Londres-Une petite tasse de thé?

Invité

Jude baissai les yeux vers son thé et fronça délicatement le nez. Pas encore. Il devait le laisser infuser encore une poignée de secondes. Le jeune homme était tranquillement installé à une table du Tea Palace, ses longues jambes drapées de tissu sombre étendues devant lui, les chevilles croisées. Bien entendu, ses chaussures vernies brillaient comme des miroirs , le pli de son pantalon et le tombé de sa veste étaient parfait. Le délicat creux entre ses clavicules était encadré par le col de sa chemise blanche à fines rayures ton sur ton, sa longue écharpe et son manteau posés sur sa chaise. Ses boucles et ses oreilles étaient dissimulées sous un gavroche assorti à son costume.

Bref, il dégoulinait à la fois d'élégance et de suffisance. Rien de nouveau sous le soleil... Enfin, les nuage du jour. Le jeune brun se servit méticuleusement un tasse et la sirota d'un air absent, le regard perdu au loin. Délicieux, il fallait le dire. Le jeune mutant réfléchissait. Il devait décidé où il voulait aller. En faculté? Il s'y ennuierai à mourir. Rester en Angleterre? Il n'en avait pas particulièrement envie. Il voulait quelque chose de nouveau, d’excitant. Sa queue dissimulée par son manteau battait lentement la mesure.

Il s'ennuyait tellement... Comment décider où partir? Comment collecter assez de données pour prendre une décision correcte? Pff... Il ne voulait pas d'un voyage organisé. Il voulait faire ce qu'il voulait. Garder son petit confort, mais étendre son terrain de chasse. Tout cela méritait réflexion, beaucoup de réflexion. Jude se resservit une tasse. Il y avait du monde. Après tout, il avait qu'il y aurait de l'animation en choisissant Convent Garden.

Son frère n'avait même pas pu se libérer. Il aurait bien aimé pouvoir lui parler. Non pas que son avis eut été intéressant, mais réfléchir à voix haute paraissait moins bizarre si l'on avait un interlocuteur. Même si son interlocuteur était complètement largué, ce qui arrivait... Souvent. Hm. Passons. Il contempla sa théière vide, émiettant la pâtisserie innocente qui attendait dans sa petite assiette.

[Bonjour et bienvenue ! Je te demanderai tout d'abord de préciser dans le titre de ton sujet la ville où se déroule cette scène, et de lier ta fiche en signature. Bon jeu !]

Les clients n'abondaient pas au Tea Palace à cette heure-ci. Quelques vieux habitués à l'allure plus ou moins austère étaient chacun installés à une table différente, mais les employés n'avaient pas fort à faire. D'ailleurs, deux des barmans, ayant fini de laver les tasses, étaient ostensiblement en train de rire en regardant quelque chose sur le téléphone de l'un d'eux.

Seule une petite brune continuait à s'affairer un peu partout. La serveuse qui avait apporté son thé à Jude n'était plus là - le mutant avait été son dernier client avant de débaucher et de rejoindre son petit ami qui l'attendait à l'extérieur - et elle devait donc s'occuper du nettoyage, rangement et service pour deux. Elle semblait stressée et malhabile, et faillit faire tomber plusieurs tasses de son plateau en le rapportant vers l'évier. Elle s'épongea le front, puis refit le tour du comptoir et s'approcha de la table de Jude.

Londres-Une petite tasse de thé? Ellen-page-whip-it-trailer

- Bon...jour. Hum...avez-vous terminé ? Euh, non, pardon. Sou...souhaitez-vous autre chose ?

Son ton était timide et hésitant, et sa voix mal assurée. Pour confirmer cette observation, elle ajouta sur le ton de l'excuse.

- Excusez-moi, c'est mon premier jour.

Elle tenait un stylo dans une main et un bloc-notes dans l'autre, et se tenait un peu trop prête à noter toutes les nouvelles commandes de Jude. Elle avait regardé les étranges oreilles du jeune homme avec curiosité, mais sans dégoût ni réprobation manifestes.

Invité

Jude leva les yeux avec une lenteur sans doute extrêmement pénible pour la jeune femme, ses prunelles bleues semblant voir à travers elle un point situé très, très loin des contingences terrestres qu'elle représentait. Son regard fini par se focaliser, et il la considéra avec ce qui pouvait passer pour un semblant de surprise. Comme d'habitude, il s'était laissé entrainer par ses pensées, et le retour sur terre le perturbait. Il était à des années lumière de cette table de Londres, essayant de trouver un lieu où il pourrait se rendre, un lieu excitant et nouveau sans être complétement dépourvu de confort. Le saint Graal, rien de moins. Comment voulez vous penser à un thé dans ces conditions?

"Votre premier jour, hm."

Son ton était absent, indifférent. Il cligna des paupières et se redressa un peu, rajustant son gavroche en remarquant le regard de la jeune femme, par pure réflexe. Si elle n'avait pas l'air réprobatrice, il n'avait pas envie qu'il vienne à l'un des autres clients la fantaisie de crier au monstre, merci bien. Les imbéciles, ce n'est pas ce qui manque, hélas. Il reporta enfin toute son attention sur la jeune femme, une esquisse de sourire au coin des lèvres. C'était l'air le plus aimable qu'il avait en rayon à ce moment là, alors autant s'en contenter. Il se tapota la lèvre pensivement avant de croiser les mains sur son giron.

"Une théière de Oolong cette fois, et sans gâteau, je ne voudrait pas avoir un autre meurtre de pâtisserie sur la conscience."

Bon, aimable n'était peut-être pas le mot exact, mais passons. Le jeune mutant se dit -trop tard- qu'il aurait pu faire un effort, mais comme d'habitude, l'idée lui était venue après. Tout était tellement cérébral chez lui... Dans un mouvement d'impatience, sa queue balaya le sol avec un chuintement feutré. Au moins une chose de spontanée chez lui, les réactions épidermiques de son côté félin. Quoique, pour le moment, il n'avait encore feulé sur personne. Le grand brun ramena ses jambes sous sa chaise, jettant un regard autour de lui d'un air blasé.

