01.02/13.Sc.Arlington

Oh oh, ça faisait plaisir de retrouver les sensations empathiques ! Timour faisait bonne pioche. Le type qui reprenait espoir, près de la porte d'où s'éloignait le colosse, était sans doute le Président. Être sauvé par Walentyn Szatanik et avoir une dette envers lui n'était pourtant pas un motif de réjouissance, de l'avis de l'Azéri ! En tout cas, à part les démangeaisons, les choses se présentaient mieux.

L'empathe (toujours dans son apparence surnaturelle de <gros pompier>) resta en outre sur son idée. Il fallait libérer d'autres otages pour faciliter la sortie du groupe. Il trouva une seule âme intéressante. Quelqu'un de franchement stupéfait qui n'était pas dans son assiette. Tant que ses camarades n'avaient pas éloigné le danger dans l'autre pan du couloir, Cupidon préférait s'occuper de ce prisonnier.

Essayant en vain d'ouvrir la porte, il appela Jun qui ne savait pas où donner de la tête. L'espèce de boitier qui commandait le verrou marchait sûrement à l'électricité et un court-circuit pouvait le dégommer.

"Pika, tu sais pas quoi faire alors ouvre cette putain de porte. Et après quand la voie sera libre tu feras la suivante, celle de qui tu sais, là-bas au fond."

Tandis que Jun opérait, Timour se brancha sur l'état émotionnel du prisonnier et l'attendit à sa sortie, prêt à lui toucher le bras pour lui injecter une belle confiance envers les Bloody Mary.

La porte finit par s'effacer, suite aux manipulations de Jun. Un homme au visage tuméfié se tenait derrière, mais recula instinctivement, ne laissant pas Timour le toucher. Sur son visage se dessinaient les traces des derniers contacts de mains avec sa peau, qui n'avaient rien d'amicales.

Il remarqua qu'il avait de nouveau son bras costaud de pompier-barman, et admira un instant ses doigts épais, tatoués, jaunis et terriblement classes.

C'était un état étrange. Le temps n'avait plus aucune signification, les mois, les semaines, les jours, les heures, les minutes et chaque seconde n'étaient plus que des mots ; les jours devenaient des semaines, les secondes des heures, les mois des années... Le temps n'avait jamais été une notion très claire aux yeux de Lorenzo mais ces derniers mois, elle avait perdu le peu de sens qu'elle possédait encore. L'absence de lumière et la solitude étaient une torture psychologique plus terrible que les coups, les violences verbales et les menaces ; elle blessait plus durablement, plus profondément que ne l'aurait fait un objet de torture. Le manque d'exercice couplé à l'obscurité menait le captif à la perte progressive de sa proprioception et c'était un phénomène tout à fait angoissant et il savait que tôt ou tard, il finirait définitivement dans la démence la plus totale. Finalement, Lorenzo en était arrivé à attendre avec espoir les rares moments où ses geôliers venaient le visiter car c'est alors qu'il recouvrait un semblant de lucidité à travers de la compagnie, aussi douloureuse soit-elle...

Parallèlement, il sentait dans son esprit, une sensation insidieuse, contre laquelle il s'efforçait de lutter car il savait qu'elle signerait, elle aussi, son aliénation définitive. Les gens qui le visitaient - malgré leur violence - lui étaient de plus en plus agréables, ils étaient la seule présence humaine qu'il côtoyait à travers cette éternité dans l'obscurité et l'isolement, la seule présence humaine qui lui parlait, ils étaient une réalité : ils étaient sa seule réalité. Toutefois, Lorenzo avait suffisamment étudié le cerveau humain et la psychologie pour identifier la pathologie dont il commençait à souffrir, il l'avait reconnu comme étant un syndrome de Stockholm et c'est ce contre quoi il luttait à chaque interrogatoire et durant les heures qui les suivaient.

En entendant le bruit en dehors de sa cellule puis la désactivation de sa porte, Lorenzo se raidit. Ils revenaient. Quand cela arrivait on lui demandait de s'asseoir sur sa chaise et dans l'obscurité quelqu'un plaçait un sac sur sa tête et on le menottait. L'interrogatoire débutait alors, ponctué de coups que Lorenzo encaissait presque joyeusement. Derrière son sac, il souriait béatement, répondant par des rires délirants à chaque question qu'on lui posait. Et lorsqu'il avait besoin d'une pause dans le tabassage en règle dont il était victime, Lorenzo répondait aux questions par des mensonges qui aiguillonnaient ses geôliers sur de fausses pistes. Puis, il riait et son esprit imaginait différents scénarios, divaguant vers des pensées d'une telle futilité, d'une telle invraisemblance comique qu'il ne pouvait s'empêcher de rire et ni les insultes le traitant de dément ou d'insensé, ni les coups de ce qui ressemblait à une batte de baseball, ne parvenaient à le ramener à la réalité. Néanmoins, les pleurs suivaient bien souvent les rires, car les souvenirs remplaçaient rapidement les pensées et dans ces conditions, ce n'étaient jamais les souvenirs les plus agréables que l'on voyait resurgir... Les Pères Fondateurs le prenaient pour un fou et sans doute avaient-ils raison.

