE. D'une idée à te soumettre.

Lazare s'assit ensuite sur l'accoudoir du canapé non loin de Brown afin de pouvoir continuer à lui faire face.

Malo avait l'air d'essayer de digérer l'information, à l'inverse de la pizza qu'il ne semblait pas vouloir. Naturellement, il chercha à savoir qui dirigeait l'établissement et sans surprise, Morgan n'apparaissait pas en tête de liste. Jane cracha le morceau avant d'aborder les départs des autres profs un à un.

Le prof observa les réactions du minot à mesure que les informations étaient lâchées. Jane ne manquait pas se donner la vedette avec son coup de queue perceur. Finalement, elle lui lança qu'il ferait mieux de retourner chez lui, qu'il y serait plus en sécurité. Morgan fronça les sourcils. Participait-elle à faire fuir les élèves restants ? Son défaitisme était-il contagieux ? Il devrait lui parler. Il n'aimait pas beaucoup ce genre de message...

Entre temps, Lazare était arrivé. Il lui portait visiblement sa feuille de paye. En la récupérant, Morgan lui lança désintéressé :

" Appelle-moi encore une fois Browny et j't'envoie crever en antarctique sans une once de remords. "

Le prof sortit le courrier de son enveloppe et l'observa. Ca avait l'air vrai ce truc. Ou Lazare était très doué pour faire du faux. Il lui parla soudainement de l'AEE et d'une idée à soumettre. Sceptique, Morgan lança un grognement interrogatif. Est-ce qu'il voulait retourner fourrer son nez dans ce merdier ?

Malo ne put s'empêcher de porter de nouveau son regard vers Morgan pendant les explications de Jane. Ainsi, c'était lui le nouveau boss et tous les autres adultes s'étaient fait la malle... On se retrouvait quasiment dans les conditions du séjour sur Khane, avec en plus le Grand Maître dans les pattes. Il devait forcément y avoir une malédiction à vouloir être un X-Man, sans cela, comment expliquer que le sort s'acharne ainsi sur eux ?

Le récit de la crise de folie de Lorenzo amena une grimace sur le visage de l'adolescent. Il n'aurait vraiment pas aimé se retrouver mêlé à ça, face à un mutant aussi puissant qui avait certainement dû utiliser sans aucune retenue le volet maléfique de son pouvoir. Succubus n'avait certainement pas eu le choix pour se résoudre à frapper l'homme aussi violemment.

Au moins, tout n'avait pas changé en Californie,comme en témoignait l'attitude de Lazare. Toujours aussi individualiste, l'animal semblait faire de son mieux pour provoquer son entourage mais il venait, mine de rien, de balancer un nouveau Scud au visage du jeune Breton.

"Attends...", intervint Malo alors que Féral interpellait déjà le nouveau directeur, de façon toujours aussi désinvolte. "Des élèves sont partis ? Qui ça ? Alex est encore là au moins ? Et Vadim ? Et Dakota ? Et Clara ?"

Au fond de lui, Malo se sentait de plus en plus inquiet. Il se faisait une joie de retrouver le cadre rassurant de Gramalkin Industries et il apprenait que, pendant son absence, un véritable tsunami s'était abattu sur l'école. Il espérait qu'au moins, ses meilleurs amis étaient encore là. Même Clara dont l'attitude avait pourtant été de plus en plus ambiguë...

La façon dont le nouveau directeur rabroua Lazare amena un léger sourire sur le visage amaigri du gamin. Bien que ne semblant pas très à cheval sur les convenance, Morgan fixait des limites à ne pas franchir. À oublier donc, vite fait, le surnom de Browny ou alors il fallait prévoir une écharpe bien chaude avant de l'utiliser...

Du coup, c'était lui que Malo devait voir pour signaler son retour bien que, techniquement, le nouveau boss avait déjà l'information. D'ailleurs, il devait être complètement laxiste, ou aussi "j'm'enfoutiste" que Lazare pour ne pas avoir sauté sur le râble d'un élève de retour après deux mois d'absence. Le jeune garçon hésitait à s'éclipser discrètement mais n'avait pas envie d'interrompre une conversation à laquelle il n'était pas convié.

"Euh m'sieur...", se décida-t-il, prenant son courage à deux mains."J'peux retourner dans ma chambre ? Enfin, la chambre que j'avais avant que... avant. À moins qu'y a quelqu'un qui..."

Il était logique de penser que la place laissée vacante ait pu être réattribuée mais Lily-Rose avait quand même bien dû faire le nécessaire en prévenant ses collègues de l'absence temporaire du Breton, pour une durée indéterminée...