L'heure avançait, et la foule qui emplissait le salon de thé avait reflué comme une marée. Être le dernier client ne le dérangeait pas, au contraire; moins il y aurait de personne à lui hurler dans les oreilles, plus il serait ravi. Pourquoi est-ce que le gens se sentaient ils à ce point l'obligation de parler aussi fort lorsqu'ils étaient en société? Sa propre voix, basse et profonde, disparaissait souvent sous celles des autres, et forçait miraculeusement ses interlocuteurs à parler plus bas s'il voulait l'entendre -et c'était le but de la manœuvre, et pas encore une façon d'enquiquiner son monde, quoiqu'en pense sa douce figure maternelle-.

Le jeune homme inclina la tête sur le côté, fixant le pauvre serveuse d'un air dubitatif.

"Ça ne doit pas être facile comme boulot."

Compatissant? pas vraiment. Il constatait, sans plus.

A peine Jude eut-il commencé à prononcer sa commande que la serveuse commença à la rédiger, comme effrayée d'en manquer une miette. Elle marmonnait même à voix basse :

- Mmh...Wool, non, pas de W...théière...

Elle termina après plusieurs secondes, et la remarque sembla la prendre au dépourvu, brisant la chaîne d'actions qu'elle avait prévu d'effectuer. Elle bafouilla un peu avant de comprendre qu'il ne s'agissait pas d'un piège à son intention.

- Euh...comm...ah, euh, ben, non, c'est sûr, au début, c'est dur. Mais il faut bien payer ses études.

Elle rangea son carnet dans une poche, le stylo dans une autre, et saisit la tasse vide de Jude avec précaution. Ayant laissé son plateau sur le comptoir, elle se contenta de refermer les deux mains autour de la pièce de vaisselle, pour s'assurer qu'elle ne glisse pas malencontreusement.

Un coup d'oeil vers les autres clients plus tard - et la confirmation qu'ils n'avaient pas besoin d'elle acquise - elle poursuivit la conversation.

- Vous aviez l'air...songeur ? demanda-t-elle comme si le mot qu'elle avait choisi n'était pas adéquat. Vous avez des soucis ?

Invité

Malgré le gavroche qui les couvrait, les soyeuses oreilles surdimensionnées du jeune homme tiquèrent en entendant la jeune femme marmonner. Wool? Pauvre, pauvre de nous... Comment voulez vous être servit correctement si personne ne prenait la peine d'instruire convenablement les servi- Serveurs. Hm. Jude se retient de s’ébrouer d'un air vaguement méprisant, ne sachant pas exactement si c'était là son charmant caractère qui s'exprimait où son petit problème de fourrure. Les deux devait vraisemblablement être d'accord. Pour une fois

Les bafouillages de la pauvre jeune femme ne l'encouragèrent même pas à se montrer compréhensif. Le jeune mutant se redressa en plissant légèrement les yeux, avait l'air caractéristique de celui qui a repérer une petite souris à l'air particulièrement appétissant. Qu'il possède des griffes rétractiles et une longue queue poilue, pour l'instant complétement figée au ras du sol, n'était pas fait pour rassurer quiconque reconnaissant cette expression. Son propre frère sentait dans ses cas un déplaisant frisson à la base de sa nuque, sans doute parce qu'il savait qu'une remarque étrange et peut-être même blessante allait suivre.

La bombe fut promptement désamorcée, même si c'était par hasard. Jude écarquilla légèrement les yeux, surpris. Lui, Avoir des soucis? Non vraiment, ce n'était pas son genre. Se pencher sur un problème épineux, dérouler un écheveau de faits et de théories entremêlées pour en retirer la substantifique moelle... Ça oui. De soucis... C'était un truc de prolétaire ça. Le jeune homme inclina la tête sur le côté, comme s'il soupesait la question de la jeune femme.

"Je n'appellerai pas ça des soucis..."

Son regard s'évada un instant, et il se laissa à nouveau aller sur le dossier de la chaise, effectivement songeur.

"En fait... Je prévoit un voyage... Sans savoir où aller. C'est gênant."

Surtout quand les limitations n'inclus rien d'aussi ridicule qu'un budget limité. Rien que d'y penser... Non, définitivement pas de limitation de budget.

Jude put voir la petite serveuse soupirer, hésiter, et jeter un coup d'oeil prolongé en direction des cuisines. Puis elle choisit de prendre une pause syndicale et reposa délicatement tout ce qu'elle avait dans les bras sur une serviette en papier qu'elle fit apparaître d'une des poches de son tablier. Elle retira également ses lunettes et se frotta les yeux d'un air fatigué.

- Ca se fait de plus en plus de voyager sans savoir où on va. Genre road-trip. On suit les opportunités. Vous pourriez faire ça non ?

Elle soupira de nouveau et posa son menton dans sa main, l'air ailleurs.

- Si j'avais un peu d'argent, je ferais pas ce boulot. Je partirais...j'sais pas, en Asie ?

Enfin, comme si elle s'en apercevait pour la première fois, elle reposa les yeux sur Jude et ajouta :

- Elles sont sympa vos oreilles !

De temps en temps, elle jetait des coups d'oeil à la cuisine pour s'assurer que nul patron ne remarquait son manque d'enthousiasme.

Invité

Road-trip? Comme dans 'voyager dans une voiture sans savoir où dormir'? Oh pitié... Il avait besoin d'un endroit où dormir. Confortablement. Hm... Minute... Après tout, il y avait toujours moyen de faire un chèque convenable pour s'installer dans un hôtel correct. Le jeune homme se tapota la lèvre inférieure sans se départir de son air songeur. Mais où faire ce fameux road-trip? On ne revenait au point de départ. Où partir. Le continent? Pff... C'était vu et revu. Peut-être même que se mère y serait, et il devrait faire acte de présence dans une réception barbante, façon fils prodige. Très peu pour lui, merci. La jeune femme ne semblait pas décidée à reprendre son rôle de serveuse. peut-être pourrait elle servir de support pour ses réflexions? Ce serait gentil de sa part. Il faudrait juste qu'elle arrête de parler. C'était perturbant, parce qu'il ne pouvait pas s’empêcher d’entendre.