Lorenzo fixa l'encadrement de la porte et fait nouveau et étrange, la lumière se fit alors qu'il n'avait pas le sac sur la tête. L'Italien cligna des yeux et se força à les laisser ouverts, il devait profiter de cet instant où sa vue lui était rendue. Il avait eu peur pendant un moment de ne plus être capable de voir à nouveau mais manifestement ce n'était pas le cas. Sa vision resta troublée pendant quelques secondes avant que le voile flou ne se dissipe complètement. C'est alors qu'il aperçut, un homme aux cheveux gras, la mine patibulaire, marcel et veste de jean sur le dos, il avait tout du truand. A ses cotés, une asiatique qui devait avoir une trentaine d'années, chétive et plutôt jolie contrastait avec la brute épaisse qui l'accompagnait. Quel duo pittoresque! L'arsouille avança sa main et le prisonnier recula aussitôt, plus par réflexe que par peur. Pourquoi c'était pas la petite asiatique qui venait le toucher?

La situation était nouvelle et brisait l'insupportable monotonie dans laquelle Lorenzo avait été enfermé depuis des mois. Nerveusement, il se mit à rire devant la grotesque image qui s'offrait à lui. Les larmes lui montaient aux yeux tant tout ceci lui semblait risible et après une petite minute d'hilarité incontrôlable, il parvint enfin à retrouver son calme, suffisamment pour parler.

"Eh... Dites..." Commença-t-il en levant la tête vers le plafond, l'air amusé. "Vous avez trouvé une brute qui sait foutre des pins plus forts que les autres?"

Mais quelque chose clochait. Les Pères Fondateurs n'étaient pas sans savoir, qu'ainsi exposés, ils étaient vulnérables. Lorenzo tenait peut-être là son billet de sortie, c'était une occasion qu'il ne devait pas louper. Pour autant, il se retint d'agir. Si ces personnes avaient ouvert sa cellule et n'avait pas fait preuve de la coutumière prudence de ses geôliers, peut-être n'étaient-ils pas des ennemis... De plus, à entendre le bruit ambiant, tout ne semblait pas se passer normalement dans le bâtiment où il se trouvait...

"Chers visiteurs... Auriez-vous l'amabilité de décliner votre identité?" Demanda le captif d'une voix formelle.

Face à des inconnus, il fallait être poli, c'était là une règle que l'on s'était efforcé d'apprendre à Lorenzo. La première impression était toujours la plus importante, c'est pourquoi et malgré la situation, l'Italien s’évertuait à préserver les convenances. Un sourire béant vint étirer ses lèvres tuméfiées. Ca aussi ça plaisait toujours aux gens. Un mince filet de sang s'écoula alors d'une de ses plaies à la lèvre inférieure, suite à l'usage abusif de ses zygomatiques ; les différentes taillades n'avaient pas eu le temps de cicatriser depuis la dernière visite des Pères Fondateurs...

Le gros pompier eut un geste de recul. Il avait vu juste, c'était pas le président ! Normal.

"Heuaah !!" Grimaça-t-il en voyant la gueule cassée du captif et le filet de sang qui dégoulina de ses lèvres crevassées. L'homme était sur les nerfs, il avait refusé le contact. Mieux valait ne pas insister, Timour savait, en ayant espionné les émotions d'Emily, que la captivité rendait nerveux, même sous couvert de calme apparent. Ce drôle de gaillard souriait comme s'il s’apprêtait à passer une super soirée de jeu en réseau online du côté des forces de l’Étoile Noire ! Et tout portait à croire que c'était le grand foutoir dans sa tête.

"Ouais moi c'est Cupidon et elle c'est Pikachu. On est des X-Men, on tatane la gueule des PF. T'as du sang là."

Dit-il de sa voix rauque en désignant de son épais doigt tatoué sa propre lèvre.

"T'inquiète mec, on est tes sauveurs. Y'a encore Draak, Dreams, et Chimère, notre boss, qui est parti fracasser un mutant overbalèze. Il en a pour deux minutes. Toi tu vas pouvoir te venger sur ces salauds de PF !" S'écria-t-il pour l'encourager.