"Mes affaires ont été mises où ?", reprit Malo, réalisant soudain que le temps ne s'était certainement pas figé en attendant son retour. "J'peux r'passer vous voir plus tard si vous voulez m'parler..."

De plus en plus mal à l'aise, le jeune garçon s'embourbait dans ses questions, déplaçant son centre de gravité d'une jambe sur l'autre. Il n'avait qu'une hâte, en fait : disparaître sous terre ou, à défaut, quitter cette pièce. Certes, il aurait pu planter tout le monde en ce téléportant - il y a quelque mois, cela ne l'aurait pas dérangé d'agir de façon aussi impulsive - mais il se ressentait encore du malaise causée par son dernier "saut" depuis l'aéroport et il devait encore reprendre des forces avant de retrouver un usage normal de son pouvoir.

Le visage de Jane ne changea pas d'expression, mais elle était un peu déçue au fond d'elle. Elle avait réellement envie d'exploser quelques tibias et de faire voler des dents voir des mâchoires entières. Elle eu un léger frisson en entendant la menace de l'empereur/professeur : c'était certains qu'il ne plaisantait aucunement. Elle se demanda si Lazare était capable de survivre en antarctique... Ou 10 minutes sur Khane. Elle aimerait bien retourner sur cette planète au final malgré la culture qui était très loin d'être celle qu'elle connaisse ici.

Elle aimerait bien aussi retourner un peu en Australie, régler quelques affaires... Comme se venger de l'autre enfoiré qui avait incité ses hommes à lui tirer dessus pendant un rodéo. Elle monterait bien une équipe vite fait et demander à Brown s'il est possible de les déposer au patelin visé quelques heures. Le temps de foutre une rouste au mec et de lui faire profiter de son propre châtiment.

Elle écouta cependant Lazare expliquer son plan. Visiblement, d'après le mot "bourse" ça parlait d'attaque économique... mais cependant...

"Tu m'impressionne... j'ai absolument rien compris à ce que tu veux faire Lazare. Juste que tu veux faire un truc avec l'économie de ces types."

Elle se repris finalement une part de pizza pour commencer à la déguster. Pas mauvais du tout tient. Juste un peu gras.

"Vous tenez le coup Professeur Brown ? Ca doit être très difficile de tout gérer à la fois non ?"

Elle se tourna vers Malo, toujours peiné pour lui, mais la vie doit continuer, et il devra faire avec, c'est ainsi.

"Vadim et Clara sont partis. Alex est toujours là, comme un comploteur maléfique de bande dessiné à traîner dans les ombres ou à raser les murs sans rien dire..." dit celle qui parfois exactement pareil..."Dakota doit être en train de jouer quelque part. Ou de chercher les trucs que j'ai trouvés et que j'ai du mettre autre part..."

Elle leva un sourcil en espérant que le jeune garçon compris de quoi elle voulait parler. En présence du directeur, il valait mieux rester discret sur le sujet de leurs revues coquines, bien qu'il doit avoir moult autre chat à fouetter.

Son téléphone se signala à Morgan, comme ayant reçu un message:

Ryoichi kinami a écrit:

"Hello,

Tiens je voulais savoir, je dois vous appeler Mr? Directeur? Za'al? Vu qu'on a commencé par des familiarités et une bière je me dirais bien Morgan, mais ça va créer des jalousies après.
Bon, je déconne comme ça, mais en faite j'ai un service à vous demander. Ou à vous rendre ça dépend comment vous le prenez. Quand vous aurez 5min, vous pourriez passer à la cuisine pour discuter d'une idée?"

Morgan soupira alors que Malo indiquait qu'il voulait définitivement revenir. Encore de la paperasse à faire pour réintégrer le môme. A moins qu'il ait été marqué quelques part que c'était un départ momentané ? Il allait encore perdre du temps à savoir ce qu'il devait faire légalement. Super !

" On accueille encore des gens donc oui. Je sais pas où sont tes affaires. Demande à ceux de ta chambre. " répondit Brown.

Chacun gérait son bazar, c'était aussi bien comme ça. Quant à ce qu'il revienne plus tard pour lui parler...

" Oui oui, faisons ça. " et lâche-moi dans l'immédiat, pensa-t-il alors que Jane et Lazare  essayaient de lui parler.

Il aurait mieux fait de s'enfermer dans son bureau. Mais ne pas profiter de la baraque le rendait dingue. Idéalement, il aurait fallu éviter qu'il y ait le moindre gamin. Là il aurait été tranquille.

Finalement, il écouta Lazare lancer son idée. Sur le principe, c'était pas con. Mais pour le reste...