Fichu oreilles.

Et puis il n'avait pas envie d'aller en Asie. Imaginer Croiser une bande d'adolescentes japonaises en voyage à Londres sans couvre-chef une fois lui avait suffit. Leurs hoquets de surprise suivit de kawaii desuuu stridents l'avait poursuivit un certain temps. Pas l’Asie donc. Il releva les yeux à l'instant où la petite serveuse mentionna ses oreilles, qui se collèrent automatiquement à son crâne, dérangeant son gavroche. Jude réprimanda un mouvement d'impatience et redressa l'objet d'un air vaguement ennuyé.

"Mh. Merci."

Qu'on évoque ses particularités dans un environnement où il se sentait vulnérable le mettait mal à l'aise. Sa longue queue s'enroulait spasmodiquement sur elle-même et ses oreilles soyeuses étaient agitées de tics nerveux. Ne pas être capable de maitriser ses réactions l'agaçait d'autant plus. Il se mit à pianoter sur la table, dardant un regard bleu sur la jeune femme.

"vous ne comptez pas faire autre chose? vous comptez rester serveuse? Enfin, je suppose qu'il faut s'en donner les moyens..."

Ah oui. Le Jude agacé devient vite acide. Surtout lorsque personne n'est incriminé.

La serveuse fut surprise de ce revirement d'humeur soudain chez son client. Elle ne trouvait visiblement rien de blessant à ses propos, et comprit qu'elle n'était plus la bienvenue dans l'esprit de Jude. Elle lâcha simplement :

- Ca fera trois livres quarante. On ne fait pas de change au-dessus de cinquante livres.

Elle reprit la tasse sale et se retourna sans rien ajouter. Ce fut à ce moment qu'elle heurta un client qui était apparu comme par magie derrière elle. La tasse fut donc lâchée et explosa sur le sol en une multitude de petits fragments colorés. Le nouveau venu ne s'en préoccupa même pas et s'assit sur la chaise en face de Jude. Il portait un sweat à capuche qui lui cachait majoritairement le visage, et la retira pour prendre la parole.

Londres-Une petite tasse de thé? Galariens

Londres-Une petite tasse de thé? Galariens

Son visage était long et d'une forme étrange, en plus de sa couleur bleutée et de la taille plus qu'exceptionnelle de ses yeux très noirs dont les paupières battaient par le bas. L'arrière de son crâne se terminait par deux proéminences pointues qui semblaient rigides : elles restaient en l'air et ne retombaient pas sur l'arrière de sa tête. Malgré l'étrangeté de sa physionomie, il était assez clair qu'il était dans un état agité, voire excité.

- Salut. Je suis dans un merdier pas possible. Dis moi que tu peux m'aider.

La serveuse de son côté avait voulu incendier le maladroit, mais ses mots moururent dans sa gorge lorsqu'elle découvrit son visage. Entre le mutant grincheux et le mutant pressé, elle considéra finalement qu'il n'y avait pas grand chose à faire, et se contenta d'aller chercher pelle et balayette dans un local situé près des toilettes.

Jude put voir que son nouvel interlocuteur possédait en outre des mains à quatre doigts, animées de mouvement perpetuel : rongements d'ongles, tournages de pouces et arrachage de peaux se succédaient à un rythme frénétique, preuves de son extrême tension qui dénotait avec l'ambiance feutrée de l'établissement. Cependant, la sérénité des autres clients n'avait pas été troublée par sa présence, tout au plus un regard curieux fut-il jeté dans sa direction avant de reprendre la lecture d'une des nombreuses rubriques du Times.

Invité

Pas de change au dessus de Cinquante livres? voilà qui était ennui... Jude sursauta brusquement sur sa chaise, son gavroche roulant à ses pieds sous la poussée de ses oreilles, sa longues queue duveteuse complètement ébouriffée. Il y avait... il y avait un truc à capuche juste derrière la jeune femme. Le mutant retint de justesse le feulement qui lui montait aux lèvres. La chute de la tasse lui offrit une diversion bienvenue, le temps de se calmer un peu. Il n’aimait pas être surpris, vraiment pas. Son côté félin réagissait en général le premier, et ça le jetait dans une humeur de chien, sans mauvais jeu de mot.

Il plissa les yeux d'un air agacé, la queue battant nerveusement l'air derrière lui, les bras croisés. Qu'est ce c'était que ce truc qui se permettait de la surprendre comme ça? Les gens n'ont ils plus aucune éducation? C'était un monde!

L'apparence pour le moins singulière de son vis à vis eu le mérite d'arrêter quelques secondes les mouvements saccadés qui l'agitait, ne laissant comme mouvement chez lui que celui de ses oreilles frémissantes, mais ce n'était que pour qu'ils puissent reprendre de plus belle. Les paroles de l'inopportun personnage parachevèrent sa mauvaise humeur.

Jude se carra sur sa chaise et réuni le bout de ses doigts, toisant le mutant. Mais pour qui il le prenait, sérieusement? Un saint quelconque? Un bon samaritain? Pire, un wannabe héro? Mais ils s'étaient donné la mot pour être usant aujourd'hui où quoi? Jude laissa le silence s'étirer, tapotant le bout de ses doigts contre ses lèvres, apparemment fasciné par le mouvement des paupières du l'homme bleu. Une fois sur que ce qui sortira de sa bouche serait une réplique glaciale et non un feulement nerveux, Le grand brun se décida à prendre la parole, ponctuant ses mots d'un mouvement de main.

"Premièrement, Je ne vous ai pas donné l'autorisation de me tutoyer, qui que vous soyez. Deuxièmement, je n'ai pas pour habitude de voler au secours de mon prochain, troisièmement, je ne connait même pas la teneur de vos ennuis."

Jude lui accordant trente seconda d'assimilation avant de conclure en croisant paresseusement les jambes.

"Alors pourquoi diable pourrait-je vous aider, sérieusement?"

La nervosité de l'importun sembla monter encore de plusieurs crans, si c'était possible, devant les réactions moins qu'enthousiastes de Jude, et les mouvements de ses mains se firent encore plus frénétiques.