L'empathe ne crut néanmoins pas percevoir la moindre rage dans l'esprit du captif. Étonnant ! Il prit le temps de lui désigner du pouce la bagarre qui faisait rage dans le couloir, mettant aux prises une satyre, un jeune adulte pompier asiatique et une géante bleue. Il ne laissa pas Jun en placer une.

"Tu sais faire quoi ? Un truc utile j'espère car faut encore qu'on tire nos culs d'ici et on est genre tout au fond du Pentagone j'te signale ... Bon nous on sauve encore le président des Etats-Unis donc te barre pas direct !! Enfin t'es libre mec. Tu pourras me remercier un de ces jours, moi et ma gonzesse !"

Débita Timour en se grattant frénétiquement la joue et la gorge. Il n'était pas spécialement pressé de rejoindre la mêlée. Après tout, ce mec avait été un hôte de marque des terroristes, il devait être capable de plein de trucs cools. Ou bien c'était juste un directeur de banque qui refusait de donner les codes de ses coffres ? Non franchement ce ne serait pas classe de la part des PFs. Il guetta la réaction du miraculé avant d'entreprendre le moindre retour dans la mêlée.

Le flot de paroles et d'informations exprimées par le roublard était un véritable tsunami émotionnel pour Lorenzo, qui sentit des larmes couler le long de ses joues. C'était des larmes dont l'origine n'était pas clairement identifiée ; elles mêlaient la joie, la surprise, l'hilarité et même la peur, mais elle tenaient surtout au bouleversement intérieur que vivait le captif retenu depuis trop longtemps dans cette cellule. Lorenzo remarqua le cri de dégoût du pompier qui contrastait avec son faciès et sa carrure qui avaient tout du gros dur que rien ne pouvait impressionner. Lorenzo n'exploita pas ce détail toutefois, il était bien trop absorbé par les explications de son interlocuteur.

Ces visiteurs n'étaient pas des ennemis, il s'agissait même d'alliés puisqu'ils affrontaient les Pères Fondateurs! La brute évoqua des noms de codes, le combat qui se déroulait dans le couloir et lui proposa même de se venger... A cette injonction, Lorenzo ne ressentit rien. Il y a quelques mois oui, il se serait bien vengé mais là, c'était le vide total, il n'en avait pas l'envie. La vengeance reviendrait, bientôt mais pas tout de suite... Il voulait juste recouvrer sa liberté et surtout revoir la lumière, quel qu'en soit le prix.

Le sang coulant de sa lèvre goutta sur le sol et l'Italien passa machinalement sa manche sur sa bouche pour essuyer la plaie. Ces X-men étaient venus sauver le président. Ils devaient être bien préparés pour s'attaquer ainsi au...Pentagone, car tel était le lieu dans lequel il avait été transféré.

"Cela fait longtemps que je n'ai pas été utile... Je ne suis plus sûr d'être capable de faire quoi que ce soit..." Songea à haute voix Lorenzo. Il avait déjà dû mal à sentir ses membres, à sentir même sa conscience alors faire usage de son pouvoir... Il aurait déjà certainement beaucoup à faire sur sa propre personne et il n'osait inspecter son organisme après ces mois passés ici... Le manque de nourriture, les coups, l'absence de lumière et l'isolement l'avaient considérablement affaibli, tant physiquement que mentalement. Aurait-il seulement la force de s'échapper? "Oui, je peux au moins faire ça..." Déclara le prisonnier alors que son sauveur venait d'indiquer que des remerciements seraient appréciables. "C'est vital."

Ce qu'il avait vécu dans cette cellule était une chose qu'il devait oublier mais que jamais il ne devait revivre. A ce titre, personne ne devait avoir à subir cela. C'est pourquoi le président des Etats-Unis devait être sauvé de l'enfer...

"Il faut libérer le président..." Il vivait peut-être dans le noir lui aussi... Dans la solitude... Peut-être avait-il sombré dans la folie... Chaque seconde passé dans ce genre de cachot était capitale et porteuse d'une terrible angoisse qui détruisait peu à peu son occupant. "Maintenant. Il faut y aller tout de suite. Nous n'avons pas de temps à perdre."

Le sourire béat avait disparu des lèvres de l'Italien, remplacé par une moue résolue. Il prit alors la direction de la sortie en passant devant le pompier et l'asiatique...