" Pour lancer une OPA sur une multinationale qui fonctionne bien, je te promet que c'est pas quelques millions de dollars qu'il faut. Et gratter une thune infinie risque pas d'être discret. On a tout un paquet de mecs qui vont nous tomber dessus. L'ONE sait qu'on a un mutos veinard non ? Ils vont nous faire chier. "

Et déséquilibrer une économie allait forcément intéresser des gens, surtout des journalistes. C'était pas le genre de trucs qu'ils voulaient. Surtout lui. Jane s'inquiétait soudainement de la charge de travail. Redressant le regard vers elle, il répondit :

" Je préférerai faire le tour du monde et picoler plutôt que passer mon temps entre l'administration ici et gérer les mômes ou la guerre sur Khane, mais bon. J'ai hérité du machin. J'imagine que j'ai pas le choix. "

Et maintenant il avait un message. Ca y est, tout le monde voulait lui parler. Raison de plus pour se faire discret ici. Il commença à observer le message reporté sur sa tablette. Besoin d'avoir un service. Ou en rendre un. Décidément. Tout le monde avait des trucs en tête aujourd'hui. Morgan ne répondit rien. Il avait d'autres chats à fouetter dans l'immédiat. Il rendit le papier à Lazare.

" Je valide. Et je sais pas pour l'AEE. Je suis pas sûr que vous ayez envie de vous attirer encore plus de merdes qu'on en a déjà."

Chouette ! Tout le monde paraissait littéralement sauter de joie à l'annonce du retour du Breton. À l'indifférence marquée de Lazare s'ajoutait celle du nouveau responsable de Graymalin Industries. Ce n'était pas comme ça que Malo avait envisagé la chose. Certes, la prise de fonction de Morgan semblait s'être passée de manière totalement fortuite et l'homme faisait contre mauvaise fortune bon cœur en gérant des affaires qui ne l'intéressaient nullement mais il aurait quand même pu avoir un petit mot de bienvenue, ne serait-ce que pour s'inquiéter de la santé du gamin. Là, rien. C'était "vis ta vie et ne me fais pas trop chier.". Au moins, le côté positif serait la complète liberté dont pourraient jouir les pensionnaires. Tant qu'ils n’empiéteraient pas sur l'espace vitale de Za'al, ils seraient libres de faire ce qu'ils voulaient. Bon plan pour relancer les méfaits du gang des terreurs des préaux.

À supposer, bien sûr, que le gang existât encore et que la forme physique de Malo l'autorisât à de tels excès... D'après Jane, décidément bien plus sociable que les autres personnes de la pièce (ce qui était quand même un comble...), Vadim et Clara avaient disparu de la circulation. Le départ de la jeune fille pinça quand même le cœur du Roméo en culottes courtes, mais moins que ce à quoi il aurait pu s'attendre, comme si les sentiments qu'il éprouvait envers elle s'étaient quelque peu estompés au fil du temps (aidés peut-être par la distance qui s'était instaurée entre eux juste avant le départ de Malo). Par contre, une grimace de dépit était apparu à l'annonce du départ du jeune Russe. Même si Dakota était encore là, l'absence de leur aîné allait forcément rejaillir sur les activités du groupe - il n'y aurait plus personne pour avoir des plans foireux pour rapporter de la bière (et aller chaparder dans les magasins était beaucoup moins drôle lorsque l'on était seul). L'allusion à peine voilée de la succube sur son implication dans la préservation (ou de la dissimulation) de la bibliothèque des gamins n'éveilla aucune lueur d'intérêt ou de connivence dans le regard du Breton. Indifférence vis à vis de la nourriture, indifférence également devant les revues cul-turelles, il y avait vraiment quelque chose qui clochait et qui montrait que Malo avait grand besoin de repos.

Mais, pour le moment, visiblement, sa présence n'était plus nécessaire dans le salon et le directeur aspirait à un peu de tranquillité. S'efforçant de masquer sa fatigue, Breizh adressa un sourire poli à Morgan.

"Bien, m'sieur. J'repass'rai vous voir quand vous aurez le temps.",déclara-t-il. "J'vais voir si j'peux reprendre ma place dans la chambre."

Au moins, Alex serait encore là pour l'accueillir mais Malo espérait que son camarade ne lui fasse pas trop la tête après qu'il soit parti sans laisser trop de nouvelles et, surtout, sans rien ranger du bazar habituel qui traînait autour de son lit. Quand on connaissait le côté maniaque de l'Asiatique, on se doutait bien que ce dernier n'avait pas dû trop apprécier...