- Alors euh...premièrement je suis désolé de ne pas t...vous avoir parlé correctement, mais j'ai vingt ans et t...vous avez pas l'air beaucoup plus vieux que moi.

Il déglutit pendant que la serveuse revenait avec son matériel de nettoyage sans adresser le moindre regard à la table où se trouvaient les deux mutants. Sa réaction aurait été la même si elle avait été remplacée par un pylône de béton.

- Deuxièmement vous êtes un mutant et moi aussi, je pensais que c'était une raison suffisante pour se filer des coups de main. Et euh troisièmement, j'ai pas encore eu le temps de l'expliquer, mais c'est un vrai merdier.

Le mutant bleu s'exprimait avec un très fort accent irlandais, put remarquer Jude. Il jetait très régulièrement des coups d'oeil à travers la vitre comme s'il s'attendait à voir des tueurs surgir brusquement - ce qui était peut-être le cas.

- J'suis désolé, je suis carrément en panique. Je vous en supplie, ça sert à rien que j'aille voir des humains normaux, la plupart du temps ils partent en courant, quand ils sortent pas un couteau pour me planter.

Son ton était de plus en plus implorant, et il finit par joindre ses mains devant lui, ce qui, pour quelques secondes, fit cesser leurs mouvements.

Invité

Jude arqua un sourcil, fixant sans ciller le mutant. Ils avaient le même age, et alors? Cela ne le dispensait pas d'un minimum de politesse. Les jeunes de nos jours... Cela devenait effarant. Le grand brun écouta la suite de la réponse en inclinant légèrement la tête sur le côté, les oreilles à demi pliées. La solidarité mutante? Parce qu'ils partageaient une mutation, ils devenaient automatiquement membre d'une belle et grande famille? C'était... Mignon? Naïf?... Stupide. Oui voilà, c'était le mot. Leur mutation n'était même pas la même! Ce n'était pas comme si un mutant félin lui aurait réclamé son aide en plus.

S'il y avait bien une chose qu'il reconnaissait, c'était bien que les chats étaient territoriaux et indépendants. Et puis... il commençait à l'énerver, avec ses mouvement de mains là! Il recommença à pianoter, contenant l'envie d'attraper les poignets de son vis à vis et de les clouer à la table. On ne sait jamais, avec une couleur de peau pareille, il serait bien capable d'être venimeux.

"Avoir vingt ans n'est pas une excuse. Cela ne m’empêche pas de me tenir correctement, moi."

Un talent que visiblement tout le monde ne possédait pas, mais passons. En tendant une oreille poilue, Jude détecta l'accent de l'inopportun et fronça délicatement les sourcils. Un Irlandais? Oh bien sur, voilà qui expliquait pourquoi il était un tel balourd. Avec un régime essentiellement constitué de pommes de terres, il ne fallait pas trop lui en demander. Mais tout de même, ces gens là étaient supposé être civilisé non? Parfois, il y a des pulsions colonisatrices qui se perdent.
Carrément en panique? oh, ça devenait intéressant. Vaguement. L'hybride se pencha légèrement en avant, sa longue queue repliée en crosse d’évêque, les oreilles pointées vers l'avant.

"Ce qui ne me dit pas ce qui passe. Je ne fait jamais de promesses, et encore moins lorsque je sais pas de quoi il en retourne."

On se sait jamais, peut-être que cette histoire se révèlerait suffisamment passionnante pour mettre à contribution les capacités d'ex-pilote de courses d'Alfred, son chauffeur.

Les mains du mutant bleu s'immobilisèrent de nouveau - de part et d'autre de sa tête, comme s'il ne pouvait pas croire les bâtons que lui mettait son interlocuteur dans les roues.

- Hé mais gars, je suis dans la merde ! J'ai pas les moyens de me faire annoncer par un majordome !

Son excitation allait croissant, et il se serait sans doute arraché les cheveux s'il en avait eus. Visiblement, il s'attendait à un peu plus de coopération de la part d'un de ses semblables.

- Je me suis fait piéger ! J'devais retrouver Mai y'a une heure pour me tirer d'ici, c'est trop la galère depuis que le boss est mort, j'veux voir ailleurs et c'est pas comme si j'étais un Londonien pur jus. Mais c'était un piège ! Faut que je la voie pour de vrai maintenant, sinon je vais me faire buter. J'en suis sûr.

La tirade avait été débitée d'un trait, presque sans respirer. Le mutant darda ses grands yeux noirs sur Jude en essayant d'y trouver des signes de soutien, ou au contraire de réprobation qui le pousseraient à se lever de sa chaise et à aller chercher de l'aide ailleurs.

Invité

Jude plissa légèrement les yeux, presque intéressé. Un complot? Ou tout du moins une sombre histoire de trafic quelconque? Voilà qui devenait intéressant! Voilà qui était motivant! C'en était presque assez pour lui permettre de ne pas entendre le nombre de grossièretés qu'il débitait à la minute. Le grand brun se massa délicatement les tempes, songeur. Il manquait de données, c'était indéniable. Il fixa son vis à vis droit dans ses gros yeux noirs, une main levée, trois doigts repliés contre la paume.

"Un..."

il replia un doigt de plus.

"Qui est cette Mai? Deux..."

Il replia le dernier doigt.

"Qui vous a piégé?"

Le jeune homme était passé de la franche désapprobation à un léger intérêt. Maintenant, il voulait savoir de quoi il en retournait. Il voulait les tenants et les aboutissements de l'histoire. Non pas qu'il fut surprenant qu'il tel apache se soit attiré des ennuis. Avec un tel manque d'éducation, il n'avait même pas besoin d'être un homme bleu pour s'attirer des problèmes. Enfin, pour ce qu'il en disait...

"Admettons que j'accepte de vous aider. Et je parle là au conditionnel."

Jude appuya sa remarque d'un tapotement péremptoire sur la table. Il ne faudrait pas qu'il se fasse des idées.

"Est-ce que vous me raconterez toute l'histoire?"

Le yeux bleus du mutant de plantèrent dans ceux de son vis à vis, impétueux et exigeants. Jude n'avait pas l'habitude qu'on lui dise non très longtemps, et il comptait bien avoir un oui une fois encore.