Son poursuivant était parvenu à se maintenir debout, mais s'était détaché du groupe. Walentyn espérait que les gosses mettraient ce temps à profit pour atteindre leur objectif. Quant à lui, il devait se débrouiller comme il pouvait. C'était bien la première fois qu'il affrontait un adversaire aussi imposant, et blindé qui plus est, ce qui excluait tout recours à une beigne bien sentie.

L'armure devait booster la force du type à l'intérieur, si type il y avait. Un instant, le Polonais envisagea de tenter de raisonner l'homme-robot, ou du moins de l'effrayer en lui parlant de la chute des Pères Fondateurs, mais le bloc de béton arraché au mur le convainquit aisément que l'heure était à l'action et non aux palabres. Chimère avait survécu à l'éboulement du repaire des Morlocks londoniens, c'était pas pour finir écrasé sous un parpaing du Pentagone...

Profitant de ce que le robot armait son tir, Walentyn se mit à courir vers lui, jusqu'à être assez près pour glisser sur le sol mouillé comme s'il effectuait un tacle, afin de passer entre les jambes du géant.

Mbarou ne parvint pas à retenir un grognement quand elle se rendit compte que la satire était increvable. Alex n'avait sûrement pas pu effectué son attaque, le géant devait l'en empêcher. Il fallait trouver autre chose pour vaincre cette agile charogne. Draak pensait qu'elle était toujours la cible, mais elle se rendit vite compte que la petite chèvre en voulait maintenant à Alex, comme le confirmait celui-ci avec ses cries. C'était le bon moment pour attaquer, alors que la satire était concentrée sur le pauvre Dreams.

La géante s'envola à toute vitesse pour couper la route à la satire et surtout pour l’empêcher de faire du mal à Alex.

Sans l'intervention providentielle, que d'aucuns nommeraient sacrifice, de Draak, Dreams aurait sans doute fait la connaissance du crâne cornu de la satire, pour des résultats potentiellement problématiques. Mais la géante bleue s'interposa et coupa la trajectoire de son adversaire qui perdit l'équilibre et alla percuter le mur sans parvenir à conserver son équilibre. Elle tenta de se relever, mais ses gestes paraissaient lents, somnolents, et elle finit par s'endormir tout à fait. Fait notable, elle ronflait.

De son côté, Chimère avait parfaitement attiré l'attention du colosse, qui tenta de conserver sa visée lorsqu'il entama sa glissade. En tentant de pivoter, son pied glissa et, malgré quelques gestes de rattrapage désespérés qui créèrent un second trou dans le mur, il s'étala tout à fait sur le dos, incapable de se relever.

Le troisième larron était toujours assis, et sanglotait de plus en plus fort. A sa ceinture, Walentyn trouva un passe magnétique qui lui permit d'ouvrir la seconde cellule fermée, dans laquelle se trouvait un visage que tous avaient déjà vu, à la télévision ou dans un magazine.


Le président Mike Woodward s'était levé, alerté par le tumulte du couloir, mais ne put réprimer un geste de surprise en découvrant l'identité de ses sauveurs.

- Vous n'êtes pas des militaires...Bah. Au temps pour la gloire des marines. Merci à vous.

Les deux prisonniers libérés, Chimère n'éprouva aucune difficulté à générer une illusion transformant leur groupe en une des multiples escouades parcourant chaotiquement les travées du Pentagone. Si leur camion avait été identifié comme la source de la menace - lorsqu'ils s'en approchèrent, ils virent une équipe de techniciens en train de l'inspecter de fond en comble sous le regard suspicieux de plusieurs gardes - d'autres véhicules n'étaient plus aussi surveillés. C'est donc dans un minibus noir que les Bloody Mary passèrent les checkpoints.

La route fut sans encombre jusqu'à New York, où le président demanda à être déposé dans un hôtel, et non dans un lieu public où les questions ne manqueraient pas de fuser sur les circonstances de sa libération - aux doutes sur la façon dont il présenterait l'affaire, il opposa le risque pour les mutants de passer de longues semaines dans des cellules de la CIA, parole présidentielle ou non.

Toujours accompagnés de Lorenzo, les Bloody Mary purent ensuite se rendre à l'aéroport JFK, leur dernière étape avant San Francisco.

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Voici la fin de cette mission que vous aurez, je l'espère, appréciée.

Les points sont attribués comme suit :

Citation :

Walentyn gagne 1 point de pouvoir
Timour gagne 2 points de pouvoir et 1 point de réputation
Mbarou gagne 2 points de pouvoir et 2 points de réputation
Alexander gagne 2 points de pouvoir (Nb : rien à redire sur ta participation, mais étoffe tes posts à l'avenir où ton score s'en trouvera réduit)