La remarque de Jane à son encontre réussi à arracher un petit sourire à l'animal, depuis qu'il l'avait connu à l'entraînement il avait réellement l'impression d'avoir à faire avec un des piliers des X-men, il ne s'imaginait pas que cette jeune femme fut moins sociable et sûr d'elle par le passé, pour lui elle avait l'air d'une femme forte, bien qu'un peu bizarre, mais après tout la normalité était ici (plus qu'ailleurs) quelque chose de très relatif.

Il n'écouta qu'une d'une oreille la discussion qui suivie, après tout cela ne le concernait pas du tout, il n'avait donc pas à s'en mêler. Il préféra finir sa part de pizza sans se préoccuper de la suite, après tout il avait lancé son idée à Brown de dire ce qu'il en pensait. Et ce dernier ne se fit pas prier, Lazare avait bien envie de lui dire qu'ils pouvaient se farcir l'ONE si ces derniers venaient leur chercher des poux, mais il n'en savait rien concrètement, après tout il s'agissait d'une organisation gouvernementale.

J'imagine qu'on pourrait faire en sorte qu'un PDG l'fasse pour nous… mais bon après tout, moins j'me frotte à l'AEE mieux j'me porte, j'essaye juste de participer.

Après tout il l'avait voulu ? Il l'a eu, un grand coup dans son c**. Bon non peut-être pas non plus. En tout cas Brown avait demandé à ce que l'animal s'implique, il essayait de le faire, certes son idée n'était pas bonne, mais bon il essayait au moins. Difficile pour lui de s'impliquer avec des gens quand on sait qu'il est extrêmement solitaire. En écoutant Brown parler de faire le tour du monde en picolant et qu'il n'avait pas le choix Lazare se retint de hausser un sourcil, il préféra attendre qu'il lui redonne sa feuille de paie, puis l'animal se leva. Il aurait bien aimé lui parler seul à seul sur ce coup-là. Il avait le choix, après tout certain vieux élèves ici étaient majeurs et pouvaient légalement reprendre le bousin, mais il savait qu'intérieurement quelque chose d'autre poussait Brown à continuer, certainement la même chose qui le poussait lui. Enfin peut-être. L'animal se dirigea donc vers la sortie tranquillement.

T'a pas tord pour l'AEE Brown. Merci pour la part de pizza Red.

Puis il disparut derrière la porte, un de moins Brown pourrait enfin souffler.

Ailleurs

La situation semblait se décanter lentement. Malo confirmait qu'il reviendrait plus tard, Lazare grognait parce que son idée n'était pas retenue mais semblait dans le fond s'en moquer quelque peu puisqu'il avait fait sa B.A de la journée, et Jane restait immobile.

Retournant à sa tablette, le directeur fit à nouveau défiler les mails. Seul le son de la chaîne d'information en continue venait peupler l'environnement sonore de la pièce avec les mêmes événements des deux derniers jours qui tournaient en boucle, faute d'actualité croustillante sur laquelle revenir toutes les 20 secondes pour ne rien dire de plus ou de moins.

Plongé dans un mail passionnant à propos du linge de maison, Morgan finit par relever le nez de sa lecture lorsqu'il entendit la télé annoncer quelque chose d'inhabituel.

" Flash spécial ! Un tremblement de terre de magnitude 7 vient de toucher Washington. On déplore déjà de nombreuses victimes ainsi que des dégâts sévères. Arlington ainsi que Bethesda ont été touché. La Maison Blanche et le Pentagone semblent quant à eux ne pas avoir subi de dégâts. Sur place, nos envoyés spéciaux."

S'en suivi un journaliste qui décrivait la situation. Panique, catastrophe, dégâts, victimes, secours, sirènes, étaient quelques mots utilisés dans les phrases pour dresser un tableau de la situation cataclysmique que venait de subir la mégalopole. Des images étaient déjà disponibles, certaines provenant de vidéos amateurs ou de plans en hélicoptères. Celles-ci montraient par endroit des bâtiments écroulés, des routes ou des ponts effondrés, des axes de communications bouchés, des gens poussiéreux qui tentaient de retrouver d'autres membres de leurs familles, des pleurs et des cris.

Quelques actions conjuguées de volontaires tentaient d'extraire des survivants de décombres. Les forces des villes alentours étaient pour l'occasion réquisitionnées alors même que des militaires étaient attendus pour soutenir les actions. Les réseaux étaient quant à eux saturés, gênant les interventions des secours.