L'excitation du mutant bleu perdit plusieurs crans lorsque la réponse de Jude s'avéra différente de "dégage de ma table". Il restait bien trop nerveux pour le bien de son organisme, mais donnait moins l'impression d'avoir bu six litres de café.

- Ouais pas de prob, j'ai rien à cacher t'façon. Si tout se passe bien, je me tire et j'peux te dire que Londres est pas près de me revoir.

Il sortit de la poche intérieure de sa veste à capuche un paquet de chewing-gums, en porta un à sa bouche, et après une brève hésitation sur la démarche à suivre se contenta de laisser le paquet ouvert devant Jude. Il était pessimiste sur les chances que son interlocuteur apprécie le geste.

- Alors Mai c'est une mutante aussi. On fait partie des Morlocks, et depuis que notre boss d'avant est cané, c'est elle qui devrait prendre la succession. Et franchement, si ça s'était passé tranquille ça aurait été parfait.

Il ne faisait des pauses que pour mastiquer bruyamment.

- Mais tout le monde est pas d'accord, y'en a qui disent que Mai est pas assez dure et qu'on irait dans le mur avec elle comme chef. Des conneries, si tu veux mon avis. Moi j'étais dans son camp, et tout à l'heure j'étais censé avoir rendez-vous avec elle, elle devait m'envoyer quelque part pour faire du...ah merde comment on dit...du lobbying voilà. Y'a des petites antennes dans d'autres villes et on voulait qu'elles nous soutiennent.

Dehors, le temps avait viré au gris, et il allait sans doute se mettre à pleuvoir sous très peu.

- Sauf que c'était pas un rendez-vous, c'était une embuscade. Ca a commencé par une engueulade, ça a attiré les flics, ils ont essayé de s'interposer et y'en a un qui y est resté.

Enoncer de nouveau les faits semblait faire remonter son agitation, mais il parvint à se contrôler.

- J'étais avec Shad. Lui, il...enfin, il peut se cacher, y'a pas de souci. Mais moi je peux pas, et j'suis facile à reconnaître. Du coup ben...faut que je me tire. Que je trouve Mai, et qu'elle m'envoie n'importe où. J'vois pas d'autre solution.

Invité

c'était un oui -évidement-. Et il se détendait déjà, alors que Jude avait bien précisé que c'était un si. Ah les humains... Toujours les mêmes à entendre que ce qui les arrangent. Franchement... Enfin, il semblait près à lui donner plus d'informations, et c'était le but après tout. Des informations, et pas des chewing-gums, auxquels Jude accorda à peine un regard suprêmement dédaigneux.

Sérieusement, un chewing-gum... Jude préféra s'intéresser à ce qu'il disait. Il écouta sans l'interrompre, gardant ses questions pour la fin. Morlocks? Qu'est ce que c'était que ça? une organisation clandestine de mutants? Des mutants à durée de vie limitée visiblement. La concentration de l'hybride ne le préservait hélas pas du bruit de mastication qui accompagnait chaque pose, le mettant au supplice.

Il n'allait pas tarder à se jeter sur lui toutes griffes dehors et lui arracher cette irritante boule élastique, et tant pis si la moitié de sa bouche venait avec. Jude se pinça l'arête du nez et laissa tomber son envie de violence pour le moment. Donc, ce mutant était du côté du gentils, et comme d'habitudes les gentils se faisait avoir. Il avait presque envie de dire que c'était bien fait, mais il ne pouvait décemment pas applaudir les actes des méchants. Allait il se mettre du côté de la veuve et de l'orphelin? Peut-être pas. Mais du côté du reprouvé de justice en fuite? Voilà qui était beaucoup plus drôle! Jude se redressa et inclina légèrement la tête sur le côté, la mine aussi gourmande qu'un chat face à un bol de crème.

"Donc.. Si je résume, vous êtes un criminel en fuite, au minimum complice d'un meurtre et membre d'une organisation clandestine de mutants nommée morlocks?"

Jude laissa passer quelques secondes, les mains réunies par le bout des doigts.

"Et comment êtes vous supposé la retrouver, cette dénommée Mai?"

- Mais je suis pas complice ! Tiens, regarde.

Il sortit un emballage de chewing-gum d'une de ses poches, un papier froissé qui y avait sans doute résidé plusieurs semaines et avait perdu toute coloration. Tout juste quelques éclats métalliques y demeuraient-ils.

Il le posa sur la table, et mit ses deux mains de part et d'autre, à une vingtaine de centimètres de chaque côté, paumes vers l'intérieur. Il commença à remuer très légèrement les doigts, et le papier se souleva d'abord, avant de commencer à voleter à droite et à gauche, porté par un petit courant d'air invisible. Après une petite dizaine de secondes de démonstration, il reposa ses mains à plat, et tout cessa.

- Voilà, c'est ce que je peux faire. Même avec du papier coupant c'est pas dangereux. Et non, je peux pas soulever un toit si je m'énerve. Shad il rentre dans les objets, pareil, pas facile de tuer des gens.

Il soupira.

- J'dis pas que je suis un saint, mais je pense pas mériter de passer soixante ans en taule pour un truc que j'ai pas fait. On était censés avoir un débriefing avec Mai, à dix-neuf heures dans une de nos planques, elle y sera sûrement. Soit parce qu'elle sait pas ce qui s'est passé, soit parce qu'elle sait que ceux qui y vont sont dans la merde. C'est pas le genre à se défiler.

Il sortit de la boîte un autre chewing-gum et le porta à ses lèvres. Le goût du premier avait sans doute disparu.

- Mais je pense qu'il y'en a un qui nous a vendus, Shad et moi. Du coup, les sales gars de tout à l'heure sont ptet au courant. Y me faudrait un abri pour les quelques heures d'attente, et ensuite quelqu'un pour m'accompagner au point de rendez-vous, en fait.

Invité

Jude observa la petite démonstration avec une moue presque... Déçue. Ce n'était franchement pas spectaculaire. Avec une telle apparence, on aurait pu penser... Quoique. Justement, il ne pouvait tout de même pas avoir le beurre et l'argent du beurre, il faut un minimum de classe pour ça. Conclusion, il était bleu et... et c'était tout. What a pity. Et il disait ne peu être coupable. C'était définitivement moins drôle. L'hybride inclina légèrement la tête sir le côté, l'air interrogateur.

"D’accord, vous ne pouvez pas faire léviter de lourdes charges... Mais qui sait, vous êtes peut-être venimeux?"

... Avec la tronche que vous vous payez, ça serait un minimum. Mais même le fils Gentry n'était pas cruel à ce point. Et il ne disait pas 'tronche' à haute voix, c'est vulgaire. Et le brun était peut-être un certain nombre de choses, mais vulgaire, il évitait autant que possible. Question d'éducation.

Et cet insupportable chewing-gum... Il allait se mettre à hurler. Vraiment. Le jeune mutant tenta de se calmer en se vidant la tête, mais le bruit de mastication lui hachait le cerveau. Sa main partie toute seule, et des griffes acérées se plantèrent dans l'innocent paquet de pâtes à mâcher, le transperçant proprement. Oops. Jude grogna sourdement et récupéra sa main, paquet compris, ses oreilles à nouveau agitées de tics pleins de mauvaise humeur. Il se dépatouilla de la chose et rentra précautionneusement les armes du crimes, avant d'envoyer le corps de la victimes dans la poubelle la plus proche.

"Plus de mastication, par pitié."

Le jeune homme entreprit de lisser ses manches et de rajuster son col avec des petits geste délicats et nerveux. Il était agacé, et étant incapable de le cacher, il l'était d'autant plus.

"Dix neuf heures..."

Il laissa passer quelques secondes de flottement, les yeux dans le vague. Il réfléchissait. L'héberger chez lui... Absolument pas envisageable. L’emmener au Ritz... Cela serait sans doute extrêmement drôle, mais sa famille le déshériterai aussi sec. Il pris se tapota la lèvre de l'index, songeur, avant d'envoyer à nouveau un regard aussi bleu que perçant sur son vis à vis.

"Donc, quelques heures de fuites, c'est bien cela... Mon chauffeur trouvera ça... Comment dit-on.. Barbant*"

Il haussa les épaules.

"Mais pourquoi pas? je n'ai rien à faire de mon après midi."

* en français dans le texte

- Non, je suis pas dangereux. On l'est pas tous, t'sais. Généralement, ceux qui le sont deviennent les chefs. Dit comme ça ça fait barbare, mais comme ils sont censés avoir de l'autorité...

Il cessa immédiatement de mâcher en voyant la réaction quelque peu violente de Jude à l'encontre du paquet de gommes. Il resta quelques secondes la bouche ouverte, ébahi, puis s'empressa de cracher dans le cendrier de la table.

- Désolé, se contenta-t-il de dire. Un chauffeur ?

Le ton du mutant bleu indiquait une rafale de questions en rapport avec son assertion, mais l'attitude de Jude le dissuada sans doute de les exprimer à haute voix. Après quelques secondes, il dit simplement.

- Ce serait parfait. Ca me sauverait. C'est au bord de la Lower Lea Valley. Pas loin du vieux village olympique.

Invité

Pas tous dangereux.. Ah, l'éternel ironie de dame nature. Ce pauvre garçon avait l'air beaucoup plus exotique qu'il ne l'était. Et Jude aurait donc pu lui arracher le chewing-gum de la bouche. Mais ça ne se fait pas. Enfin, il lui semblait. Pourquoi est-ce qu'il n'avait jamais un manuel de savoir-vivre sous la main lorsqu'il en avait si cruellement besoin? Il en parlerait avec Alfred. Enfin, plus tard. Pour l'instant, il avait d'autres chats à... Oubliez. Mais le fait que la hiérarchie des Morlocks étaient basé sur le pouvoir... C'était intéressant. Il archiva l'information, songeur. Dans le doute, autant se méfier de tout les mutants plus haut gradé que l'homme bleu, même s'ils ne payaient pas de mine.

Prudence est mère de sureté après tout. Il n'avait aucune envie de servir de punching-ball. C'était d'un banal...

La réaction de son vis à vis à son coup d'éclat lui arracha un semblant de sourire satisfait. Chacun son tour d'être nerveux. Cela avait eu le double mérite de lui faire cracher son chewing-gum et d'éviter des questions aussi stupides qu’assommantes; Oui, il avait un chauffeur. Enfin, un valet. Sa mère entretenait un cheptel de domestiques, alors pourquoi diable n'aurait il pas un chauffeur personnel, croisement merveilleux du pilote de course, du majordome et du confident? Et doté d'une fidélité toute dévouée en plus. La preuve que les chat peuvent apprécier les chiens, pour peu que la hiérarchie soit bien claire. Mais on s'égare, on s'égare... Si tout est parfait, alors...

"Eh bien, plus une minute à perdre."

Le jeune mutant se leva, étirant son mètre quatre-vingt-quinze vers le plafond, ramassa son manteau et l'enfila en un tour de main, attrapa son chapeau et lança un billet de cinq livres sur la table. maintenant que la décision était prise, il ne fallait pas trainer. Jude traversa le salon de thé en quelques longues enjambées et s'arrêta un bref instant à la porte, le temps d'enfiler son gavroche. Un rapide SMS à son fidèle Alfred et ils seraient en route. Enfin, si tout ce passait comme prévu.

Le fidèle Alfred fut au rendez-vous, comme de bien entendu, et comme il l'avait systématiquement été lors des plusieurs décennies passées au service des Gentry. Jude et son compagnon - qui lui avait glissé se nommer Kieran - le virent attendre près de la porte ouverte de son véhicule. Il ne haussa même pas un demi-sourcil face à l'apparence étrange du camarade de son maître, se contentant d'un salut poli quoique solennel qui impressionna le mutant bleu. Celui-ci s'assit délicatement sur la banquette arrière, et toucha délicatement le cuir du bout des doigts tandis que Jude donnait l'ordre de rouler sans but durant plusieurs heures - Alfred répondit simplement que son réservoir ne le lui permettrait pas, et qu'il faudrait au moins faire une halte dans une station-service.