Silencieux, Morgan commenta, après avoir écouté ce qui était raconté à la télé :

" Quel bordel... "

La côte Est n'était pas particulièrement sujette à des séismes. Mais quand il y en avait, il semblait que ça ne soit pas la moitié d'un...

Fidèle à son habitude, l'animal venait de quitter rapidement la pièce, obligeant Malo à faire un pas de côté pour libérer le seuil de la porte. Bon, au moins pour une fois, Lazare avait daigné adresser quelques mots avant de sortir. Première étape vers une socialisation de l’énergumène ?

Il était temps également pour le Breton de rejoindre sa chambre et de s'y installer de nouveau. Le nouveau directeur ne semblait pas y voir d'objection (il paraissait même s'en foutre complètement) alors autant se dépêcher avant qu'il ne changeât d'avis...

Les informations en provenance de la télévision captèrent brièvement l'attention du gamin qui était bien d'accord avec le commentaire de Morgan. Il aurait bien vu une intervention des X-Men pour donner un coup de main aux secours et venir en aide aux sinistrés mais Washington était quand même bien loin et les Services Publics devaient être suffisamment compétents pour faire face à la situation.

"Putain, ça rigole pas là-bas en effet.", commenta-t-il à mi-voix. "Faudrait p't'être leur demander s'ils ont besoin d'un coup d'main..."

Après tout, les résidents de Graymalkin Industries possédaient de multiples qualités propres à rendre service dans ce genre de situation.

"Bon, si y'a besoin de moi, j'suis dans ma chambre...", poursuivit le jeune mutant, semblant oublier qu'il n'était pas au mieux de sa forme et qu'il avait déjà failli être victime d'un malaise pour avoir voulu utiliser son pouvoir.

Avec un petit salut de la main, Malo sortir à son tour du salon pour rejoindre l'étage supérieur, espérant y retrouver facilement le fourbi qu'il avait laissé lors de son départ précipité le mois précédent.

Chambre des garçons

Probablement en manque d'action, Malo puis Jane proposèrent de faire quelque chose pour le tremblement de terre. Le premier en revanche était tout aussi pressé de retourner dans sa chambre, probablement pour retrouver quelques camarades ou des affaires qu'il avait laissé de côté en partant un peu rapidement.

Les informations continuaient à défiler à la télé, en annonçant toujours les mêmes choses au cas où de nouveaux spectateurs arrivaient en cours de route. Jane se proposait de son côté de réunir tout le monde pour une intervention. 

" On n'est pas pompiers. Laissons donc les pros faire leur taf plutôt que de venir les emmerder. Faudrait pas qu'ils aient à nous sauver en plus. Si tu t'emmerdes, doit y avoir des trucs à faire en ville. Quelque part. Surement. "

Ceux qui voulaient aider pendant les catastrophes faisaient souvent plus d'erreurs qu'autre chose. Et même face à une personne blessée, il y avait des choses à faire et d'autres à éviter sous peine d'empirer la situation.

Morgan, tout en gardant une oreille attentive à ce qui se passait à la télé, retourna sur sa tablette quelques instants histoire d'avancer sa pénible tâche.

Quelques instants passèrent avant que la télé annonce un nouveau flash. Morgan n'eut pas le réflexe immédiat de relever les yeux. Depuis déjà quelques minutes, l'écran annonçait des dégâts sur les réseaux des eaux, ceux électriques ou ceux du gaz dans certaines parties de la ville. Les coupures régulières pour annoncer les dommages étaient légions, et il n'était pas improbable qu'ici encore, il soit question d'une nouvelle catastrophe. Une de plus ou de moins, de toute façon...

Pourtant, l'annonce fut d'un tout autre genre :
"Nous apprenons à l'instant qu'il semblerait qu'il y ait des scènes de violence proche du Pentagone. Nous ignorons pour le moment réellement ce qu'il se passe. Une de nos équipes se rapproche actuellement des lieux pour en apprendre davantage. Restez sur Channel News 24 pour plus d'informations. "

Morgan fronça les sourcis à ces informations en daignant donner de l'intérêt à cette information. C'était bien le moment d'avoir des mouvements de foules violents. A moins que ce ne soit des pilleurs qui profitent de l'affolement généralisé et des forces d'intervention pour faire leur petite razzia tranquillement. L'homme soupira de dépit. Certains n'avaient vraiment aucune honneur ou devaient vraiment être au bord du gouffre pour faire ce genre de choses...

Le directeur croisa les jambes, l'air visiblement inquiet, et se mordilla l'ongle de l'index en fixant l'écran. Il allait bien rester quelques minutes à attendre ces fameux détails. Et dire qu'il devait travailler initialement.