Le trajet se déroula calmement, surtout si l'on comparait l'attitude réservée de Kieran à son blablatage incessant du café. Tout juste celui-ci expliqua-t-il la destination finale, avant de regarder se succéder les rues par la fenêtre avec un air de nostalgie sur le visage.

L'impeccable majordome déposa finalement les deux mutants dans une zone industrielle ni moderne, ni délabrée, de laquelle on pouvait voir le grand stade trentenaire. Il informa Jude qu'il irait se garer à quelques centaines de mètres et qu'il pouvait à tout moment être disponible. Kieran regarda la voiture s'éloigner, puis pointa la direction d'une rue sombre, tout juste assez large pour permettre une double circulation. De part et d'autre se trouvaient les murs de tôle uniformes de deux entrepôts, l'un orange, l'autre blanc.

- C'est par là, le même genre mais en vert pomme. Faut y aller discrétos. Et si tu sens ou vois un truc bizarre, tu me dis surtout. Moi j'ai du mal à m'y repérer.

Car la zone n'était que sporadiquement éclairée par des lampadaires dont les lampes commençaient parfois à montrer de nets signes de fatigue. La circulation londonienne offrait un tapis sonore léger, mais l'ensemble était tout de même remarquablement silencieux.

Invité

Alfred était là, ce cher vieux. Jude eu son habituel sourire appréciateur et se glissa sur le cuir avait l'aisance de née d'une longue pratique. Il s'installa presque langoureusement contre la portière, ses longues jambes confortablement installées, son corps mince à demi enroulé dans son confortablement manteau. Cette voiture était une bénédiction. Tellement silencieuse, feutrée... Avec ce cher Alfred, tellement silencieux, et son jeune accompagnateur... Kieran? oui, Kieran, devenu délicieusement réservé, le brave garçon.

Jude s'enfonça dans le silence comme dans un coussin moelleux, le regard perdu par la fenêtre. Il aimait tellement ce calme... Le ronronnement du moteur... Un peu comme le sien, de fait. Le jeune mutant se secoua mentalement et cessa aussitôt. Il ronronnait inconsciemment de plus en plus. C'était plutôt gênant. Surtout en société. Enfin... Le jeune homme préféra se concentrer. Les Morlocks... Il se demandait quoi faire de son temps, ignorant qu'il était de cette organisation.. Il aurait pu... Non, pas en faire partie -franchement- mais.. Eh bien... faire du mécénat, peut-être? Cela l'aurait occupé au moins. Amusé peut-être. Prendre quelques risques... Tout en étant protégé par son argent... Et son intelligence, ne soyons pas faussement modeste.

Perdu dans ses pensées légèrement mégalomane, le grand brun n'avait pas vu le temps passer. Il glissa hors de la voiture, étira ses interminables centimètres et donna sa bénédiction au diligent Alfred. Rajustant son écharpe, il jeta un regard amusé à son collège colorimètrement contrarié. Un entrepôt vert pomme. Il n'avait pas plus dur, vraiment? Les pupilles de l'hybride se dilatèrent en dévorant le bleu de son iris, renvoyant des reflets brillants quand la lumière les frappaient. Il cligna quelques secondes, les oreilles aux aguets. Même s'il s'était habitué à pas mal d’aspects de sa mutation, la vision 'nocturne' était toujours aussi étrange à appréhender. Le monde lui semblait distordu, et il avait besoin d'un peu de temps pour s'y faire.

"A pattes de velours donc..."

Il se glissa entre les entrepôts, marchant d'un pas souple et silencieux. Le bruit de la circulation était curieusement bas, et le jeune mutant entendait clairement les pas de son acolyte. C'était étrange... Et ça le rendait assez nerveux. Sa longue queue soyeuse oscillait souplement, et il s'arrêtait parfois sans raison apparente... Ayant entendu une poutre craquer où le vent siffler. Et dire qu'il priait pour un peu de silence... Mais les bruits étaient d'autant plus forts. et surprenants. Et... Bref.

Le premier élément incongru que put remarquer Jude fut une silhouette humaine à quelques dizaines de mètres. Il s'agissait d'une femme asiatique emmitouflée dans d'épais habits, en train de lire le dos contre l'entrepôt orange.

La vue perçante de l'Anglais pouvait également discerner la rue perpendiculaire suivante, vingt mètres environ derrière la liseuse, et les entrepôts suivants qui n'étaient pas vert pomme. Il pouvait également ressentir la présence de plusieurs marcheurs isolés, et d'un petit groupe d'hommes qui se trouvait une ou deux rues plus loin - entre 3 et 5 personnes, difficile à dire - et prenait la même direction qu'eux.

Kieran le suivait avec moultes précautions, accentuant ses gestes pour bien montrer qu'il se faisait discret.

Spoiler:

Plan des lieux : Tu es le point rouge, Kieran le bleu. Les entrepôts blancs sont d'une couleur encore indéterminée.

Invité

Le grand brun s'immobilisa, les oreilles pointées vers l'avant, le corps frémissant. Devant eux, à disons... entre dix et quinze mètres, une jeune femme. Qui lisait. L'incongruité de l'image lui fin cligner des yeux. Non, elle était bien là. Ça commençait bien. Ce n'était certainement pas un endroit où s'arrêter tranquillement pour bouquiner donc... Amie où ennemie? Dans le doute, ennemie. Première faiblesse de leur association: il ne connaissait pas la fameuse Mai, donc il n'était pas capable de la reconnaitre. Et il était le seul des deux à voir dans la pénombre épaisse... Voilà qui été fort stupide.

Le jeune mutant laissa Kieran le rattraper et pivota à demi vers lui, avant de l’interroger à voix basse.

"Précision de dernière minute: à quoi ressemble t'elle, cette Mai?"

Même en baissant le voix, elle lui semblait terriblement bruyante. Ce n'est pas comme s'il avait le choix après tout. Quelle manque d'organisation... Il se faisait honte. Vraiment. C'était vraiment une imbécilité de sa pa... La main du Brun jaillit et crocheta le bras de son innocent accompagnateur. Ils n'étaient pas seuls. Plus précisément, il n'y avait pas que cette femme qui trainaient dans le coin.

Il le sentait.

Des hommes, un petit groupe... Qui arrivaient vers eux. D'une où deux rue plus loin, maximum. La situation lui semblait fortement compromise. Objectivement, cela pouvait être rien; juste une bande d'avinés passant par là pour une raisons qui leur appartient. Mais avec la situation de son collège bleu... Disons que la théorie du complot devenait diablement tentante. Et entre une femme seule et un groupe d'homme, il avait le faiblesse de croire qu'elle serait moins dangereuse... Même si sa mère lui avait très tôt appris que l'absence de chromosome Y ne rend pas un prédateur moins redoutable. Il consenti enfin à lâcher le bras de Kieran et plissa les yeux.

"Nous avons de la compagnie.une femme tout près et un groupe d'hommes une ou deux rues plus loin."

Il repris son avancée d'un pas élastique, longeant le mur le plus loin possible des lampadaires. Il était trop concentré sur son objectif pour percevoir la pantomime de son accompagnateur, sans quoi il l'aurai déjà rabroué, le charmant jeune homme. Arrivé à une distance raisonnable, il détailla les alentours et jeune asiatique, songeur. Pas d'entrepôt vert pomme pour le moment. Pas de Mai alors? Il réfléchit rapidement, immobile. Les hommes se rapprochaient. Bon. Espérons au moins qu'en cas de pépin l'homme bleu saura se défendre correctement... Il obliqua vers la lumière et se rapprocha de la liseuse. Il porta la main à son gavroche et salua poliment.

"Bonsoir mademoiselle."

La question de l'apparence sembla poser une colle à Kieran.

- Comment dire...

C'était plus la description que l'image qui semblait être un problème.

- Elle est asiatique...elle a des cheveux...rouges...originaux...t'inquiète, tu la reconnaîtras quand tu la verras.

Il eut par la suite bien du mal à suivre les grandes enjambées de Jude, et se mit carrément à trottiner pour pouvoir rester à sa hauteur, s'arrêtant quand on le lui ordonnait. On ne pouvait pas lui reprocher d'être réfractaire aux ordres. Il murmura d'ailleurs, avant qu'ils n'arrivent à la hauteur de l'inconnue :

- C'est pas elle. Elle, je la connais pas.

En entendant le salut, la femme ferma son livre - "Le Dernier Jour d'un Condamné de Victor Hugo" - et sourit à l'intention des deux arrivants sans sembler le moins du monde remarquer leurs traits mutants.

- Bonsoir monsieur...messieurs, précisa-t-elle lorsque la silhouette de Kieran apparut dans son champ de vue...mesdames et messieurs, finit-elle par dire. Une autre Asiatique était sortie de la bulle qui venait d'apparaître dans le dos de Jude et Kieran.

Londres-Une petite tasse de thé? Japanese-cosplay-character

- ...c'est elle, Mai, dit assez inutilement Kieran. La dernière arrivée, à la chevelure hérissée et flamboyante, ne semblait pas particulièrement de bonne humeur. Outre son style vestimentaire fait de cuir et de plaques dans un style punk aux antipodes de celui de Jude, elle portait des lunettes d'aviateur sur le front.

- Glide. Il s'est passé quoi bordel ? Elle s'adressait au mutant bleu, qui en retour l'enjoignait de parler plus bas en désignant la ruelle dans laquelle Jude avait identifié des intrus. Et c'est qui, ceux-là ? demanda-t-elle en désignant Jude et l'inconnue. Pardon, finit-elle par dire en se tournant vers eux, je suis un peu sur les nerfs. Je reformule plus poliment : qui êtes-vous, que faites-vous ici ?

L'Asiatique au bonnet hocha simplement la tête, signifiant ainsi qu'il n'y avait pas d'offense retenue.

- Je m'appelle Em...Swift. Êtes-vous des amis des types armés dans le hangar vert ?

Invité

Bon, une asiatique inconnue et toujours pas de hangar vert pomme. Sans parler des hommes qui se rapprochait toujours. Le bilan était mauvais. Mais au moins la jeune femme n'était pas hostile. Son salut lui parut étrange... Jusqu'à ce qu'il perçoive une présence dans son dos. Le mutant eut un sursaut et se décala d'un bond, mettant les trois personnes présentes dans son champs de vision. Mais ils en avaient pas marre de le surprendre un peu?! C'était agaçant à la fin! C'était un tic des morlocks c'est ça? Un truc de groupe? Le jeune homme croisa les bras, la queue agitée de tics. Il en avait franchement marre.

Il profita sans vergogne de sa haute taille pour toiser la fameuse Mai, Laissant couler un regard désapprobateur sur sa tenue. Quel manque de goût... Il ne comprenait pas comment elle avait pu surgir ainsi derrière lui, et Cela le mettait d'autant plus de mauvaise humeur. Et un Jude de mauvaise humeur est encore pire qu'une Jude de bonne humeur, ce qui n'est pas peu dire. Son interlocutrice du moment ne semblait pas être dans de bonnes disposition non plus, mais ce n'était pas son problème. Le côté positif, c'était que le bilan s'équilibrait: une inconnue et leur rendez-vous. Rendez vous revèche, mais rendez-vous quand même. enfin, 'leur' rendez vous... heureusement, ce n'était pas le sien.

"Jude. J'ai servi de sauveur à votre... Glide."

Ce dernier mot était accompagné d'un regard froid en direction du bleu. Il savait bien que rendre service n'était jamais payant. On s'attirait plus d'ennuis qu'autre chose. Parce que les gens ne sont jamais satisfait -lui non plus, mais ne mélangeons pas tout- . Jude observa la petite troupe, l’oreille au aguets.

e groupe d'hommes n'étaient pas loin, et il n'avait vraiment aucune envie de se faire surprendre une fois de plus. Il avait eu son cota pour les cinq prochaines années là. Il ne peut cependant pas s’empêcher de relever:

"Des types armés? Et vous vous disiez innocent Kieran... tss tss. Je suis déçu."

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